ROME, Dimanche 11 octobre 2009 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous les synthèses des discours des pères du synode sur l’Afrique, intervenus lors de la neuvième Congrégation générale, vendredi 9 octobre dans l’après-midi. Il s’agit de :
– Card. Leonardo SANDRI, Préfet de la Congrégation pour les Églises Orientales (CITÉ DU VATICAN)
– Mgr Jean-Pierre BASSÈNE, Évêque de Kolda, Président der la Fondation Jean-Paul II pour le Sahel (SÉNÉGAL)
– Mgr Henryk HOSER, S.A.C., Archevêque-Évêque de Warszawa-Praga (POLOGNE)
– Card. Bernard AGRÉ, Archevêque émérite d’Abidjan (CÔTE D’IVOIRE)
– Rév. Pierre Noël NIAVA, Chapelain national aux Armées (CÔTE D’IVOIRE)- Mgr Denis Komivi AMUZU-DZAKPAH, Archevêque de Lomé (TOGO)
– Mgr Ignatius CHAMA, Évêque de Mpika (ZAMBIE)
– Mgr Benedito Beni DOS SANTOS, Évêque de Lorena (BRÉSIL)
– Mgr Peter J. KAIRO, Archevêque de Nyeri (KENYA)
– Mgr Boniface LELE, Archevêque de Mombasa (KENYA)
Sont également intervenus :
Un délégué fraternel
– Son Excellence Barnaba EL SORYANY, Évêque de la Église Copte Orthodoxe en Italie
Quatre auditeurs
– M. Laurien NTEZIMANA, Licenciée en Théologie, Diocèse de Butare (RWANDA)
– Fr. Armand GARIN, Petit Frère de Jésus (Francie), Responsable régional des Petits Frères de Jésus pour l’Afrique du Nord (Algérie et Maroc), Annaba (ALGÉRIE)
– Prof. Raymond RANJEVA, Ancien Vice-Président de la Cour Internationale de Justice (Pays-Bas), Membre du Conseil Pontifical Justice et Paix (Cité du Vaticain) (MADAGASCAR)
– Mme. Elena GIACCHI, Gynécologue du Centre d’Etudes et de Recherches pour la Régulation Naturelle de la Fertilité, Université Catholique du Sacré Coeur; Presidente de W.O.O.M.B.-Italia [Coordination Nationale pour le méthode de l’Ovulation Billings-Italia] (ITALIE)
Un invité spécial
M. Rodolphe Adada, représentant spécial conjoint du secrétaire général des Nations unies et du président de la commission de l’union africaine au Darfour (Soudan)
Nous reprenons ci-dessous les résumés des interventions, publiés par la secrétairerie générale du Synode (traductions de travail, non officielles).
– Card. Leonardo SANDRI, Préfet de la Congrégation pour les Églises Orientales (CITÉ DU VATICAN)
Je rends grâce au Seigneur qui nous permet de nous rapprocher de l’Église de Dieu qui est en Afrique. Dans sa variété ecclésiale particulière l’Afrique abrite l’Église patriarcale d’Alexandrie des Coptes catholiques et l’Église alexandrine catholique de rite ge’ez de l’Éthiopie et de l’Érythrée. L’Égypte, avec l’Église latine, jouit de la présence des communautés arménienne, chaldéenne, grec-melkite, maronite et syrienne. J’adresse mon salut aux confrères orientaux ici présents, et je l’étends à tous les pasteurs latins et orientaux d’Afrique, spirituellement unis à cette assemblée à commencer par Sa Béatitude Antonios Naguib, Patriarche d’Alexandrie des Coptes catholiques: je les remercie tous pour leurs innombrables efforts apostoliques. C’est une Église en expansion. La valeur sociale de sa mission religieuse se mesure à sa fidélité à ce qui lui est propre: la sauvegarde de l’homme intégral, dont la vocation est supraterrestre. Le premier élan donné par les Évêques, les prêtres, les religieux, les religieuses et les fidèles est celui de promouvoir la réconciliation grâce à leur conversion personnelle pour que Dieu continue à accomplir en Afrique aussi cette « divinisation » de tous et de tout mise en lumière par les Pères grecs. Le Synode entend relancer le « service de la réconciliation, de la justice et de la paix ». Cette proposition est urgente. Son efficacité, cependant, se mesurera toujours à l’indispensable vision théologique et pastorale qui l’accompagnera. Que les Églises en Afrique, qui se sentent en communion avec le Successeur de Pierre et avec l’Église universelle, continuent sans aucune crainte à confesser le saint nom de Jésus Christ, l’œuvre de salut qu’il a accompli une fois pour toutes et dont la grâce retombe éternellement sur nous, témoignant que le vrai nom de la réconciliation, de la justice et de la paix n’est autre que celui de Jésus Christ, le Crucifié Ressuscité, donneur d’Esprit, Pierre angulaire et Époux de l’Église. La réflexion synodale ne pourra se poursuivre avec profit que dans une forte conscience christologique et ecclésiologique. C’est en n’y renonçant jamais que devront être faits les pas qui pourront redessiner les stratégies œcuméniques et interreligieuses conformément au progrès spirituel et social de l’Afrique. La situation est différente de celle du Synode de 1994, mais les lourds problèmes du passé demeurent. Il est très important que les chrétiens, les pasteurs et les fidèles, aient la conscience certaine que l’Afrique a donné beaucoup de son sang, de sa sueur et de ses larmes en témoignage de sa foi, de son espérance et de son amour, ce qui est une véritable réponse à l’appel de la sainteté. Je voudrais souligner une particularité éthiopienne/érythréenne: parmi les saints cités dans le n. 36 de l’Instrumentum Laboris ne figure pas, en effet, Giustino De Jacobis (1800-1860), le lazariste qui avait compris l’importance de la liturgie ge’ez pour le christianisme de la Corne d’Afrique et s’était « inculturé » (cf. n. 73). L’Afrique, en effet, doit continuer de travailler à une inculturation adaptée du message chrétien. C’est l’Exhortation apostolique « Orientale lumen » qui présente les Églises orientales comme « un exemple de réussite d’inculturation digne d’intérêt » (cf O.L. n. 7). Une relation saine et équilibrée entre la « religion et la tradition africaine » permettra à l’Église avec la communauté civile de soigner les plaies de l’Afrique. Santé, éducation, développement socio-économique, protection des droits de l’homme, guérison des blessures, lutte contre l’émigration par des programmes économiques locaux qui limitent la fuite des jeunes (n. 25, n. 65); exploitation et néo-colonialisme (nn. 12, 64, 72, 140), analphabétisme (n. 31), corruption (n. 57), situation de soumission des femmes,… demandent des réponses de charité agissante et de formation dans tous les domaines (cf. nn. 54, 60, 85, 93, 97, 111, 116, 123, 126-128, 129, 133-136). La coexistence et la collaboration sincère entre tous les catholiques des différents rites s’imposent. Sans cette entente, on barre le chemin au dialogue œcuménique, qui donne la force aux chrétiens de défendre leur liberté personnelle et communautaire et de professer publiquement leur foi, permettant à l’Église d’être libre et missionnaire et à l’Afrique d’être une « société plurielle ». Loins de constituer un obstacle à l’unité, insérées comme elles le sont dans la situation et les mentalités locales, les Églises orientales catholiques peuvent « bâtir des ponts » (n. 90) en vue de la réconciliation, de la justice, de la paix et de la rencontre avec l’islam déjà en marche dans plusieurs pays. J’appelle cela de mes vœux, tandis qu’avec la communauté d’Éthiopie et d’Érythrée je considère la portée symbolique de ce « pan de terre africaine » abrité par les murs du Vatican: l’Église de Saint-Stéphane-des-Abyssins et le Collège pontifical éthiopien. Je verrais volontiers en eux une image de l’Église qui, une fois le Synode terminé, se lance avec force et espoir sur les routes de la réconciliation, de l’espoir et de la paix en Afrique, se sentant avec joie « sub umbra Petri ».
