Message du cardinal Barragan pour la Journée des Lépreux

« Un jour de guerre pour la Paix »

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CITE DU VATICAN, Samedi 24 janvier 2004 (ZENIT.org) – Le cardinal Javier Lozano Barragan, président du Conseil pontifical pour la Pastoral de la santé, publie le message ci-dessous à l’occasion de la Journée des Lépreux. Parmi les laïcs qui ont combattu la lèpre, le cardinal mentionne « l’œuvre de Raoul Follereau qui, il y a exactement quarante ans, le 1er septembre 1964, lança l’initiative « Un jour de guerre pour la Paix », qui secoua les consciences et attira l’attention des Nations Unies sur la situation grave des malades de la lèpre ».

Le pape a nommé le cardinal Barragan son envoyé spécial pour la célébration de la XII Journée Mondiale du Malade, qui aura lieu à Lourdes, en France, le 11 février.

Message pour la 51ème JOURNÉE MONDIALE DE LA LÈPRE

À l’occasion de la célébration de la « 51ème Journée mondiale de la Lèpre », le dimanche 25 janvier 2004, j’ai le plaisir d’adresser ce Message aux évêques responsables de la pastorale de la santé dans les Conférences épiscopales, ainsi qu’à tous ceux qui sont engagés dans la lutte contre le lèpre.

Réalité de la maladie dans le monde

1. La situation de la pandémie dans le monde est fournie par l’O.M.S., avec des données publiées au début de 2003, relevées au cours de l’année précédente, dénonçant 620.000 nouveaux cas signalés, répartis de la manière suivante : Afrique 48.248, Amériques 39.939, Est méditerranéen 4.665, Sud Est asiatique 520.632 (dont 78% au moins en Inde), Pacifique de l’Ouest 7.154 et Europe 34.

En même temps, elle indique l’existence de 2 à 3 millions de personnes environ qui, à cause de la maladie de Hansen, présentent des mutilations de leurs corps ; ces personnes, considérées aujourd’hui comme « aptes de manière diverse » sont intégrées dans des programmes de réadaptation.

ACTION DE L’ÉGLISE

2. L’Église catholique qui, dans ce domaine, a pour ligne de conduite l’action de notre Seigneur face aux lépreux, s’efforce de guérir ces malades et de faire tomber les barrières psychologiques qui se dressent devant eux.

a) Le Christ notre Seigneur a eu une attention particulière à l’égard des malades de la lèpre de son temps. En raison de sa vivacité, nous relisons ce que nous rapporte l’évangéliste saint Marc : « Un lépreux vient à lui, le supplie et, s’agenouillant, lui dit : ‘Si tu le veux, tu peux me purifier’. Ému de compassion, il étendit la main, le toucha et lui dit : ‘Je le veux, sois purifié’. Et aussitôt la lèpre le quitta et il fut purifié. Et le rudoyant, il le chassa aussitôt et lui dit : ‘Garde-toi de rien dire à personne ; mais va te montrer au prêtre et offre pour ta purification ce qu’a prescrit Moïse : ce leur sera une attestation’ » (Mc 1, 40-44 ; voir également Mt 8, 1-4 ; Lc 5, 12-16, 17, 11-19).

b) Histoire de l’Église. Dans l’histoire de l’Église, le baiser de saint François au lépreux et les actions héroïques de tant de religieuses, de religieux, de prêtres et de laïcs qui s’engagent depuis toujours dans l’assistance de ces frères, nos frères, sont devenus classiques. Nous faisons allusion au bienheureux Damien de Veuster, surnommé « l’apôtre de Molokaï », et à la visite de Jean Paul II à la léproserie de Saint Lazare à Cuba où il a embrassé et béni chacun des lépreux présents. Parmi les laïcs, nous rappelons l’œuvre de Raoul Follereau qui, il y a exactement quarante ans, le 1er septembre 1964, lança l’initiative « Un jour de guerre pour la Paix », qui secoua les consciences et attira l’attention des Nations Unies sur la situation grave des malades de la lèpre.

