ROME, Vendredi 23 novembre 2007 (ZENIT.org) – Nous publions ci-dessous le commentaire de l’Evangile du Dimanche 25 novembre, proposé par le père Raniero Cantalamessa OFM Cap, prédicateur de la Maison pontificale.
Evangile de Jésus Christ selon saint Luc 23, 35-43
On venait de crucifier Jésus et le peuple restait là à regarder. Les chefs ricanaient en disant : « Il en a sauvé d’autres : qu’il se sauve lui-même, s’il est le Messie de Dieu, l’Élu ! »
Les soldats aussi se moquaient de lui. S’approchant pour lui donner de la boisson vinaigrée,
ils lui disaient : « Si tu es le roi des Juifs, sauve-toi toi-même ! »
Une inscription était placée au-dessus de sa tête : « Celui-ci est le roi des Juifs. »
L’un des malfaiteurs suspendus à la croix l’injuriait : « N’es-tu pas le Messie ? Sauve-toi toi-même, et nous avec ! »
Mais l’autre lui fit de vifs reproches : « Tu n’as donc aucune crainte de Dieu ! Tu es pourtant un condamné, toi aussi ! Et puis, pour nous, c’est juste : après ce que nous avons fait, nous avons ce que nous méritons. Mais lui, il n’a rien fait de mal. »
Et il disait : « Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne. »
Jésus lui répondit : « Amen, je te le déclare : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis. »
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Jésus Christ roi de l’univers et des cœurs
La solennité du Christ Roi a été instituée assez récemment. Elle a été instituée par le pape Pie XI en 1925, en réponse aux régimes politiques athées et totalitaires qui niaient les droits de Dieu et de l’Eglise. Le cadre dans lequel est née cette fête est par exemple celui de la révolution mexicaine, lorsque de nombreux chrétiens marchèrent vers la mort en criant jusqu’au dernier souffle : « Viva Cristo Rey ! », vive le Christ Roi ! Mais si l’institution de cette fête est récente, il n’en est pas de même pour son contenu et son idée centrale qui est en revanche très ancienne et qui est née en quelque sorte avec le christianisme. L’expression « le Christ règne » trouve son équivalent dans la profession de foi : « Jésus est le Seigneur » qui occupe une place centrale dans la prédication des apôtres.
Le passage de l’Evangile est celui de la mort du Christ, car c’est à ce moment-là que le Christ commence à régner sur le monde. La croix est le trône de ce roi. « Une inscription était placée au-dessus de sa tête : ‘Celui-ci est le roi des Juifs’ ». Ce qui, pour ses ennemis devait être la justification de sa condamnation était, aux yeux du Père céleste, la proclamation de sa souveraineté universelle.
Pour comprendre que cette fête nous concerne de près, il suffit de se souvenir d’une distinction très simple. Il existe deux univers, deux mondes ou cosmos : le macrocosme qui est l’univers grand et extérieur à nous et le microcosme, ou petit univers, qui est chaque personne individuelle. La liturgie elle-même, dans la réforme qui a suivi le Concile Vatican II, a senti le besoin de mettre l’accent de la fête, non plus sur son caractère, en quelque sorte, politique, mais sur son aspect humain et spirituel.
L’oraison de la fête ne demande plus, comme dans le passé, d’ « accorder à toutes les familles des peuples de se soumettre à la douce autorité du Christ », mais de faire que « toute créature, libérée de l’esclavage du péché, le serve et le loue éternellement ».
On dit dans l’Evangile qu’au moment de la mort du Christ, au-dessus de sa tête était placée une inscription qui disait : « Celui-ci est le roi des Juifs » ; l’assistance le défiait de manifester ouvertement sa royauté et de nombreuses personnes, également parmi ses amis, s’attendaient à une démonstration spectaculaire de sa royauté. Mais il choisit de démontrer sa royauté en se préoccupant d’un seul homme, de surcroît un malfaiteur : « ‘Jésus, souviens-toi de moi quand tu viendras inaugurer ton Règne’. Jésus lui répondit : ‘Amen, je te le déclare : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le Paradis’ ».
Dans cette perspective, la question la plus importante que nous devons nous poser lors de la fête du Christ Roi n’est pas s’il règne ou non dans le monde, mais s’il règne ou non en chacun de nous ; non pas si sa royauté est reconnue par les Etats et les gouvernements, mais si chacun de nous la reconnaît et la vit. Le Christ est-il le Roi et le Seigneur de ma vie ? Qui règne en moi, qui fixe les objectifs et établit les priorités : le Christ ou quelqu’un d’autre ? Selon saint Paul il existe deux manières de vivre possibles : pour soi ou pour le Seigneur (Rm 14, 7-9). Vivre « pour soi » signifie vivre comme celui qui possède en lui-même son principe et sa fin ; cela indique une existence renfermée sur elle-même, tendue uniquement vers sa propre satisfaction et sa propre gloire, sans aucune perspective d’éternité. Vivre « pour le Seigneur », en revanche, signifie vivre pour le Seigneur, c’est-à-dire dans la perspective du Seigneur, pour sa gloire et pour son règne.
Il s’agit vraiment d’une nouvelle existence, face à laquelle la mort elle-même a perdu son caractère irréparable. La plus grande contradiction dont l’homme ait jamais fait l’expérience – la contradiction entre la vie et la mort – a été dépassée. La contradiction la plus radicale n’est plus désormais entre « vivre » et « mourir », mais entre vivre « pour soi » et vivre « pour le Seigneur ».