– Mgr Jean-Pierre BASSÈNE, Évêque de Kolda, Président der la Fondation Jean-Paul II pour le Sahel (SÉNÉGAL)
Neuf pays sont membres de la Fondation Jean-Paul Il pour le Sahel: le Burkina Faso, le Cap-Vert, la Gambie, la Guinée-Bissau, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal et le Tch
ad.
Cette Fondation, créée en 1984, a 25 ans d’existence aujourd’hui. Elle a pour but de favoriser la formation de personnes qui se mettent au service leur pays et de leurs frères, sans aucune discrimination, dans un esprit de promotion humaine intégrale et solidaire, pour lutter contre la désertification ses conséquences.
Née du souci du bien-être et du développement des populations sahéliennes, la Fondation Jean-Paul Il a très tôt inscrit ses actions dans l’intervention en faveur de l’écologie et la sauvegarde de l’environnement. Ce faisant, elle apporte sa contribution à l’émergence de modes de gestion plus rationnelle des ressources naturelles, et participe à la lutte contre la pauvreté.
Œuvre d’Église, la Fondation Jean-Paull II appuie, par le financement de projets, les États, les associations, les groupements ou coopératives, quelque soit l’appartenance religieuse ou confessionnelle des promoteurs dans l’espace sahélien. À ce titre, elle contribue efficacement à la culture de la paix et de la réconciliation entre les peuples.
La Fondation Jean-Paul II compte toujours sur l’aide fraternelle de l’extérieur pour poursuivre sa mission. Cependant, elle s’est désormais résolument engagée à susciter chez les sahéliens, l’esprit de coresponsabilité et de solidarité.
Les réponses positives, déjà enregistrées dans ce sens, autorisent à espérer que, parallèlement à la lutte contre la désertification, une véritable civilisation de l’amour inspiré de l’Évangile prenne dans les cœurs des sahéliens.
– Mgr Henryk HOSER, S.A.C., Archevêque-Évêque de Warszawa-Praga (POLOGNE)
L’éducation aux valeurs familiales est d’une urgente nécessité dans le monde et particulièrement en Afrique, à l ‘heure où des pressions extérieures croissantes renvoient l’exercice de la paternité et de la maternité responsables au domaine purement sanitaire et hospitalier, niant en cela la double nature, spirituelle et sensible, de l’amour conjugal. La pastorale familiale et plus particulièrement la transmission de la vie ont été quasi abandonnées au monde médical et technicien.
Or des programmes existent déjà : ving six pays africains bénéficient des programmes d’éducation à la vie familiale et de planification naturelle (EVF et PFN) au stade embryonnaire ou structuré. Mais on est trop faible pour se permettre d’ avancer en ordre dispersé. La Fédération Africaine d’Action familiale créée à Cotonou en 2001 offre, à la demande des évêques, des sessions de formation pour les éducateurs et pour les couples.
Le Synode précédent « considère l’ évangélisation de la famille africaine comme une des priorités majeures, si l’ on veut qu’elle assume à son tour le rôle de sujet actif dans la perspective de l’évangélisation des familles par les familles.
– Card. Bernard AGRÉ, Archevêque émérite d’Abidjan (CÔTE D’IVOIRE)
Comme tout pays organisé, les jeunes nations d’Afrique, d’Amérique du sud, etc .. ont dû faire appel à des banques internationales et autres organismes financiers pour réaliser les nombreux projets en vue de leur développement. Très souvent on ne se méfie pas assez des dirigeants mal habiles. Ils sont tombés dans les pièges de ceux et celles que les initiés appellent « les assassins financiers », les chacals commandités par des organismes rompus dans les marchés de dupes destinés à enrichir les organisations financières internationales soutenues habilement par leurs états, ou d’autres instances noyées dans le complot du silence et du mensonge.
Les profits faramineux vont aux assassins financiers, aux multinationales ainsi qu’à quelques nationaux puissants qui servent de paravent aux négociants étrangers. Ainsi la majorité des nationaux continue de croupir dans la pauvreté et les frustrations qu’elle engendre.
Les « assassins financiers » porteurs de financements pléthoriques s’arrangent avec leurs partenaires locaux pour que les gros montants prêtés avec le système des intérêts composés ne puissent jamais se rembourser vite et entièrement. Les contrats d’exécution et d’entretien sont dévolus d’ordinaire, sous forme de monopole, aux ressortissants des prêteurs. Les pays bénéficiaires hypothèquent leurs ressources naturelles. Les habitants, de génération en génération, sont cadenassés, prisonniers pour de longues années.
Pour rembourser ces dettes inépuisables toujours menaçantes, comme l’épée de Damoclès sur la tête des états, le « service de la dette » pèse lourdement sur le budget national, dans l’ordre de 40 à 50% du Produit national brut.
Ainsi ficelé, le pays respire mal, il doit serrer la ceinture devant les investissement, les dépenses nécessaires d’éducation, de santé, du développement en général.
La dette devient même un paravent politique pour ne pas satisfaire les revendications légitimes, avec leur cortège de frustrations, de troubles sociaux, etc …. La dette nationale apparaît comme une maladie programmée par des spécialistes dignes des tribunaux qui jugent les crimes contre l’humanité, la conspiration dans le mal pour étouffer des populations entières. John Perkins, (Éditions Al Terre) a bien décrit les dessous d’une aide internationale jamais efficace en terme de développement durable.
Le problème clef de nos jours, c’est le désir, la volonté d’abolir tout esclavage.
Les générations montantes, jeunes gens et jeunes filles dans certains pays développés et du Tiers-monde, prend conscience que changer le monde, ses mythes et ses fantasmes, est un projet réaliste et possible. Des Ong naissent pour protéger l’environnement matériel et défendre les droits des peuples opprimés.
Lumière du monde, l’Église, pour jouer son rôle prophétique devrait s’engager concrètement dans cette lutte en vue de faire la vérité.
Les spécialistes savent que depuis des années la plupart des dettes ont été effectivement remboursées. Les supprimer purement et simplement n’est plus un acte de charité, mais de justice. Ainsi le Synode actuel devrait-il pouvoir prendre en compte ce problème de l’annulation des dettes, qui pèsent trop lourdement sur des peuples.
Pour que tout ceci ne soit pas une simple bouffée sentimentale, ma proposition serait qu’une commission internationale composée de spécialistes de la haute finance, de pasteurs avisés, hommes et femmes du Nord et du Sud ,se saisissent du dossier. À cette Commission serait confier la triple mission:
– d’étudier la faisabilité de l’opération car il est évident que tout n’est pas uniforme partout
– de prendre toutes sortes de dispositions pour éviter de retomber dans les mêmes situations
– de veiller concrètement à l’utilisation transparente des sommes ainsi économisées pour qu’elles servent effectivement les éléments de toute la pyramide sociale: ruraux et citadins. Éviter que les retombées de cette juteuse manne du siècle profitent toujours aux mêmes locaux et étrangers.
– Rév. Pierre Noël NIAVA, Chapelain national aux Armées (CÔTE D’IVOIRE)
Dans le cadre de la recherche de solution à la crise en Côte d’Ivoire plusieurs rencontres ont été organisées sous l’égide de la communauté économique de l’Afrique de l’Ouest et de la communauté internationale. Des rencontres ont été aussi organisées à l’initiative des forces belligérantes.
