ROME, Jeudi 13 mai 2010 (ZENIT.org) – Alors que l’ostension du Saint Suaire se poursuit à Turin jusqu’au 23 mai, un autre Suaire, bien plus petit, est conservé au sanctuaire de Manoppello, petit village italien des Abruzzes. Il représente le visage du Christ.
Pendant plusieurs mois, Paul Badde, journaliste allemand, correspondant à Rome du journal Die Welt depuis 2000, a enquêté sur le « secret de Manoppello » : D’où vient ce tissu ? Comment cette image s’est-elle formée ? Pourrait-il être le voile de sainte Véronique ? Quel lien avec le Saint-Suaire ?
Il livre le résultat de son enquête dans un ouvrage intitulé « L’autre suaire » et paru en français aux Editions de l’Emmanuel – Editions du Jubilé.
Benoît XVI s’est lui-même rendu en pèlerinage à Manoppello en septembre 2006 (cf. ZENIT 1er septembre 2006). Il s’agissait de la première visite d’un pape dans ce sanctuaire.
Dernièrement, dans l’éditorial qu’il a consacré à la visite de Benoît XVI à Turin pour l’ostension du Saint-Suaire, le père Federico Lombardi, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège, a lui-même évoqué ces « images que la tradition accrédite comme des voies précieuses pour entrevoir » le visage du Christ, « que ce soit à Manoppello ou à Turin ».
Paul Badde est revenu pour ZENIT sur l’enquête qu’il a menée et sur les conclusions qu’il en a tirées.
ZENIT : En quelques mots, qu’est-ce que le suaire de Manoppello ?
Paul Badde : Il s’agit d’un voile fait d’un tissage extrêmement fin, fabriqué avec du byssus sur lequel apparaît le visage du Christ. Or il est techniquement impossible de peindre ce type de soie, réalisée à partir de filaments de Pinna nobilis. On ne retrouve d’ailleurs aucun pigment de peinture sur le voile. L’apparition du visage sur le voile reste un mystère qui relève de l’inexplicable.
ZENIT : Pourquoi mérite-t-il d’être connu ?
Paul Badde : Surtout pour la majesté du visage du Christ sur cette toile. Il s’agit de l’icône par excellence du Christ, l’ancienne Vera Ikon, le trésor le plus précieux de la Chrétienté, tenue pour disparue pendant des siècles et maintenant redécouverte : le visage merveilleusement humain de Dieu.
ZENIT : A vos yeux, qu’est-ce qui pourrait prouver qu’il s’agit du visage du Christ ?
Paul Badde : Il est aisé de mettre en évidence qu’il s’agit là du voile dit de Véronique qui fut longtemps vénéré et montré à Saint Pierre à Rome. Pour preuve : les très nombreuses données de cette époque qui apportent un témoignage convaincant. Ce qui est néanmoins incroyablement plus saisissant est la constatation que ce voile doit être identique au « soudarion », c’est-à-dire au suaire que l’apôtre Jean évoque au moment où il découvre avec l’apôtre Pierre que le Christ est ressuscité des morts. De très nombreux indices confortent également cette constatation.
ZENIT : Peut-on imaginer un lien avec le Saint Suaire ?
Paul Badde : Oui, le voile représente le même visage, celui de Jésus de Nazareth. Mais le Saint Suaire le représente mort, alors que le voile le représente vivant, avec les mêmes plaies au visage mais guéries ! Les mathématiciens ont calculé avec une probabilité de 200 000 000 000/1 que le Suaire de Turin provenait du Saint Sépulcre à Jérusalem. En d’autres termes il s’agit là réellement d’un des « linges » retrouvés dans le tombeau et décrits par un témoin, l’apôtre Jean. Or dans ce passage d’une extrême importance Jean évoque expressément un petit voile « à part » des autres linges, déposé à un endroit particulier du tombeau. Cela ne peut être que ce petit voile qui se trouve aujourd’hui à Manoppello.
ZENIT : Qu’est ce qui vous a fasciné dans ce suaire, jusqu’à mener une telle enquête ?
Paul Badde : Ce voile exerce une fascination tout à fait unique. Rien sur cette terre ne saurait lui ressembler. En tant que journaliste, je n’ai pas pu résister à cette fascination. Les journalistes recherchent toujours un « scoop ». Ils sont à la recherche de l’incroyable. J’avais moi-même fait de nombreuses découvertes, dans les pays les plus divers, en temps de paix comme en temps de guerre. Mais je n’avais jamais rien vu de comparable au voile, ni avant ni après.
ZENIT : Pourquoi cette forme de thriller donné à votre ouvrage ?
Paul Badde : C’est exactement de cette manière que j’ai effectué mes recherches. Aucune phrase ne fut inventée, rien n’était planifié. Les événements se sont produits tels que je les ai consignés.
ZENIT : Comment interprétez-vous la visite de Benoît XVI à Manoppello ?
Paul Badde : Ce fut peut-être le dernier de cette série de miracles. Le pape a lu mon rapport et a décidé – malgré les résistances au sein de l’Eglise et du Vatican – de se rendre à Manoppello. C’était d’ailleurs le premier voyage du pape décidé par lui-même. Il connaissait bien sûr la tradition de la Sainte Face qualifiée d’acheiropoïète – qui n’a pas été fait de main d’homme. En priant en silence devant le voile le 1er septembre 2006, il a réintroduit cette image dans l’histoire et jusqu’aux confins du monde. Et depuis ce moment il ne cesse de parler du « visage humain de Dieu ». Il s’agit de la marque de son pontificat.
Propos recueillis par Marine Soreau