« Respect et estime à l'égard des personnes âgées », par Mgr Léonard

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CITE DU VATICAN, Jeudi 27 janvier 2005 (ZENIT.org) – « Jean-Paul II s’adresse à chacun de nous pour que, là où nous sommes, et d’abord dans le cercle familial, nous témoignions respect et estime à l’égard des personnes âgées », souligne Mgr André-Mutien Léonard, qui a bien voulu répondre aux questions de Zenit, à propos du message de carême de Jean-Paul II qu’il a présenté ce matin au Vatican aux côtés de Mgr Paul Joseph Cordes, président du Conseil pontifical Cor Unum.

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Zenit : Mgr Léonard, vous présentez, aux côtés de Mgr Cordes le Message de carême 2005 de Jean-Paul II. En effet, Cor Unum attire chaque année l’attention des fidèles sur la dimension caritative du carême. Cette année, le Saint-Père fait appel à vous, qui êtes philosophe, théologien, pasteur. Quelle est la nouveauté du Message 2005?

Mgr Léonard : Tout d’abord, je vous serais reconnaissant de pouvoir préciser que, contrairement à ce qu’annonce votre aimable et précieuse agence, je ne suis pas « archevêque », mais simplement évêque de Namur, ce qui n’est déjà pas si mal ! Et très heureux de présenter le Message de Carême du Pape aux côtés de Mgr Cordes, Président de Cor Unum et …archevêque pour le coup.

Ce qui est typique de ce Message, c’est qu’il attire l’attention sur la condition des personnes âgées. Dans les pays d’Occident dont la démographie est généralement catastrophique et qui vont connaître un vieillissement très marqué de la population, cette question va revêtir une actualité marquante. Il est important d’en signaler quelques balises.

Enfin, ce Message a une autre caractéristique bouleversante, c’est qu’il est écrit par un Pape qui est lui-même une personne âgée, profondément marquée par la souffrance et la maladie. Quand donc Jean-Paul II rappelle qu’on ne peut jamais dire d’une personne affaiblie par la maladie ou par l’âge qu’elle est inutile et ne représente plus qu’un poids social, sa parole s’incarne dans le témoignage qu’il rend à la face du monde. Son récent pèlerinage à Lourdes a été, de ce point de vue, d’une éloquence exceptionnelle. Malade parmi les malades, aux limites de ses forces, il a témoigné au nom de toutes les personnes humaines usées par l’âge ou la maladie qu’elles ont toujours une place de choix dans la société. Le témoignage rendu par la faiblesse du Pape est peut-être le plus fort de tout son pontificat. Paul disait déjà: « La puissance de Dieu donne toute sa mesure dans la faiblesse » (2 Co 12, 9).

Zenit : A qui s’adresse ce Message? A des spécialistes, des « décideurs »?

Mgr Léonard : Ce message s’adresse, bien sûr, implicitement aux décideurs politiques et aux responsables de la santé publique, les mettant en garde contre les tentations qui suggéreraient que la vie humaine vieillissante, handicapée ou finissante ne mérite plus vraiment tout le respect dû à une personne humaine. En même temps, voyant les côtés positifs de la société actuelle, le Pape encourage puissamment les progrès accomplis dans l’accompagnement des personnes très âgées ou malades, spécialement grâce au développement des soins palliatifs. Mais, au-delà des responsables publics ou des spécialistes de la santé, Jean-Paul II s’adresse à chacun de nous pour que, là où nous sommes, et d’abord dans le cercle familial, nous témoignions respect et estime à l’égard des personnes âgées.

Zenit : Il y a eu « Evangelium Vitae », avant cela « Donum Vitae »: Ces enseignements ont-ils été « reçus » dans les communautés chrétiennes? Comment faire pour qu’ils soient aussi transmis aux jeunes générations? Et vécus…

Mgr Léonard : « Evangelium Vitae » et « Donum Vitae » sont des trésors trop peu connus et insuffisamment utilisés. C’est aux pasteurs, évêques et prêtres, de se démener davantage pour les faire connaître, d’une manière qui puisse passer dans les médias et toucher le coeur des jeunes. Souvent, en effet, ces textes sont mis au rancart parce qu’on les présente d’abord comme une série d’interdits. On donne ainsi l’impression que l’Eglise dit toujours « non » à tout. Or l’Eglise dit d’abord « oui » à la dignité de la personne humaine, ce qui entraîne ensuite, bien sûr, des « non » à tout ce qui la brime. Celui qui « non » à la dictature dit d’abord « oui » aux libertés démocratiques. Celui qui dit « non » à l’antisémitisme ou au racisme dit d’abord « oui » au respect de la personne humaine quelles que soient sa race ou sa religion. De même quand l’Eglise dit « non » à l’avortement ou à l’euthanasie, c’est parce qu’elle dit « oui » à la dignité personnelle de ce que nous avons tous été, un embryon et un foetus humain, et serons peut-être un jour, à savoir une personne économiquement non rentable et biologiquement peu performante, mais toujours une personne humaine infiniment digne de respect.

Zenit – Ce message sur la Vie est publié au jour anniversaire de la commémoration de la découverte du camp d’extermination d’Auschwitz où le pape a choisi pour Légat le cardinal Lustiger. Une concomitance peut-être pas voulue mais, est-ce qu’il ne s’agit pas finalement, d’apprendre à aimer et respecter la vie humaine pour que « cela » ne soit plus jamais possible? Plus encore, est-ce qu’on ne se bat pas, en défendant la vie, avec de vieux « démons » hérités de notre passé…

Mgr Léonard : Je ne pense pas que cette concomitance ait été voulue, et il serait mal venu de l’exploiter en assimilant l’une à l’autre des problématiques qui sont très différentes, même si elles ont en commun la question cruciale du respect absolu de la personne humaine innocente. Il reste cependant historiquement vrai que le national-socialisme a récupéré à son profit des thèses comme celles de Binding et Hoche qui, en 1922 et sans aucune accointance avec l’antisémitisme de Hitler, légitimaient juridiquement et médicalement « la destruction des vies qui ne valent pas d’être vécues ». Celui qui ouvre la porte à l’euthanasie devrait savoir à quels démons il risque d’offrir un jour accès.

Zenit : Qu’aimeriez-vous dire à nos lecteurs pour les aider à faire leur ce Message du pape, tout au long de ce carême?

Mgr Léonard : Dans son Message, le Pape rappelle que les personnes âgées ont généralement plus de temps pour être attentives aux questions les plus profondes de la vie, de la mort et de l’éternité. Et c’est vrai. Mais, sans attendre d’être nous-mêmes âgés ou malades (mais peut-être le sommes-nous déjà !), prenons-en de la graine. Penser à sa vieillesse et à la fin de sa vie sur terre n’est pas une pensée morbide ou lugubre. Au contraire, cela projette une vive lumière sur notre existence présente et nous amène à mieux valoriser chaque instant de notre vie présente. De ce point de vue aussi le Message de Jean-Paul II est stimulant.

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ZENIT Staff

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