Le 4 mars 2007 de nouveaux accords sont signés à Ouagadougou (Burkina Faso). Un dialogue direct s’est établi entre les deux forces belligérantes. Depuis lors le processus a connu une très grande avancée avec beaucoup d’effets positifs: désarmement, démobilisation des ex-combattants, l’intégration des rebelles dans l’armée, la suppression de la zone de confiance, etc. notamment la fixation de la date des prochaines élections présidentielles le 29 novembre prochain.
La Conférence épiscopale a œuvré énormément pour la réconcili
ation. Les évêques ont eu plusieurs rencontres avec les leaders politiques et les forces belligérantes pour les ramener à la raison. Ils ont adressé aussi depuis le début de la crise plusieurs messages aux populations. Nous en indiquons ici seulement quatre (4) avec leurs grandes idées:
– ler message: l’appel au calme: c’est un appel à cesser les protestations populaires et les actes de vandalisme, à mettre fin à la paralysie des services publics et les marches interminables. Chacun doit donc garder son calme et œuvrer au retour de la paix.
– 2e message: l’appel à la conscience: les évêques invitent ici chaque Ivoirien à prendre conscience que le pays reste à construire; il faut par conséquent éviter de tomber dans l’erreur et le mensonge pour éviter la catastrophe au pays.
– 3e message: Exhortation aux habitants de la Côte d’lvoire et à la Communauté Internationale, les évêques exhortent les ivoiriens à éviter la haine, la vengeance et le mensonge et de s’efforcer de vivre dans l’amour, la justice, la vérité et la confiance réciproque. Ils exhortent également la communauté internationale à jouer franc jeu dans sa participation à la recherche de la paix.
– 4e message: message de réconciliation et de paix: les évêques disent ceci et je cite: Aujourd’hui, la paix est possible et à notre portée … l’heure n’est plus aux accusations et aux condamnations. En souillant ce pays de sang humain, nous avons tous failli, mal agi. Nous devons en demander sincèrement et humblement pardon à Dieu et pardon les uns aux autres, publiquement; et pour cela nous proposons que soit organisée une journée nationale de deuil, de jeûne, de prière pour tous, sans distinction de religions et de croyances. Tous nous devons, dans la pure tradition africaine et religieuse de la crainte de Dieu et du respect de la vie, demander pardon pour le sang humain versé. »
– Mgr Denis Komivi AMUZU-DZAKPAH, Archevêque de Lomé (TOGO)
Le chapitre II de l’Instrumentum Laboris nous situe au cœur même de la problématique de la réconciliation, de la justice et de la paix qui constituent un véritable besoin urgent pour l’ Afrique. Il va sans dire qu’il s’impose d’ajouter la vérité à cet impérieux trinôme.
L’exigence de la fidélité au Seigneur appelle ses disciples que nous sommes à être ambassadeurs de la réconciliation, entendue comme don de Dieu et annonce du salut qu’il nous accorde dès maintenant (cf. 2 Co 5, 11-21). L’accomplissement d’une telle mission s’inscrit dans la durée et exige un certain nombre de conditions qu’il nous faudrait garder présente à l’esprit tout au long de nos travaux:
1. L’élaboration d’un projet réaliste d’éducation à la culture de la paix pour toutes nos structures d’éducation et de formation en Afrique.
2. La création d’une banque de données socioculturelles et économiques susceptibles d’aider à la promotion de la réconciliation, de la justice et de la paix dans l’ amour et la vérité.
3. La mise en pIace d’un observatoire pour la prévention, la gestion et la résolution des conflits, en impliquant davantage l’Église famille de Dieu en Afrique.
4. L’assurance d’une très large et judicieuse diffusion de la Doctrine sociale de l’Église, gage de la création d’un nouvel ordre socioculturel, économique et politique plus juste, plus humain et plus fraternel; propice à l’instauration en Afrique du Règne de Dieu; Règne de justice, de réeonciliation, de vérité d’amour et de paix.
5. Bien évidemment la Bible, Parole de Dieu, dans ce sens est à présenter partout chez nous eomme source inépuisable de réconciliation, de justice et de paix; accueillie et vécue avec cohérence, elle peut devenir le moyen le plus sûr et le plus efficace pour l’instauration du Règne de Dieu en Afrique et dans le monde.
Dans cette optique, la Conférence des Évêques du Togo aurait bien aimé que le thème de notre deuxième Assemblée Spéciale pour l’Afrique du Synode des Évêques fut formulé comme suit: » L’Église-Famille de Dieu en Afrique, au service de la réconciliation, de la justice et de la paix ».
Néanmoins, cela n’a rien de grave, puisque aussi bien nous nous comprenons et nous nous entendons parfaitement, même avec des « sous-entendus ».
– Mgr Ignatius CHAMA, Évêque de Mpika (ZAMBIE)
Je souhaite insister ici sur la crise de l’économie locale dont mon peuple et moi faisons l’expérience dans notre diocèse rural du nord-est de la Zambie. La crise est présente lorsque les récoltes que nos agriculteurs besogneux ont fait pousser ne parviennent pas à atteindre les marchés ou à obtenir de justes prix. La crise survient lorsque les investisseurs étrangers remplissent nos supermarchés de moissons importées. La crise est causée par les pratiques commerciales nationales et internationales qui font que les biens subventionnés provenant d’Europe limitent la compétition loyale avec les biens locaux.
Qui plus est, en Zambie, actuellement, nos zones rurales font face à la campagne visant à favoriser le modèle d’agriculture reposant sur l’ingénierie génétique, une chose qui a été à juste titre critiqué par l’Instrumentum laboris au n. 58.
Ces dynamiques déloyales sont le signe d’une plus profonde déchirure entre la ville et la campagne qui menace le développement intégral et soutenable de la Zambie aujourd’hui. Notre propre gouvernement nous dit qu’alors que la pauvreté urbaine a décliné au cours de ces dernières années, la pauvreté rurale a augmenté de façon significative.
Mais que peut faire le Synode à ce propos? Je souhaite simplement rappeler à mes frères Évêques que le Synode de 1994 a déjà abordé une semblable question concernant la justice économique et a lancé un appel afin de soutenir la Campagne du Jubilé pour l’annulation de la dette des pays africains. L’Église tint compte de l’appel et parla en faveur de l’annulation de la dette qui devint, en Zambie et ailleurs, une étape significative vers l’humanisation de l’ordre économique. Nous avons besoin de tels appels à la justice aujourd’hui, par exemple, en affrontant des questions de politique commerciale, comme les Accords de partenariat économique (APE) entre l’Afrique et l’Europe, et des problèmes environnementaux comme le réchauffement global.
Je demande donc que notre Assemblée soutienne les appels en faveur d’un ordre économique plus juste qui protège les droits et l’avenir de nos populations rurales.
– Mgr Benedito Beni DOS SANTOS, Évêque de Lorena (BRÉSIL)
Le thème de cette Assemblée synodale « L’Église en Afrique au service de la réconciliation, de la justice et de la paix » concerne, d’une certaine manière, le Brésil à cause d’un passé marqué par l’injustice envers ceux qui sont venus au Brésil en provenance d’Afrique.
Nous avons besoin d’une « purification de la mémoire » exprimée par des actes concrets, surtout dans le cadre de l’éducation, du travail, de la politique. En ce sens, un certain nombre de mesures gouvernementales ont été adoptées. Elles doivent être approfondies et élargies.
Dans le domaine ecclésial, nous avons une pastorale « afro », organisée au niveau national par la Conférence nationale des Évêques du Brésil.
