ROME, Mercredi 26 janvier 2011 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcée le 25 janvier, lors des vêpres qu’il a présidées dans la basilique Saint-Paul-hors-les-Murs pour la fin de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens.
Chers frères et sœurs,
Suivant l’exemple de Jésus, qui à la veille de sa passion pria le Père pour ses disciples « afin que tous, ils soient un » (Jn 17, 21), les chrétiens continuent sans cesse d’invoquer de Dieu le don de l’unité. Cette requête devient plus intense au cours de la Semaine de prière, qui se conclut aujourd’hui, alors que les Eglises et les communautés ecclésiales méditent et prient ensemble pour l’unité de tous les chrétiens. Cette année, le thème offert à notre méditation a été proposé par les Communautés chrétiennes de Jérusalem, auxquelles je voudrais exprimer mes vifs remerciements, accompagnés de l’assurance de mon affection et de ma prière, ainsi que de la part de toute l’Eglise. Les chrétiens de la Ville Sainte nous invitent à renouveler et à renforcer notre engagement pour le rétablissement de la pleine unité en méditant sur le modèle de vie des premiers disciples du Christ réunis à Jérusalem : « Ils étaient fidèles – lisons-nous dans les Actes des Apôtres – à écouter l’enseignement des apôtres et à vivre en communion fraternelle, à rompre le pain et à participer aux prières » (Ac 2, 42). Telle est la description de la première communauté, née à Jérusalem le jour même de la Pentecôte, suscitée par la prédication que l’Apôtre Pierre, rempli de l’Esprit Saint, adresse à tous ceux qui étaient arrivés dans la Ville Sainte pour la fête. Une communauté qui n’est pas refermée sur elle-même, mais, dès sa naissance, catholique, universelle, capable d’embrasser des personnes de langues et de cultures différentes, comme en témoigne le livre des Actes des Apôtres lui-même. Une communauté qui n’est pas fondée sur un pacte entre ses membres, ni le simple partage d’un projet ou d’un idéal, mais sur la communion profonde avec Dieu, qui s’est révélé dans son Fils, sur la rencontre avec le Christ mort et ressuscité.
Dans un bref sommaire, qui conclut le chapitre commencé par le récit de la descente de l’Esprit Saint le jour de la Pentecôte, l’évangéliste Luc présente de manière synthétique la vie de cette première communauté : ceux qui avaient accueilli la parole prêchée par Pierre et avaient été baptisés, écoutaient la Parole de Dieu, transmise par les Apôtres ; ils restaient volontiers ensemble, se chargeant des services nécessaires et partageant librement et généreusement les biens matériels ; ils célébraient le sacrifice du Christ sur la Croix, son mystère de mort et de résurrection, dans l’Eucharistie, en répétant le geste de la fraction du pain ; ils louaient et rendaient grâce sans cesse au Seigneur, invoquant son aide dans les difficultés. Mais cette description, n’est pas simplement un souvenir du passé, ni même la présentation d’un exemple à imiter ou d’un objectif idéal à atteindre. Elle est plutôt une affirmation de la présence et de l’action de l’Esprit Saint dans la vie de l’Eglise. Elle est une attestation, pleine de confiance, que l’Esprit Saint, unissant tous en Christ, est le principe de l’unité de l’Eglise et fait des croyants une seule chose.
L’enseignement des Apôtres, la communion fraternelle, la fraction du pain et la prière sont les formes concrètes de vie de la première communauté chrétienne de Jérusalem réunie par l’action de l’Esprit Saint, mais dans le même temps ils constituent les caractéristiques essentielles de toutes les communautés chrétiennes, de chaque époque et de chaque lieu. En d’autres termes, nous pourrions dire qu’ils représentent également les dimensions fondamentales de l’unité du Corps visible de l’Eglise.