L’Église catholique proclame ces personnes « images de Dieu », aimées de Lui et rachetées par le sang de son Fils Jésus-Christ et elle manifeste, avec les paroles du Saint-Père Jean Paul II, tout son respect et son estime pour chaque être humain qui subit le tourment de plaies indélébiles : « Le Christ que nous adorons a subi lui aussi une épreuve, celle de la croix, une épreuve qui l’a défiguré et tout cela sans qu’il en ait la faute. Il s’en est remis à Dieu, son Père. Il s’est adressé à lui pour lui demander d’être épargné, mais il a accepté, il a souffert. Et pour d’innombrables hommes, pour vous, pour moi, sa souffrance est devenue source de salut, de pardon, de grâce, de vie. Cette solidarité dans la misère est un grand mystère » (Visite à la léproserie d’Adzopé, le 12 mai 1980).

c) Actualité. Donc, l’Église, depuis toujours, a ouvert ses bras maternels à ces enfants doublement frappés par la maladie physique et par les préjugés sociaux qui menaient à une marginalisation humiliante, comme Jean Paul II le dénonçait à Manille en 1981 (Radio Veritas, 21 février 1981). Elle est présente parmi eux et accueille une partie d’entre eux dans ses « Centres » qui, à la fin de 2002, étaient au nombre de 740, distribués de la manière suivante : Afrique 354, Amérique 66, Asie 315, Europe 4, Océanie 1.

III. SOUTIEN À L’ACTION DE L’O.M.S.

3. Depuis quelques années, l’O.M.S. réalise « The Final Push Strategy to eliminate Leprosy as a Public Health Problem ». Des succès satisfaisants obtenus au cours de ces dernières années dans le traitement de la maladie de Hansen ont suscité l’espérance d’une solution finale, lors du prochain quinquennat et, en même temps, ont incité les institutions de santé, mondiales et nationales, à lancer une nouvelle approche de la pandémie, en développant une politique destinée à abattre les antiques craintes et à libérer du caractère infamant tous ceux qui sont encore atteints de la maladie.

Le « Programme O.M.S. » explique clairement que, aujourd’hui, cette maladie doit être affrontée dès le commencement de sa manifestation, peut être placée sous contrôle et anéantie par une thérapie intensive d’une durée de six mois, et prévoit que, bientôt, les temps seront encore plus brefs. Recherche scientifique, traitements pharmacologiques, amélioration des conditions hygiéniques et médecine de communauté associés pourront finalement favoriser l’éradication de cette maladie qui accompagne depuis de nombreux siècles l’histoire de l’humanité. Il s’agit certainement d’une action louable à laquelle nous ne pouvons que souscrire.

Le tableau qui recense officiellement les personnes portant dans leur corps les signes provenant de la maladie évite, à juste titre, de les considérer encore comme des « malades de la lèpre », puisque la bactérie meurtrière a été définitivement vaincue en elles. Pour les autorité officielles mondiales de la santé, celles-ci doivent être considérées comme des personnes « aptes de manière différente », qu’il convient d’insérer dans des programmes consacrés à ce secteur sensible de la santé que chaque communauté nationale a en cours. Objectif excellent auquel nous devons souhaiter qu’il atteigne pleinement le but fixé, la même chose au Centre de la Santé mondiale. Mais à la périphérie, dans chacun des pays touchés par la pandémie, comment cela est-il vécu ?

4. Un rapport lucide et sincère de l’OMS souligne certaines difficultés qui vont à l’encontre d’un succès rapide dans les délais indiqués . Dans six pays en particulier, le principal obstacle est la couverture géographique de l’unité de base de santé pour le traitement par la « polychimiothérapie ». Et dans quatre pays au moins, ce sont les guerres civiles en cours qui endommagent gravement les infrastructures sanitaires.

Ce programme de l’OMS suscite de grandes espérances. Mais il exige que dans les communautés locales, il y ait une grande ouverture, l’intelligence d’apprendre et de comprendre, mais aussi de former des personnels de la santé pour affronter la situation nouvelle, capables d’administrer les traitements récents et efficaces
et en même temps, aident à développer des attitudes d’accueil à l’égard de ceux qui, aujourd’hui encore, sont atteints de la maladie.