Dans le domaine ecclésial également, il existe une sensibilité spéciale envers l’image de l’Église-Famille de Dieu. Ceci nous rapproche de l’expérience ecclésiale de l’Église en Afrique. Cette image de l’Église n’interpelle pas seulement notre intelligence mais également notre affectivité, notre cœur et notre imagination.
Une telle conception de l’Église possède une centralité eucharistique et une dimension trinitaire. En effet, l’Eucharistie est la Cène que le Père a préparé pour sa Famille, qui est l’Église. C’est surtout dans la célébration de l’Eucharistie que l’Église se perçoit comme « Famille de Dieu ». À leur tour, le pain et le vin deviennent nourriture eu
charistique par la puissance de l’Esprit Saint, invoqué durant l’épiclèse.
Pour tout ce qui précède, je crois que les fruits de cette Assemblée synodale alimenteront la vie et la mission de l’Église non seulement en Afrique mais également au Brésil. Ce Synode contribuera à donner un nouvel élan à la collaboration missionnaire que l’Église au Brésil offre à différents diocèses d’Afrique.
– Mgr Peter J. KAIRO, Archevêque de Nyeri (KENYA)
Les nomades vivent et sont actifs depuis des siècles dans 52 diocèses des pays de l’AMECEA; ils sont aussi présents à l’ouest et au nord de l’Afrique.
Parfois, ils provoquent et déclenchent un conflit armé du fait du manque d’eau et de pâturages en particulier durant la sécheresse.
L’Église doit promouvoir le dialogue entre ces différentes tribus dans lesquelles le rôle des anciens est très important parce que les guerriers ne peuvent combattre sans la bénédiction des anciens.
Le gouvernement devrait également s’impliquer dans la construction de puits et de barrages dans les zones arides. Des institutions sanitaires et éducatives devraient également être créées et promues parmi les pasteurs. La Commission Justice et Paix devrait enseigner les droits de l’homme aux populations nomades. Les parents devraient être encouragés à éduquer leurs filles.
À l’intérieur de ces paroisses, il devient extrêmement difficile pour un prêtre de fournir aux personnes une attention pastorale adaptée. Dès lors, les nomades qui se déplacent relativement souvent demeurent exclus de l’activité ordinaire et traditionnelle de la paroisse. Il faut que l’Église mette en place de nouvelles formes d’évangélisation et une attention pastorale à la population nomade. Cela devrait comprendre la nomination de prêtres nomades, de coordinateurs pastoraux nomades, de catéchistes nomades, d’écoles mobiles, de cliniques vétérinaires et de centres ecclésiaux mobiles.
Nous proposons également que l’Église catholique puisse aussi s’engager dans des structures supra-diocésaines et dans des relations transfrontalières de manière à appliquer des initiatives de paix des deux côtés des frontières et au-delà de la limite des diocèses. Des réunions régulières des coordinateurs pastoraux chargés de l’apostolat des nomades des diocèses et des pays voisins peuvent aussi aider, tout comme la mise en place de stratégies communes et la démonstration d’une solidarité humaine et d’unité chrétienne.
– Mgr Boniface LELE, Archevêque de Mombasa (KENYA)
Les stigmates associés au Sida sont trop lourds à porter pour les seuls peuples, personnes ou communautés. J’ai vu la peur et le désespoir dans les yeux de nos peuples. Ils doivent trouver le courage et l’espérance en nous. Ils entendent les responsables religieux et leurs familles dire que, d’une manière ou d’une autre, ils sont responsables de leur maladie.
Nous devons aider nos peuples à prendre conscience que le Sida est une maladie et qu’il est faux de penser qu’ils en sont responsables. Ils peuvent ne pas avoir été prudents dans leurs comportements mais la maladie nous appelle à la compassion.
J’ai vu des familles qui avaient renvoyé leur belle-fille ou leur enfant parce qu’ils les soupçonnaient de la maladie. Le rejet des enfants par leur famille est une abomination. Il s’agit d’un grave péché aux yeux de Dieu. C’est une distorsion du message de Jésus qui est amour, pardon, réconciliation, retour à la famille de Dieu.
Nous devrions être avec nos jeunes et nos anciens pour les aider à éviter d’être infectés par le virus du Sida. Nous devrions aider les familles à comprendre que les enfants qui ont été laissés sans amour de leurs parents et sans conseil seront plus vulnérables à l’infection que ceux qui ont bénéficié du soutien de leur famille.
Le Sida est un kairos qui nous défie à révéler combien profonds sont nos péchés. J’ai connu un homme qui mourait du Sida et j’ai été honoré d’être à ses côtés durant ses derniers jours. Je l’ai vu se battre avec des décisions vitales et contre la honte de sa maladie, avec les stigmates qu’il a reçus de la société. J’ai commencé à comprendre ma propre humanité et mes propres péchés quand il tendit les mains pour toucher la Croix que je portais. J’ai senti qu’il s’acceptait lui-même alors qu’il recevait le pardon et la guérison de Dieu. C’est à ce moment qu’il m’a demandé de prendre soin de ses enfants, ce qu’il ne pouvait plus faire. J’ai senti sa confiance en moi, comme frère et comme pasteur. Dieu me défiais à m’accepter moi-même pour être réconcilié avec moi-même.
[Texte original: anglais]
AUDITION DES DÉLÉGUÉS FRATERNELS
Ensuite, est intervenu le Délégué fraternel suivant:
– Son Excellence Barnaba EL SORYANY, Évêque de la Église Copte Orthodoxe en Italie
Nous publions, ci-dessous, le résumé de l’intervention du Délégué fraternel:
– Son Excellence Barnaba EL SORYANY, Évêque de la Église Copte Orthodoxe en Italie
L’Afrique est pour nous porteuse de souvenirs très chers depuis le moment où notre père Abraham, puis Jacob et ses fils, sont arrivés en Égypte pour y vivre, terre où est né et a grandi Moïse et de laquelle, par la main de Dieu, il a libéré le peuple d’Israël. La chère terre qui a accueilli la Sainte Famille en fuite devant la persécution. L’Égypte de saint Marc et de son évangélisation des nations. Le pays où est né le monachisme sous l’impulsion du saint Abbé Antoine. Saint Athanase et saint Cyrille le grand et de nombreux saints et martyrs qui ont sacrifié leurs vies pour la défense de notre foi chrétienne.
Nous tous savons que ce continent a beaucoup souffert à cause du colonialisme qui a exploité les ressources naturelles et ne s’est pas occupé des populations, qui ont été abandonnées dans la pauvreté, la maladie, la faim et la dégradation totale. Pour ne pas parler, ensuite, des guerres qui ont ensanglanté et continuent à dévaster notre bien-aimée Afrique; l’exploitation des enfants-soldats, les persécutions et les violences quotidiennes à l’encontre des chrétiens dans la société, la destruction des valeurs familiales.
Ici intervient la mission de l’Église qui est d’évangéliser à travers la culture de la charité, la promotion de la paix et l’amour qui se concrétise dans le soin des malades, l’aide aux pauvres, la défense des opprimés, somme toute l’aide en faveur de l’être humain afin qu’il se relève. Le soin apporté au culte est d’importance fondamentale, tout comme la catéchèse des enfants et de leurs familles qui peuvent ainsi se sentir accueillies dans une unique famille dans le Christ.
Allons, mes frères! Achevons le chemin des apôtres qui sont allés évangéliser le monde sans rien posséder, mais emplis de foi dans l’œuvre de l’Esprit Saint. Allons porter le message vivant de Jésus dans tous ces pays qui vivent dans le besoin et dans la pauvreté, mais qui sont spirituellement riches avec la grâce de Jésus.