Nous devons être reconnaissants car, au cours des dernières décennies, le mouvement œcuménique, « né sous l’effet de la grâce de l’Esprit Saint » (Unitatis redintegratio, 1) a accompli des progrès significatifs, qui ont permis de parvenir à des convergences et des consensus encourageants sur divers points, développant entre les Eglises et les Communautés ecclésiales des relations d’estime et de respect réciproques, ainsi que de collaboration concrète face aux défis du monde contemporain. Toutefois, nous savons bien que nous sommes encore loin de cette unité pour laquelle le Christ a prié et qui se reflète dans la description de la première communauté de Jérusalem. L’unité à laquelle le Christ, à travers son Esprit, appelle l’Eglise ne se réalise pas seulement sur le plan des structures organisationnelles, mais se configure, à un niveau beaucoup plus profond, comme unité exprimée « dans la profession d’une seule foi, dans la célébration commune du culte divin, dans la concorde fraternelle de la famille de Dieu » (ibid., n. 2). La recherche du rétablissement de l’unité entre les chrétiens divisés ne peut donc pas se résoudre à une reconnaissance des différences réciproques et à l’obtention d’une coexistence pacifique : ce à quoi nous aspirons est l’unité pour laquelle le Christ lui-même a prié et qui, par sa nature, se manifeste dans la communion de la foi, des sacrements, du ministère. Le chemin vers cette unité doit être ressenti comme un impératif moral, la réponse à un appel précis de Seigneur. C’est pourquoi il faut vaincre la tentation de la résignation et du pessimisme, qui est un manque de confiance dans la puissance de l’Esprit Saint. Notre devoir est de poursuivre avec passion le chemin vers cet objectif, grâce à un dialogue sérieux et rigoureux pour approfondir le patrimoine théologique, liturgique et spirituel commun ; grâce à la connaissance réciproque ; grâce à la formation œcuménique des jeunes générations et, surtout, grâce à la conversion du cœur et à la prière. En effet, comme l’a déclaré le Concile Vatican II, « ce projet sacré, la réconciliation de tous les chrétiens dans l’unité d’une seule et unique Eglise du Christ, dépasse les forces et les capacités humaines » ; ainsi notre espérance doit donc être tout d’abord placée « dans la prière du Christ pour l’Eglise, dans l’amour du Père à notre égard, et dans la puissance du Saint-Esprit » (ibid., n. 24).
Sur ce chemin de recherche de la pleine unité visible entre tous les chrétiens nous sommes accompagnés et soutenus par l’Apôtre Paul, dont nous célébrons aujourd’hui solennellement la Fête de la conversion. Avant que le Ressuscité n’apparaisse sur le chemin de Damas en lui disant : « Je suis Jésus, celui que tu persécutes » (Ac 9, 5), celui-ci était l’un des adversaires les plus acharnés des premières communautés chrétiennes. L’évangéliste Luc décrit Saul parmi ceux qui approuvèrent la mort d’Etienne, au cours des journées où éclata une violente persécution contre les chrétiens de Jérusalem (cf. Ac 8, 1). Saul partit de la Ville Sainte, pour étendre la persécution des chrétiens jusqu’en Syrie et, après sa conversion, il y revint pour être introduit auprès des apôtres de Barnabé, qui se fit le garant de l’authenticité de sa rencontre avec le Seigneur. Dès lors, Paul fut admis non seulement comme membre de l’Eglise, mais également comme prédicateur de l’Evangile avec les autres Apôtres, ayant reçu, comme eux, la manifestation du Seigneur ressuscité et l’appel spécial à être un « instrument élu » pour apporter son nom auprès des nations (cf. Ac 9, 15). Au cours de ses longs voyages missionnaires, en pèlerinage dans des villes et des régions différentes, Paul n’oublia jamais le lien de communion avec l’Eglise de Jérusalem. La collecte en faveur des chrétiens de cette communauté, qui très vite eurent besoin d’être secourus (cf. 1 Co 16, 1), occupa une place importante dans les préoccupations de saint Paul, qui la considérait n
on seulement comme une œuvre de charité, mais comme le signe et la garantie de l’unité et de la communion entre les Eglises qu’il avait fondées et cette communauté primitive de la Ville Sainte, un signe de l’unité de l’unique Eglise du Christ.
Dans ce climat d’intense prière, je désire adresser mon salut cordial à toutes les personnes présentes : au cardinal Francesco Monterisi, archiprêtre de cette basilique, au cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, et aux autres cardinaux, aux frères dans l’épiscopat et dans le sacerdoce, à l’abbé et aux moines bénédictins de cette antique communauté, aux religieux et aux religieuses, aux laïcs qui représentent toute la communauté diocésaine de Rome. Je voudrais saluer de manière particulière les frères et les sœurs des autres Eglises et Communautés ecclésiales représentées ici ce soir. Parmi eux, je suis particulièrement heureux d’adresser mon salut aux membres de la Commission mixte internationale pour le dialogue théologique entre l’Eglise catholique et les Eglises orientales orthodoxes, dont la réunion se déroule ici, à Rome, ces jours-ci. Nous confions au Seigneur le succès de votre rencontre, afin qu’elle puisse représenter un pas en avant vers l’unité tant souhaitée.
Puis le pape a dit en allemand :
Je salue également les membres de l’Eglise unie évangélique luthérienne allemande, qui sont venus à Rome accompagnés par l’évêque de leur diocèse de Bavière.
Et en italien :
Chers frères et sœurs, confiants dans l’intercession de la Vierge Marie, Mère du Christ et Mère de l’Eglise, nous invoquons donc le don de l’unité. Unis à Marie, qui le jour de la Pentecôte était présente au Cénacle avec les Apôtres, nous nous adressons à Dieu source de chaque don, afin que se renouvelle pour nous le miracle de la Pentecôte et que, guidés par l’Esprit Saint, tous les chrétiens rétablissent la pleine unité dans le Christ. Amen.
© Copyright du texte original plurilingue : Libreria Editrice Vaticana
Traduction : Zenit