5. C’est en contemplant ces exigences concrètes et pratiques que la 51ème Journée mondiale de la Lèpre interpelle chaque communauté ecclésiale de l’Église catholique dans le monde. Elle se présente comme un défi fort et renouvelé pour tous ceux qui se consacrent aux soins du corps malade et l’accomplissent comme un service au Christ souffrant, se faisant ainsi des témoins laborieux de l’amour miséricordieux de Dieu qui se poursuit à travers les différents ministères de l’Église et les professions diverses qui se consacrent à la santé, pour s’occuper des besoins de tous ses enfants.

C’est l’occasion de Dieu pour la promotion et l’intensification de ce « partage chrétien des biens » dont la première communauté chrétienne apostolique de Jérusalem a le mérite et qui, au cours de ces deux mille ans, a toujours été le modèle de base de la charité dans l’Église de notre Seigneur Jésus-Christ. Ce partage instaure une communion authentique et profonde avec ces communautés ecclésiales existant dans les avant-postes des pays où le taux de pauvreté est plus élevé et apporte un soutien vital aux « centres d’accueil » destinés aux frères invalides, victimes de la maladie de Hansen, et constitue le témoignage le plus authentique de solidarité fraternelle et d’aide en vue d’une solution finale de la pandémie.

Il s’agit d’une réponse concrète à l’appel que le Saint-Père Jean Paul II a lancé à plusieurs reprises au cours de ses visites pastorales aux églises. Un appel que les pasteurs de l’Église doivent avoir particulièrement à cœur, en invitant leurs églises à effectuer des choix cohérents, afin de créer un réseau de fraternité évangélique promue en mettant systématiquement à la disposition des moins favorisés, une partie de leurs ressources.

CONCLUSIONS PRATIQUES

6. Il ressort du magistère du Saint-Père une sage indication qui éclaire l’action concrète à entreprendre : « En ce qui me concerne, je continuerai à proclamer au monde la nécessité d’une conscience encore plus grande du fait que, grâce à une aide programmée, cette maladie pourra être vaincue efficacement » (Manille, Radio Veritas, 21 février 1981).
Aux évêques chargés du secteur de la pastorale de la santé dans chaque conférence épiscopale nationale, j’indique, à l’aide des paroles du Saint-Père, notre devoir précis d’assumer les engagements qui dérivent de notre ministère spécifique dans le domaine doctrinal, dans le domaine pastoral et dans le domaine de l’organisation.

Par la doctrine, nous encourageons et accompagnons la recherche scientifique en indiquant aux spécialistes les contenus des valeurs à respecter dans chaque aspect particulier de la recherche épidémiologique, biologique et pharmacologique, afin de ne pas perdre de vue l’unité et la dignité de la personne, surtout dans l’expérimentation. Les critères éthiques guidant la bonne pratique clinique représentent des principes moraux qu’il faut toujours faire respecter, partout, afin qu’aucune personne, surtout si elle est gravement malade, ne soit utilisée comme simple objet de recherche.

Par la pastorale, nous mettons au centre de nos préoccupations le soin des plus faibles et nous formons des personnels, religieux et laïcs, capables de suivre l’effort spirituel, non seulement des malades mais aussi des professionnels engagés à la première personne. Le soin des âmes qui nous est confié doit être accompli avec compétence et suivi avec constance afin que, dans la vie de nos communautés, il ne subsiste aucun angle obscur ou négligé. La formation est un devoir indispensable de l’action pastorale elle-même.

Enfin, par l’organisation, nous nous efforçons de diriger nos forces en vue d’offrir de nouveaux services mieux adaptés aux nécessités réelles des personnes, en invitant à la collaboration tous les hommes de bonne volonté qui respectent notre foi et favorisent la dignité de l’homme. Dans ce domaine, les programmes de jumelage entre paroisses et diocèses des différents continents pourraient représenter le signe perceptible de ce réseau de fraternité évangélique que nous devrions construire ensemble, toujours confiants dans l’aide de Dieu, sans lequel tout effort humain reste vain.

En cette année, nous célébrons le 150ème anniversaire de la proclamation du dogme de l’Immaculée Conception. Que Notre Dame « Santé des malades », étende son amour total vers Dieu et vers nous tous, cet amour que Dieu lui a accordé dès le premier instant de sa conception. Enrichis par son amour, nous aurons certainement un soin particulier de nos frères souffrant de la maladie de Hansen.

Card. Javier LOZANO BARRAGAN
Président

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ZENIT Staff

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