Réunissons-nous tous en prière en vue de l’accomplissement de l’œuvre de Dieu dans le service à ces pays, forts de la patience et de l’espérance que demain sera meilleur qu’aujourd’hui et que le monde entende la voix de ceux qui souffrent afin que la Divine Providence leur tende la main.
Allons! Laissons de côté les nombreuses difficultés et regardons ce qui est plus important, à savoir la construction du royaume de Dieu sur ce continent; apporter la Parole de Dieu à chacun, tel est notre but.
Mon vœu est que ce Saint Synode parvienne à un bon résultat et qu’il puisse avoir un grand écho dans le monde de manière à ce que les travaux qu’il aura produits puissent se réaliser.
AUDITION DES AUDITEURS
Enfin, sont intervenus les Auditeurs et Auditrices suivants:
– M. Laurien NTEZIMANA, Licenciée en Théologie, Diocèse de Butare (RWANDA)<
br>– Fr. Armand GARIN, Petit Frère de Jésus (Francie), Responsable régional des Petits Frères de Jésus pour l’Afrique du Nord (Algérie et Maroc), Annaba (ALGÉRIE)
– Prof. Raymond RANJEVA, Ancien Vice-Président de la Cour Internationale de Justice (Pays-Bas), Membre du Conseil Pontifical Justice et Paix (Cité du Vaticain) (MADAGASCAR)
– Mme. Elena GIACCHI, Gynécologue du Centre d’Etudes et de Recherches pour la Régulation Naturelle de la Fertilité, Université Catholique du Sacré Coeur; Presidente de W.O.O.M.B.-Italia [Coordination Nationale pour le méthode de l’Ovulation Billings-Italia] (ITALIE)
Nous publions, ci-dessous, les résumés des interventions des Auditeurs et Auditrices:
– M. Laurien NTEZIMANA, Licenciée en Théologie, Diocèse de Butare (RWANDA)
Je raconte ici brièvement mon aventure de théologien laïc en quête d’une spiritualité qui fasse justice à l' »indoles saecularis », cette « marque de la sécularité » qui fait du laïc un enfant de l’Église vivant au cœur du monde pour le transformer du dedans comme ferment, sel, souffle et lumière.
En 1990, à la fin de mes études de troisième cycle en théologie à la Katholieke Universiteit te Leuven, j’ai écrit un livre publié 8 ans après par les éditions Karthala sous le titre de « Libres paroles d’un théologien rwandais: joyeux propos de bonne puissance ». La bonne puissance dont je parle dans ce livre, c’est celle du Christ, les autres étant de fausses puissances, c’est-à-dire des leurres qui égarent les malheureux qui s’y fient. La bonne puissance est un trinôme dont le premier aspect est assurance ou non-peur, le second force de vivre ou non-résignation et le troisième accueil absolu d’autrui ou non-exclusion. Ce que j’appelle « le principe de bonne puissance » est ainsi une traduction en termes pratiques des vertus théologales.
Entre 1990 et 1994, j’ai utilisé le principe de bonne puissance au sein du Service d’animation théologique confié à ma responsabilité par l’évêque du Diocèse de Butare, Mgr Jean Baptiste Gahamanyi d’heureuse mémoire, pour former les responsables des communautés chrétiennes à la dimension publique de la foi; entre avril et juillet 1994, le principe de bonne puissance m’a permis de résister pour ma part au génocide et d’aider au maximum de mes forces mes frères et sœurs tutsi; entre septembre 1994 et septembre 1999, j’ai usé du principe bonne puissance pour former des animatrices et des animateurs qui ont su porter la bonne nouvelle sur les collines de Butare dans le terrible contexte de l’immédiat après-génocide; le Prix de la Paix de Pax Christi International de 1998 est venu reconnaître la valeur universelle de ce travail; lorsque, en 1999, arriva entre le clergé et moi ce qui est arrivé entre Paul et Barnabé (Actes 15, 39), le principe bonne puissance m’a permis de fonder l’association Modeste et Innocent (www.ami-ubuntu.org) qui, depuis février 2000, malgré la prison et d’autres tribulations, travaille avec succès à la réconciliation des Rwandais. Le « Theodor Haecker Preis für Politischen Mut und Aufrichtigkeit » de la ville allemande d’Esslingen am Neckar est venu reconnaître en février 2003 le bien fondé d’un tel engagement.
– Fr. Armand GARIN, Petit Frère de Jésus (Francie), Responsable régional des Petits Frères de Jésus pour l’Afrique du Nord (Algérie et Maroc), Annaba (ALGÉRIE)
Dans les pays du Maghreb à quasi totalité musulmane, à l’exemple de Jésus de Nazareth et à la suite de Charles de Foucauld, en fidélité à l’évangile, des chrétien(ne)s s’efforcent de vivre en frères avec leurs voisins et amis musulmans. Il croient qu’i1 est possible de vivre une authentique vie de partage, d’écoute, d’accueil et de service en se faisant proches des musulmans, surtout des petits et des pauvres. Cela suppose de connaître l’autre comme de l’intérieur dans ses traditions culturelles et religieuses. L’étranger, sans le savoir, nous amène à approfondir notre foi et à vivre l’ évangile de manière plus vraie, plus radicale. Les paraboles ou les exemples de la vie de Jésus nous apparaissent sous un jour nouveau. Et peut naître alors avec les amis musulmans, croyants au Dieu unique, une véritable solidarité spirituelle, à travers des gestes qui ont parfois saveur d’éternité et sont le signe d’une véritable communion.
Cela est possible parce que chrétiens et musulmans, nous croyons fortement en la fraternité adamique (nous sommes tous créatures de Dieu) et en la fraternité abrahamique. Mais, depuis la venue de Jésus, pour nous la fraternité entre tous les hommes prend sa source dans notre foi en Jésus mort et ressuscité pour que tous aient la vie. Nous croyons que Jésus est mystérieusement présent dans nos rencontres.
– Prof. Raymond RANJEVA, Ancien Vice-Président de la Cour Internationale de Justice (Pays-Bas), Membre du Conseil Pontifical Justice et Paix (Cité du Vatican) (MADAGASCAR)
Aspects de la Vérité
– vérité des faits – prévention contre les révélations malveillantes, une réalité matériel1e et sensible
– Vérité des engagements – pacta sunt servanda
– Vérité dans l’ exercice des responsabilités – témoignage actif
Vérité et ses fonctions dans la réconciliation
– refus de l’instrumentalisation au profit de la haine et de la manipulation cf. Justice politique
– connaissance et mesure des situations d’injustice et de rupture de la paix
– mise en oeuvre : de la correction et cessation de la situation d’injustice; de l’ éradication des causes créatrices de fausse justice en fausses vérités
Caractère insuffisant d’une approche purement humaine de la Vérité :
– absence de garantie vis-à-vis du relativisme: rapport de force, calcul, ruse- prise en compte nécessaire des considérations religieuses de la foi: écarter le placage du fait religieux; interpellation permanente sur la base de la Parole de Dieu
Doctrine sociale de l’Eglise
– cadre intel1ectuel et doctrinal de l’analyse des aspects de la réconciliation, justice et paix: au triple plan éthique, normatif, institutionnel; dans le cadre de la modification des mentalités et des structures
– affaire de toute l’Eglise – interaction permanente horizontale et verticale.
