ROME, Jeudi 19 juin 2008 (ZENIT.org) – A l’occasion du congrès eucharistique de Québec, Monseigneur Piero Marini, président du comité pour les congrès eucharistiques internationaux, est revenu pour Radio Vatican sur les enjeux des congrès eucharistiques et sur la place de l’eucharistie dans la vie de l’Eglise. Nous publions ci-dessous le texte de cet entretien.
Q – Comment les congrès eucharistiques présentent-ils la célébration de l’eucharistie ?
Mgr Marini – Avant le concile Vatican II, les congrès eucharistiques sont nés dans une autre perspective que celle d’aujourd’hui. C’était seulement et surtout pour souligner la présence réelle et pour une part l’adoration. Le deuxième aspect important des congrès avant Vatican II, c’était les manifestations extérieures, principalement la grande procession. On concevait l’Eglise comme une société efficace, apte à se confronter avec l’autre société qu’était l’Etat. Et alors il y avait de grandes manifestations de masses surtout pour l’eucharistie et pour la présence réelle. Maintenant, avec Vatican II, on a découvert surtout l’aspect de la célébration. C’est-à-dire que l’Eglise a découvert son visage dans la célébration. Dans la célébration il y a différents offices, des ministères, et en pratique, c’est l’Eglise qui se manifeste dans la relation avec les autres membres de la communauté ; dans l’eucharistie il y a la communion avec Dieu mais aussi avec les frères. Avec Vatican II, il est clair que les congrès eucharistiques ont pour but principal, selon moi, d’améliorer la célébration.
Q – Justement, comment faire pour améliorer la qualité de la célébration eucharistique ?
Mgr Marini – Il est vrai que c’est un problème. Dans les congrès eucharistiques internationaux, pour les chants par exemple, il faut utiliser les chants en latin, les chants communs qui sont connus partout, il faut utiliser une variété de langues. Mais il faut également habituer ceux qui participent aux congrès à ne pas seulement célébrer la messe. Si on célèbre seulement la messe alors cela va en faire baisser la qualité ; la messe a besoin des autres aspects de la liturgie, par exemple la liturgie des heures. Pour mieux apprécier la célébration liturgique de l’eucharistie, il faut avoir une autre préparation. Après on pourra même célébrer les autres sacrements comme la pénitence. Mais pour avoir de bonnes célébrations liturgiques, ce n’est pas par la multiplication des messes qu’on atteindra une plus grande qualité de la célébration.
Q – Quel est le lien entre la célébration eucharistique telle qu’elle est vécue et l’envoi à la fin de la messe ? Est ce qu’il est possible de dire que les deux composantes, la célébration et la mission, sont présentes dans les congrès eucharistiques ?
Mgr Marini – C’est un des points à développer pour le futur des congrès eucharistiques. Parfois quand le congrès eucharistique est terminé, on se dit que tout s’est bien passé, que tout est fini, mais ce n’est pas vrai. Il y avait un expert en liturgie qui me disait « je ne dis jamais la messe est finie, allez dans la paix, parce que la messe commence quand nous retournons dans la vie ». C’est alors qu’il faut commencer le témoignage. Si on a vraiment rencontré Dieu et ses frères dans l’eucharistie, alors on doit après, en dehors, avoir la capacité de reconnaître le visage du Christ dans le frère que nous rencontrons dans la vie, parce qu’on sait et on croit à la présence du Christ après la résurrection. On le rencontre sur la route d’Emmaüs, on le rencontre au bord de la mer, comme quelqu’un qui est là. Et c’est l’eucharistie qui nous donne la capacité d’ouvrir les yeux sur le monde, sur la réalité quotidienne.
A l’avenir il ne faudra pas seulement dédier du temps pour la préparation du congrès, mais selon moi il faudra aussi vérifier certaines choses après le congrès. On doit penser à un temps après le congrès pour évaluer ce que nous a apporté le congrès, quelles sont les choses à faire avancer ? Le congrès doit penser à l’avenir parce que notre espérance nous fait penser à l’avenir. Nos racines sont dans le passé et sans elles on ne peut pas avancer, mais notre salut est devant nous et c’est le Seigneur qui nous attend pour une autre célébration, pour nous donner son corps, pour nous donner une force, mais toujours pour avancer. Selon moi, l’après-congrès, c’est très important.
Q – L’adoration eucharistique a été développée au moyen-âge, face à certaines dérives. Est ce que le fait de recentrer, aujourd’hui, une pratique de prière sur l’adoration eucharistique est une forme de protection ou plutôt de redécouverte du sens même de l’eucharistie ?
Mgr Marini – Le problème n’est pas seulement l’adoration après la messe. Le problème, c’est l’adoration pendant la messe, parce que la messe est le premier acte d’adoration. L’adoration après la messe, c’est toujours en pensant à la messe, à la célébration. C’est de la célébration que vient la présence du Christ. Il faut beaucoup insister et mettre en pratique ce que nous disons dans le Gloria « nous te louons, nous te bénissons, nous t’adorons », car ce sont les mots de notre célébration eucharistique, de toute la célébration eucharistique. Et même, il faut réfléchir sur l’adoration en dehors de la messe. C’est l’adoration de la présence réelle. Et réelle signifie vivante. La présence du Christ doit toujours nous faire penser à la célébration eucharistique, c’est-à-dire ce n’est pas seulement le Christ qui devient présent mais c’est aussi l’Eglise qui est en présence du Christ. Alors quand nous adorons le Christ, d’une certaine manière, nous représentons la communauté ecclésiale dans laquelle le Christ s’est rendu présent. Alors il faut trouver un peu d’équilibre entre les deux aspects : insister sur l’adoration de la présence réelle c’est bien, mais aujourd’hui c’est encore plus important de célébrer la messe avec l’attitude d’adoration, parce que c’est le grand temps d’adoration que nous avons.
Q – Monseigneur Marini, vous venez de prendre la tête du comité pour les congrès eucharistique internationaux, pouvez vous nous dire à quoi sert ce comité et quelles sont vos perspectives pour son futur ?
Mgr Marini – Le comité organise le congrès eucharistique international. Il y a des délégués de chaque nation, et on fait une réunion avec tous les délégués tous les deux ans pour réfléchir à ce qu’on a fait et pour préparer le congrès qui vient. Dans le futur je pense que le comité devra s’occuper également des congrès nationaux, pour favoriser la célébration des congrès et faire une coordination entre les conférences épiscopale. Il peut se mettre à disposition pour aider les conférences épiscopales qui n’ont pas de grands moyens ou de grandes possibilités, pour voir, pour donner des renseignements, pour prendre des matériaux d’archives, pour les conserver. Et cela devrait être la perspective pour le futur, parce qu’il y a des gens dans l’Eglise, des conférences épiscopales, qui célèbrent régulièrement un congrès national.
Vous pouvez retrouver cette interview sur le site de Radio Vatican : www.radiovaticana.org
Propos recueillis par Stéphane Lemessin