Irak : L’exemple de Mgr Rahho pour la coexistence pacifique

Homélie prononcée par Benoît XVI le 17 mars

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ROME, Mardi 1er avril 2008 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le texte intégral de l’homélie que le pape Benoît XVI a prononcé au cours de la messe qu’il a célébrée le 17 mars au Vatican pour Mgr Paulos Faraj Rahho, décédé à la suite de son enlèvement à Mossoul, en Irak, le 29 février dernier (cf. Zenit du 17 mars).

Vénérés et chers frères,

Nous sommes entrés dans la Semaine Sainte en portant dans nos coeurs la grande douleur de la mort tragique du très cher Mgr Paulos Faraj Rahho, Archevêque de Mossoul des Chaldéens. J’ai voulu célébrer cette Messe à son intention, et je vous remercie d’avoir accepté mon invitation à prier ensemble pour lui. Je sens qu’en cet instant, sont proches de nous le Patriarche de Babylone des Chaldéens, le Cardinal Emmanuel III Delly, et les Evêques de cette Eglise bien-aimée qui souffre, croit et prie en Irak. J’adresse à ces vénérés frères dans l’épiscopat, à leurs prêtres, aux religieux et à tous les fidèles une parole particulière de salut et d’encouragement, assuré qu’ils sauront trouver dans la foi la force pour ne pas perdre courage dans la situation difficile qu’ils vivent actuellement.

Le contexte liturgique dans lequel nous nous trouvons est des plus éloquents: ce sont les jours au cours desquels nous revivons les derniers moments de la vie terrestre de Jésus: des heures dramatiques, pleines d’amour et de crainte, particulièrement dans l’âme de ses disciples. Des heures au cours desquelles l’opposition entre la vérité et le mensonge, entre la douceur d’âme et la droiture du Christ et la violence et la duperie de ses ennemis est réelle. Jésus a connu l’approche de sa mort violente, il a senti le filet de ses persécuteurs se resserrer autour de lui. Il a connu l’épreuve de l’angoisse et de la peur, jusqu’à l’heure cruciale du Gethsémani. Mais il a vécu tout cela plongé dans la communion avec le Père et réconforté par l' »onction » de l’Esprit Saint.

L’Evangile d’aujourd’hui évoque le repas de Béthanie, qui, au regard plein de foi du disciple Jean, révèle des significations profondes. Le geste de Marie, l’onction des pieds de Jésus avec le précieux onguent, devient un acte reconnaissant d’amour extrême en vue de la sépulture du Maître; et le parfum, qui se diffuse dans toute la maison, est le symbole de son immense charité, de la beauté et de la bonté de son sacrifice, qui remplit l’Eglise. Je pense au saint Chrême, dont fut oint le front de Mgr Rahho au moment de son baptême et de sa confirmation; dont furent ointes ses mains au jour de son ordination sacerdotale, enfin son front et ses mains quand il fut consacré Evêque. Mais je pense également à toutes les « onctions » d’affection filiale, d’amitié spirituelle, de dévotion que ses fidèles réservaient à sa personne, et qui l’ont accompagné dans les heures terribles de l’enlèvement et de la prison douloureuse – où il était peut-être déjà blessé -, jusqu’à l’agonie et à la mort. Jusqu’à cette indigne sépulture, où on a retrouvé sa dépouille mortelle. Mais ces onctions, sacramentelles et spirituelles, étaient un gage de résurrection, gage de la vie véritable et pleine que le Seigneur Jésus est venu nous donner!

La lecture du prophète Isaïe nous a placés devant la figure du Serviteur du Seigneur, dans le premier des quatre « Chants », dans lesquels ressortent la douceur et la force de ce mystérieux envoyé de Dieu, qui s’est pleinement réalisé en Jésus Christ. Le Serviteur est présenté comme celui qui « portera le droit », « proclamera le droit », « établira le droit », j’insiste sur ce terme qui doit faire l’objet d’une attention particulière. Le Seigneur l’a appelé « pour la justice » et il réalisera cette mission universelle avec la force non violente de la vérité. Nous voyons dans la Passion du Christ l’accomplissement de cette mission, quand, face à une condamnation injuste, Il rend témoignage à la vérité, en restant fidèle à la loi de l’amour. Sur cette même voie, Mgr Rahho a pris sa croix et a suivi le Seigneur Jésus, et a ainsi contribué à porter le droit dans son pays martyrisé et dans le monde entier, en rendant témoignage à la vérité. Il a été un homme de paix et de dialogue. Je sais qu’il avait une prédilection particulière pour les pauvres et les porteurs de handicap, pour l’assistance physique et psychique desquels il avait créé une association spéciale intitulée Joie et Charité (« Farah wa Mahabba »), à laquelle il avait confié la tâche de valoriser ces personnes et de soutenir leurs familles, et nombre d’entre elles avaient appris de lui à ne pas cacher ces parents et à voir le Christ en eux. Puisse son exemple soutenir tous les Irakiens de bonne volonté, chrétiens et musulmans, à construire une communauté de vie pacifique, fondée sur la fraternité humaine et sur le respect réciproque.

Ces jours-ci, en profonde union avec la communauté chaldéenne en Irak et à l’étranger, nous avons pleuré sa mort, et la manière inhumaine par laquelle a été conclue sa vie terrestre. Mais aujourd’hui, dans cette Eucharistie que nous offrons pour son âme consacrée, nous voulons rendre grâce à Dieu pour tout le bien qu’il a accompli en lui et à travers lui. Nous voulons en même temps espérer que, du ciel, il intercède auprès du Seigneur pour obtenir aux fidèles de cette terre tellement éprouvée le courage de continuer à travailler pour un avenir meilleur. Que les chrétiens de cette terre sachent persévérer dans l’engagement de l’édification d’une société pacifique et solidaire sur la voie du progrès et de la paix, comme le bien-aimé Mgr Paulos se dépensa sans réserve au service de son peuple. Nous confions ces voeux à l’intercession de la Très Sainte Vierge Marie, Mère du Verbe incarné pour le salut des hommes, et donc, pour tous, Mère de l’espérance.

© Librairie Editrice du Vatican

Traduction en français de L’Osservatore Romano

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ZENIT Staff

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