– Mme. Elena GIACCHI, Gynécologue du Centre d’Etudes et de Recherches pour la Régulation Naturelle de la Fertilité, Université Catholique du Sacré Coeur; Presidente de W.O.O.M.B.-Italia [Coordination Nationale pour le méthode de l’Ovulation Billings-Italia] (ITALIE)
La diffusion et l’enseignement de la Méthode de l’Ovulation BillingsTM (MOB) partout dans le monde, ont toujours été joints à la proposition d’un mode de vie qui favorise l’amour conjuga1, l’unité de la famille, le respect de la femme, et une ouverture généreuse à l’acceptation d’une vie nouvelle. Parce qu’elle est simple et efficace la MOB peut être utilisée par tous les couples dans des contextes différents, sans distinction de culture, de religion ou de statut social; la méthode est bien acceptée non seulement par les catholiques, mais aussi par les musu1mans, les hindous, et des personnes d’autres croyances. Le couple peut maîtriser sa fécondité de manière naturelle, que son désir soit de favoriser ou de différer une grossesse, dans toutes les situations de la vie fertile de la femme y compris si les cycles sont irrégu1iers, pendant l’allaitement au sein, à l’approche de la ménopause. Partout où la MOB est enseignée, elle contribue à : 1) promouvoir la famille et la procréation responsable au regard de la vie, de l’amour conjugal et de la fidélité; 2) promouvoir la dignité de la femme; 3) éviter l’avortement; 4) éviter d’avoir recours aux technologies de Procréation Médicalement Assistée, donnant la possibilité aux couples sub-fertiles de réaliser une grossesse de manière naturelle, en accord avec leurs valeurs éthiqu
es; 5) éviter la diffusion des MST (maladies sexuellement transmissibles) par une éducation à une sexualité responsable auprès des jeunes et des adolescents qui intègre les dimensions spirituelles, physiques et psychologiques. L’enseignement de la MOB contribue à promouvoir et à diffuser les valeurs humaines et chrétiennes en vue de l’évangélisation et du développement pastoral.
[Texte original: italien]
Intervention de l’invité spécial M. Rodolphe Adada, représentant spécial conjoint du secrétaire général des Nations unies et du président de la commission de l’union africaine au Darfour (Soudan)
Introduction
C’est un immense honneur pour moi de pouvoir m’adresser, en présence de Votre Sainteté, à cet aréopage de Princes de l’Église, rassemblés dans cette enceinte sacrée.
Comme vous le savez, je ne suis plus en charge de la MINUAD et les vues que j’exprime n’engagent, maintenant, que moi. Le débat sur le Darfour est devenu si polarisé qu’il est difficile de maintenir une position objective. Cela est d’autant plus regrettable que seule une approche neutre peut garantir des solutions durables.
Devant Votre Sainteté, je voudrais porter un témoignage le moins partial possible. Je sais pouvoir parler en toute sérénité car l’Église est une force de paix et que la paix exige la vérité.
Fin 2005, le Congo est élu comme membre non permanent du Conseil de sécurité des Nations unies pour la période 2006-2007 et en janvier 2006, le Président Denis Sassou-Nguesso est élu Président en exercice de l’Union africaine. Ces deux décisions ont fait du Ministre des Affaires étrangères du Congo que j’étais alors, un observateur privilégié des grands problèmes qui secouaient l’Afrique, au premier rang desquels se trouvait la crise du Darfour.
J’ai ainsi pu suivre l’évolution de ce dossier de plus près. Lorsque le Secrétaire général des Nations unies, Monsieur BAN Ki-Moon et le Président de la Commission de l’Union africaine Monsieur Alpha Oumar Konaré ont porté leur choix sur ma personne pour diriger la première Mission hybride Nations unies/Union africaine et que le Président Denis Sassou-Nguesso a donné son accord, je me suis considéré comme honoré d’une triple confiance. Il m’appartenait de la mériter.
Le conflit
Il est généralement admis que le conflit du Darfour a éclaté en février 2003 lorsqu’un groupe rebelle, la « Sudan Liberation Army » – SLA – conduit par Abdulwahid Mohammed Al Nur attaque Gulu, le chef-lieu du Jebel Marra. Plus tard, en avril, ce groupe attaque l’aéroport d’EI Fasher, capitale du Darfour. Un deuxième groupe connu sous le nom de « Justice and Equality Movement » – JEM – dirigé par Khalil lbrahim est créé par la suite.
La réponse du Gouvernement soudanais prend alors la forme de ce que d’aucuns ont qualifié de « contre-insurrection au rabais », d’une extrême violence, exploitant les rivalités ethno-sociologiques, avec l’emploi des ce « Janjaweeds » à l’infâme réputation.
Les conséquences sont épouvantables: des centaines de milliers de morts, des millions de personnes déplacées (IDP et réfugiés), d’innombrables violations des Droits de l’homme. Une crise humanitaire sans précédent.
Survenant moins de 10 ans après le génocide au Rwanda, la crise du Darfour a tout de suite posé la question du « génocide ». Vous connaissez la controverse sur ce point sensible.
Tel pourrait être un résumé rapide de la situation.
Pourtant, une analyse plus profonde montrerait que le conflit du Darfour plonge ses racines dans l’histoire du Soudan. L’histoire, la marginalisation des régions périphériques et leur sous-développement, la dégradation de l’écosystème sont à prendre en compte. C’est une « crise du Soudan au Darfour ». Cette crise est aussi liée à l’histoire du Tchad voisin. Par exemple, le FROLINAT créé dans les années 60 pour combattre le Président François Tombalbaye du Tchad a été fondé à Nyala, au Darfour, et ce n’est pas un hasard si le premier médiateur dans ce conflit a été le Président Tchadien, Idriss Deby. Le long conflit du Tchad a aussi contribué au flux d’armes légères au Darfour.
Il a été dit que « le Darfour des années 1990 manquait d’eau, mais était en revanche inondé de fusils ».
Bien avant 2003, la crise actuelle commence en réalité par une guerre civile entre les Fours et les Arabes, dans laquelle chaque camp accusait l’autre de tentative de génocide.
Voici deux citations:
1. « La sale guerre qui nous a été imposée a commencé comme une guerre économique mais a très vite pris un caractère génocidaire ayant pour but de nous chasser de notre terre ancestrale (…). Le but en est un holocauste total et (…) l’annihilation complète du peuple Four et de tout ce qui est Four ».
2. « Notre tribu arabe et les Fours ont coexisté pacifiquement durant toute l’Histoire connue du Darfour. Mais la situation a été déstabilisée vers la fin des années 70 lorsque les Fours ont lancé le slogan « le Darfour aux Fours » …. Les Arabes étaient dépeints comme étrangers qui devaient être expulsés du Darfour …. Ce sont les Fours qui, dans leur quête d’expansion de la prétendue « ceinture africaine » veulent chasser tous les Arabes de cette terre ».
Ces paroles pleines de haine ont été prononcées à la Conférence de Réconciliation tenue à El Fasher, du 29 mai au 8 juillet 1989.
Pour autant, cette dimension ethnique n’est que la partie émergée de l’iceberg. Ce conflit est bien plus complexe que la description manichéenne qui est communément répandue.
Le réponse de la Communauté internationale
En dehors des organisations humanitaires qui continuent de faire un travail admirable au service du peuple soudanais du Darfour, l’Union africaine fut la première à réagir. En avril 2004, elle organise les pourparlers qui aboutissent à la signature de l’Accord de cessez-le-feu humanitaire de N’Djamena entre le gouvernement du Soudan et les deux mouvements rebelles, à savoir, le SLA d’Abdulwahid EI Nur et le JEM de Khalil Ibrahim. C’est cet accord qui permettra l’établissement de la MUAS, (Mission de l’Union africaine au Soudan), avec l’appui de nombreux donateurs dont il est juste de citer au moins l’Union européenne, les États-unis d’Amérique et le Canada.
