Lecture: Ps 137, 1-4.8
1. De tout mon coeur, Seigneur, je te rends grâce :
tu as entendu les paroles de ma bouche.
Je te chante en présence des anges,
2. vers ton temple sacré, je me prosterne.
Je rends grâce à ton nom pour ton amour et ta vérité,
car tu élèves, au-dessus de tout, ton nom et ta parole.
3. Le jour où tu répondis à mon appel,
tu fis grandir en mon âme la force.
4. Tous les rois de la terre te rendent grâce
quand ils entendent les paroles de ta bouche.
5. Ils chantent les chemins du Seigneur :
« Qu’elle est grande, la gloire du Seigneur ! »
6. Si haut que soit le Seigneur, il voit le plus humble ;
de loin, il reconnaît l’orgueilleux.
7. Si je marche au milieu des angoisses, tu me fais vivre,
ta main s’abat sur mes ennemis en colère.
Ta droite me rend vainqueur.
8. Le Seigneur fait tout pour moi !
Seigneur, éternel est ton amour :
n’arrête pas l’oeuvre de tes mains.
© AELF
1. Placé par la tradition juive sous le patronage de David, même s’il est probablement apparu à une époque successive, l’hymne d’action de grâce que nous venons d’entendre s’ouvre par un chant personnel de l’orant. Il élève sa voix dans le cadre de l’assemblée du temple ou, tout au moins, en ayant comme référence le Sanctuaire de Sion, siège de la présence du Seigneur et de sa rencontre avec le peuple des fidèles.
« Je me prosterne vers ton temple sacré » de Jérusalem, confesse en effet le psalmiste (cf. v. 2): là, il chante devant Dieu qui est dans les cieux avec sa cour d’anges, mais qui est également à l’écoute dans l’espace terrestre du temple (cf. v. 1). L’orant est certain que le « nom » du Seigneur, c’est-à-dire sa réalité personnelle vivante et active, et ses vertus de fidélité et de miséricorde, signes de l’alliance avec son peuple, représentent le soutien de toute confiance et de toute espérance (cf. v. 2).
2. Le regard se tourne alors, l’espace d’un instant, vers le passé, au jour de la souffrance: alors, au cri du fidèle angoissé avait répondu la voix divine. Elle avait diffusé le courage dans l’âme troublée (cf. v. 3). L’original en hébreu parle littéralement du Seigneur qui « agite la force dans l’âme » du juste opprimé: comme s’il s’agissait de l’irruption d’un vent impétueux qui balaye les hésitations et les peurs, confère une énergie vitale nouvelle et fait fleurir la force et la confiance.
Après ce début apparemment personnel, le Psalmiste étend alors son regard sur le monde et imagine que son témoignage touche l’horizon tout entier: « tous les rois de la terre », dans une sorte d’adhésion universelle s’associent à l’orant juif dans une louange commune en honneur de la grandeur et de la puissance souveraine du Seigneur (cf. vv. 4-6).
3. Le contenu de cette louange commune qui s’élève de tous les peuples laisse déjà entrevoir la future Eglise des païens, la future Eglise universelle. Ce contenu a comme premier thème la « gloire » et les « chemins du Seigneur » (cf. v. 5), c’est-à-dire ses projets de salut et sa révélation. On découvre ainsi que Dieu est certainement « sublime » et transcendant, mais il « voit le plus humble » avec affection, tandis qu’il éloigne de son regard le superbe en signe de rejet et de jugement (v. 6).
Comme le proclamait Isaïe, « Car ainsi parle celui qui est haut et élevé, dont la demeure est éternelle, et dont le nom est saint. Je suis haut et saint dans ma demeure, mais je suis avec l’homme contrit et humilié, pour ranimer les esprits humiliés, pour ranimer les cœurs contrits » (Is 57, 15). Dieu choisit donc de se ranger en défense des faibles, des victimes, des derniers: cela est porté à la connaissance de tous les rois, afin qu’ils sachent quelle doit être leur option dans le gouvernement des nations. Naturellement, cela est dit non seulement aux rois et à tous les gouvernements, mais à nous tous, car nous aussi, nous devons savoir quel choix faire, quelle est l’option: se ranger du côté des humbles, des derniers, des pauvres et des faibles.
4. Après cette référence, au niveau mondial, aux responsables des nations, non seulement de ce temps, mais de tous les temps, l’orant retourne à la louange personnelle (cf. Ps 137, 7-8). Le regard s’étendant vers l’avenir de sa vie, il implore une aide de Dieu également pour les épreuves que l’existence lui réservera encore. Et nous prions tous ainsi, avec l’orant de cette époque.
On parle de façon synthétique de « mes ennemis en colère » (v. 7), une sorte de symbole de toutes les hostilités qui peuvent s’élever face au juste dans le cours de l’histoire. Mais il sait – et avec lui, nous savons – que le Seigneur ne l’abandonnera jamais et étendra sa main pour le secourir et le guider. La fin du Psaume est alors une ultime et passionnée profession de foi en Dieu dont la bonté est éternelle: il « n’arrête pas l’œuvre de [ses] mains», c’est-à-dire sa créature (v. 8). Et nous aussi, devons vivre dans cette confiance, dans cette certitude de la bonté de Dieu.
Nous devons être certains que, aussi lourdes et tumultueuses que soient les épreuves qui nous attendent, nous ne serons jamais abandonnés à nous-mêmes, que les mains du Seigneur ne nous lâcheront pas, ces mains qui nous ont créés et qui à présent nous suivent dans l’itinéraire de notre vie. Comme le confessera saint Paul, « Celui qui a commencé en vous cette œuvre excellente en poursuivra l’accomplissement » (Ph 1, 6).
5. Nous avons ainsi prié, nous aussi, avec un psaume de louange, d’action de grâce et de confiance. Nous voulons continuer à dérouler ce fil de louange sous forme d’hymne à travers le témoignage d’un chantre chrétien, le grand Ephrem le Syrien (IVe siècle), auteur de textes d’un extraordinaire parfum poétique et spirituel.
« Aussi grand que soit notre émerveillement face à toi, ô Seigneur,/ ta gloire dépasse ce que nos langues peuvent exprimer », chante Ephrem dans un hymne (Hymnes sur la virginité, 7; La harpe de l’Esprit, Rome, 1999, p. 66), et dans un autre: « Gloire à toi, pour lequel toutes les choses sont faciles, /car tu es tout-puissant » (Hymnes sur la Nativité, 11: ibid., p. 48). Et cela représente une ultime raison de notre confiance: Dieu a le pouvoir de la miséricorde, et il utilise son pouvoir pour la miséricorde. Et enfin, une dernière citation: « Gloire à toi de tous ceux qui comprennent la vérité » (Hymnes sur la Foi, 14: ibid., p. 27).
[Texte original : italien – Traduction réalisée par Zenit]