La MUAS a commencé avec 60 observateurs et une force de protection de 300 soldats qui fut par la suite portée, à 7.000 hommes. C’était la première Mission de maintien de la paix organisée par l’Union africaine et ce n’était pas la plus facile.
La MUAS a été l’objet de nombreuses critiques de la part des médias occidentaux. Ces critiques sont injustifiées et injustes.
Le travail abattu par cette mission a été énorme et mérite tous les éloges. Dans des conditions que personne d’autre ne voulait assumer, ces Africains ont assuré avec abnégation et dévouement, la présence de la Communauté internationale au Darfour.
Ils ont porté témoignage de la compassion humaine. Ils ont posé les bases de ce qui est aujourd’hui la MINUAD. Soixante et un (61) d’entre eux ont fait le sacrifice suprême.
Nous leur devons le respect.
De la MUAS à la MINUAD
Dès la fin de 2005, il est apparu difficile pour l’Union africaine, devant la complexité des problèmes de toute nature posés par la gestion de la MUAS, de continuer à assumer cette responsabilité. L’Union africaine prend alors la décision de transférer le fardeau à 1’Onu dont c’est la mission. Le gouvernement du Soudan s’oppose fermement à cette décision. Toute l’année 2006 se passe à convaincre le gouvernement soudanais de la nécessité de ce transfert de responsabilité.
Ce n’est que le 16 novembre 2006 que le Secrétaire général de l’Onu, Monsieur Kofi ANNAN, alors sur le départ, fait la proposition d’une Mission hybride. Le gouvernement soudanais accepte alors et c’est l’acte de naissance de la MINUAD, la Mission des Nations unies et de l’Union africaine au Darfour.
La MINUAD a été formellement créée
par la Résolution 1769 du Conseil de sécurité des Nations unies, sur le Rapport conjoint du Secrétaire général des Nations unies et du Président de la Commission de l’Union africaine. Elle est prévue pour comprendre 20.000 militaires, 6.000 policiers et autant de civils, devenant ainsi la plus grande force de maintien de la paix au monde. Elle devait être dotée de tous les équipements nécessaires à l’accomplissement de son mandat sous le chapitre 7 de la Charte des Nations unies. Et de fait, elle devait être précédée de deux « modules de soutien » (« light support package » et « heavy support package ») à la MUAS pour la renforcer avant le transfert d’autorité.
La MINUAD a pour mandat:
– de contribuer au rétablissement des conditions de sécurité nécessaires à l’apport de l’aide humanitaire,
– d’assurer la protection de la population civile,
– de suivre et vérifier l’application des divers accords de cessez-le feu et
– de contribuer à la mise en oeuvre de l’Accord de paix d’Abuja et de tout accord ultérieur.
Le déploiement de la MINUAD a constitué un grand défi. Il s’agit de la plus grande mission au monde dans la région la plus enclavée du plus grand pays d’Afrique. E n Afrique, le point le plus éloigné de la mer se trouve au Darfour. Les infrastructures de transport sont inexistantes. La MINUAD succède à la MUAS qui n’a pas pu bénéficier des « modules de soutien » promis. Tout cela a constitué une série d’obstacles qu’i1 a fallu surmonter.
La réticence, sinon la résistance du gouvernement soudanais à la présence d’une mission des Nations unies au Darfour a été également un problème à gérer. Les conditions du débat international sur le Darfour avaient stigmatisé le gouvernement du Soudan qui, de son côté, ne voyait dans la « communauté internationale » qu’une force dont le but était le renversement du régime. Mais, avec l’aide de l’Union africaine, il a été possible de diminuer la suspicion envers la MINUAD. Il a fallu pour cela, travailler étroitement avec le gouvernement. Je crois qu’aujourd’hui, le gouvernement soudanais est convaincu que la MINUAD est une force de paix et non l’avant-garde d’une force d’invasion. Une Commission tripartite (ONU-UA et gouvernement du Soudan) a été mise en place pour résoudre tout problème concernant le déploiement de la MINUAD.
Cet engagement de ma part auprès du gouvernement soudanais n’a pas toujours été bien vu ni compris.
La plupart des missions de maintien de la paix sont déployées dans des « états en faillite », où le gouvernement est soit inexistant, soit impuissant (Bosnie, Kosovo, Timor,etc…). Dans ces cas-là, la Mission de l’Onu devient un véritable gouvernement et le Représentant spécial, quasiment le chef du gouvernement. Ce n’est pas le cas au Soudan. Les Nations unies doivent sur ce point effectuer une véritable « révolution culturelle ».
Aujourd’hui, on peut considérer que l’essentiel des troupes sera sur le terrain vers la fin de l’année. Il faut cependant noter que certains moyens techniques promis depuis les » modules de soutien » n’ont toujours pas été fournis et en particulier les hélicoptères militaires qui permettraient une mobilité accrue dans un territoire de la taille de la France. C’est l’une des inconséquences des décisions de la « communauté internationale ».
La MINUAD a également eu à faire face à la méfiance voir à l’hostilité des déplacés. Faire accepter la MINUAD aux déplacés et aux mouvements armés a été plus difficile. Beaucoup d’entre eux rejetaient son « caractère africain ».
D’autre part, leur hostilité à l’Accord d’Abuja dont la MINUAD devait assurer la mise en oeuvre compliquait encore plus la situation. Mais notre action sur le terrain, et surtout lors de la crise du camp de Kalma où une « opération de police » a conduit à la mort de 38 déplacés, l’expulsion de treize Ong internationales et les combats de Muhajeriya et Umm Baru entre le JEM et les forces gouvernementales. La MINUAD a porté assistance aux blessés des deux camps, tout en protégeant les milliers de civils qui avaient trouvé refuge auprès d’elle, notre action sur le terrain disais-je, a pu convaincre les déplacés de l’impartialité de la MINUAD dans la mise en oeuvre de son mandat. Ils l’ont déclaré dans une lettre émouvante que nous avons considérée comme une véritable décoration.
Aujourd’hui, la MINUAD est partout présente au Darfour. Toutes les composantes de la mission, les militaires, la police, les civils (affaires politiques, affaires civiles, droits de l’homme et du DDDC – « Darfur-Darfur Dialogue and Consultations »), maintiennent des rapports réguliers avec toutes les parties et la société civile, ainsi que la population en général. Ils observent la situation au jour le jour et peuvent en rendre fidèlement compte. Ils participent avec succès à la résolution des querelles locales.
La situation actuelle au Darfour
Durant les 26 mois que je viens de passer au Darfour à la tête de la MINUAD, j’ai pu observer une amélioration progressive de la situation de sécurité au Darfour, et ce malgré la persistance de deux risques majeurs: la poursuite des opérations militaires entre le JEM et les forces gouvernementales d’une part, et la dégradation des relations entre le Tchad et le Soudan d’autre part. À cela, il convient d’ajouter les affrontements inter-tribaux et la montée du banditisme, causé pour l’essentiel par l’effondrement de la loi et de l’ordre.
La criminalité et le banditisme sont aujourd’hui le souci principal en matière de sécurité. Nous observons en plus une nouvelle tendance à l’enlèvement de personnes pour des rançons. La stratégie de la MINUAD pour la protection des civils vise à s’attaquer à toutes ces causes de danger pour les civils innocents. Il s’agit pour la MINUAD de renforcer sa présence dans les camps de déplacés (elle est désormais présente 24 heures sur 24 dans 15 camps) et de multiplier le nombre de patrouilles policières et militaires dans les villes et les villages.
Mais, cela dit, la situation a radicalement changé depuis la période intense de 2003-2004 quand des dizaines de milliers de personnes étaient tuées. Aujourd’hui, en termes purement numériques, nous pouvons dire que le conflit du Darfour est un conflit de basse intensité. Je ne voudrais pas insister sur cette comptabilité macabre qui passionne les médias; un mort est un mort de trop et les chiffres que j’avais cités au Conseil de sécurité ne l’avaient été que pour soutenir l’analyse.
Cela ne veut en aucun cas dire que le conflit du Darfour est réglé! En effet, le conflit se poursuit au Darfour. Les civils continuent de courir des risques inacceptables. Des millions de personnes sont encore dans les camps de déplacés ou sont des réfugiés. Du fait de l’insécurité, elles ne peuvent rentrer chez elles et reprendre une vie normale. Aucune solution n’a encore été portée aux graves injustices et crimes commis, en particulier au plus fort des hostilités en 2003-2004.
Les progrès que nous observons sur le terrain doivent être consolidés par un accord de paix qui doit être inclusif. Il devrait comprendre non seulement les mouvements armés, mais aussi l’ensemble des composantes de la société du Darfour, y compris la société civile, les déplacés, les réfugiés, sans oublier les Arabes qui sont trop souvent assimilés aux « Janjaweeds ». En effet, seul un accord politique accepté et partagé par tous est à même de ramener une paix durable au Darfour.
En réalité, c’est ce qui manque le plus à la MINUAD aujourd’hui : un accord de paix. En effet, cette mission de maintien de la paix n’a pas de paix à maintenir.
Il n’y a pas de solution militaire au problème du Darfour, cela n’est tout simplement pas possible. Personne n’a les moyens de gagner militairement. La seule option est donc un accord politique et cet accord doit prendre en compte tous les aspects du problème: locaux, régionaux, politiques, socio-économiques, sans oublier la grave question humanitaire.
Les
différentes tentatives de négociation depuis 2003 n’ont pas réussi à trouver une solution. L’accord d’Abuja, signé le 5 mai 2006, n’a pas été inclusif et a été rejeté par une grande partie des Darfouriens. L’actuelle Médiation UA-Onu doit en tenir compte et rechercher la participation de tous.
Les deux prochaines années seront cruciales pour le Soudan. Des élections générales sont prévues en avril 2010 et en 2011, il y aura le referendum d’autodétermination du Sud-Soudan. Il est nécessaire que le Darfour participe à des élections justes et transparentes et pour que l’exercice d’autodétermination du Sud se déroule dans de bonnes conditions, il faudrait que le problème du Darfour soit résolu. C’est peu de dire que le temps presse.
Paix, Justice et Réconciliation
De terribles violations des droits de l’homme ont été commises au Darfour, particulièrement en 2003-2004.Ces problèmes n’ont pas été traités. La Paix et la Justice sont les deux faces d’une même médaille. La question n’est pas de savoir si la Justice doit passer, mais comment.
Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a demandé et obtenu la délivrance d’un mandat d’arrêt contre le Président du Soudan.
La MINUAD a toujours insisté sur le fait que cette question était en dehors de son mandat et n’a jamais commenté cette décision de justice. Mais cette question domine le débat et tout le processus de traitement du problème du Darfour. L’Union africaine, tout en précisant qu’elle ne tolère en aucun cas l’impunité, a demandé que ce mandat d’arrêt soit différé pour donner plus de chances à la paix, mais le Conseil de sécurité des Nations Unies n’est pas parvenu à un accord sur l’application de l’article 16 du Statut de Rome. Cela a conduit l’Union africaine à demander à ses membres de ne pas exécuter le mandat d’arrêt.
M’exprimant à titre strictement personnel, je considère que nous sommes aujourd’hui dans une impasse. L’exécution d’un mandat d’arrêt contre un chef d’état en exercice n’est pas chose aisée, de même on peut comprendre la réticence à négocier, exprimée par certains mouvements armés. « Pourquoi négocier avec un criminel en instance d’être arrêté? ».
L’Union africaine a mis en place une Commission de Haut Niveau (« AU High-Level Panel on Darfur »), présidée par le Président Thabo Mbeki (ancien président de l’Afrique du Sud) et comprenant entre autres les présidents Abdusalami Aboubakar (ancien président du Nigéria) et Pierre Buyoya (ancien président du Burundi), pour étudier cette question de la Paix, de la Justice et de la Réconciliation et faire des recommandations. La Commission est composée d’éminents spécialistes et connaisseurs des problèmes du Darfour, du Soudan et de la Justice. J’ai été entendu par cette Commission comme plus de 3.000 autres personnes. La MINUAD et plus particulièrement sa composante DDDC (« Darfur-Darfur-Dialogue and Consultations »), a accordé tout son soutien à cette Commission.
La Commission a dû présenter son rapport hier 8 octobre. Ce rapport devrait comprendre des voies pour sortir de l’impasse. La communauté internationale devrait considérer ce rapport avec objectivité et esprit constructif. L’Église, force de Paix, autorité morale majeure, pourrait s’intéresser au travail de cette Commission. Peut-être pourrait-on y trouver une voie de sortie de cette impasse.
Conclusion
La MINUAD, est un formidable instrument de Paix, unique en son genre en ce qu’elle est née de la volonté des deux Organisations, Union Africaine et Nations unies. Il appartient à la « communauté internationale » de bien l’employer. Il fut un temps où l’hybridité était synonyme de bâtardise et de tare, mais aujourd’hui, quand on parle de voiture hybride, on est à la pointe du progrès.
La MINUAD représente la communauté internationale dans son ensemble et non tel ou tel pays membre.
Il faut donc renforcer la MINUAD, lui donner tous les moyens dont elle a besoin, et surtout cet accord de Paix. Les hommes et les femmes qui servent la communauté internationale sur ce front ne cessent de montrer leur dévouement et leur abnégation.
Le plus important est que la coopération entre les promoteurs de la MINUAD, l’Union africaine et les Nations unies, reste sincère. Le caractère hybride de la MINUAD, qui a été le véritable visa d’entrée des Nations unies au Darfour, ne doit pas apparaître comme une simple ruse, comme un « cheval de Troie ». L’Union africaine ne doit pas être un simple « sleeping partner » , mais doit jouer tout son rôle. Autrement, c’est l’échec assuré.
Le Soudan est le plus grand pays d’Afrique. Il est à la charnière de deux mondes, l’Afrique et le Monde arabe; il a des frontières avec neuf (9) pays africains. Depuis son indépendance, le 1er janvier 1956, on peut dire qu’i1 n’a que sporadiquement connu la paix.
L’Accord global de paix (CPA), qui a mis fin à plus de 20 ans de guerre civile entre le Nord et le Sud a suscité tous les espoirs. Pour la première fois, un Soudan démocratique était entrevu.
Au moment où la violence semble diminuer au Darfour, il est inquiétant de noter que c’est maintenant dans le Sud que les tueries reprennent, la Paix serait-elle le « rocher de Sisyphe » qui, pour le plus grand malheur des Soudanais, retombe dès qu’on croit atteindre le sommet de la montagne?
Le Soudan est un. Il faut que la communauté internationale pense « Soudan » et non plus « Darfour et Sud « . Dans cette vision holistique, l’Église a un rôle majeur à jouer dans un Soudan pluriel, entre le Sud chrétien et animiste et le Nord musulman, dont le Darfour.
C’était le rêve d’un grand Soudanais, John GARANG, le rêve d’un nouveau Soudan, en paix, dans une Afrique en paix.
[Texte original: français]