Qu’est-ce qui a fait de Mère Teresa une femme aussi spéciale ? (Première partie)

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Entretien avec Brian Kolodiejchuk, Missionnaire de la Charité

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ROME, lundi 13 octobre 2003 (ZENIT.org) – Comment une petite femme toute frêle a-t-elle pu devenir l’un des personnages les plus exceptionnels du 20ème siècle, en se consacrant « aux plus pauvres parmi les pauvres » ?

Pour tenter de répondre à cette question, Zenit a interrogé le père Brian Kolodiejchuk, l’un des premiers membres de la branche masculine des Missionnaires de la Charité et postulateur de la cause de béatification de Mère Teresa. Mère Teresa sera béatifiée dimanche prochain, 19 octobre, place Saint Pierre, par le pape Jean-Paul II. Nous publions ici la première partie de l’entretien.

Q : Le 20 décembre dernier, le décret d’un miracle attribué à Mère Teresa était rendu public. La béatification de Mère Teresa était donc annoncée cinq ans et trois mois après sa mort. Comment expliquez-vous un délai aussi court ?

Père Kolodiejchuk : La première raison de ce délai aussi court est certainement la grande réputation de sainteté dont jouissait déjà Mère Teresa lorsqu’elle était en vie. Beaucoup la considéraient comme une sainte et la qualifiaient même de « sainte vivante ». C’était l’opinion générale non seulement des fidèles catholiques mais aussi de personnes d’autres religions et même de personnes agnostiques.

Les media internationaux avaient suivi sa vie et son œuvre avec beaucoup d’intérêt. Beaucoup admiraient la charité et l’amour désintéressé dont elle faisait preuve à l’égard des pauvres. Elle était devenue un symbole d’amour et de compassion pour les plus pauvres parmi les pauvres.

Lors de sa mort, le gouvernement indien lui a rendu hommage par des funérailles nationales, auxquelles ont assisté de nombreux responsables mondiaux. Beaucoup à travers le monde ont suivi les funérailles à la télévision. Ceci a été un merveilleux hommage à Mère Teresa et à sa réputation de sainteté. Mais ce sont surtout les gens simples, les pauvres qui avaient fait l’expérience de son amour maternel, qui l’ont pleurée. Ce sont eux qui témoignent le plus de sa sainteté.

En raison de cette réputation de sainteté solide et répandue, la Congrégation pour les Causes des Saints a reçu, peu de temps après sa mort, une avalanche de demandes d’ouverture de son procès de béatification et de canonisation.

L’une des premières demandes – la principale – est arrivée en octobre 1997 lorsque l’archevêque de Calcutta, Henry D’Souza a demandé à la Congrégation pour les Causes des Saints une dispense de la norme prévoyant une période d’attente de cinq ans après la mort avant que l’enquête diocésaine sur la Vie, les Vertus et la Réputation de Sainteté puisse commencer.

Quatorze mois plus tard, le 12 décembre 1998, la Congrégation accordait la dispense et l’enquête diocésaine pouvait commencer.

Après quelques étapes préliminaires, l’enquête diocésaine a commencé à Calcutta, le 26 juillet 1999. La période de la collecte d’informations a ainsi commencé : des entretiens avec des témoins oculaires et la révision de documents et de matériel touchant à la vie et à l’œuvre de Mère Teresa. La session de clôture de l’enquête diocésaine a eu lieu le 15 août 2001. Les Actes de l’Enquête Diocésaine représentent 80 volumes d’environ 450 pages chacun. Ce matériel a été remis à la Congrégation pour les Causes des Saints, à Rome.

Même si une exemption a été faite pour la période d’attente, aucune exemption n’a été accordée pour le procès formel lui-même ou l’une ou l’autre des étapes du procès. Une « Position sur les Vertus », ou « positio » a été préparée sous la direction du rapporteur, Mgr José Luis Gutiérrez Gómez.

Ceci a bien sûr demandé beaucoup de travail et d’efforts. Une étude sérieuse et détaillée de la vie et de l’œuvre de Mère Teresa a été réalisée. Ce fut un travail beau et gratifiant car on a découvert beaucoup de choses. En avril 2002 la « positio » fut terminée et remise à la Congrégation pour les Causes des Saints.

Ce travail a été rendu possible grâce au dévouement de ceux qui travaillaient à la cause à Calcutta et à Rome, et grâce à l’aide généreuse d’un grand nombre de personnes. Mais la Providence de Dieu a été plus importante encore que tout le reste. Nous avons reçu l’aide qu’il fallait au moment opportun et je peux vraiment dire que la main de Dieu nous assistait et nous guidait sur le chemin.

Q : Totalement abandonnée à Dieu, Mère Teresa a fait du service aux plus pauvres parmi les pauvres, aux personnes abandonnées de tous, aux malades et aux moribonds, sa vie. Notre époque est caractérisée par une recherche de plaisir, de succès, de sécurité et par l’égoïsme. Pourquoi la future bienheureuse est-elle aussi admirée dans la société en général ?

Père Kolodiejchuk : L’attrait de Mère Teresa est avant tout dans l’attrait de l’Evangile lui-même.
Ce qui était le plus visible et le plus attrayant chez Mère Teresa, c’était le fait qu’elle vivait le message de l’Evangile de manière radicale. Si elle a été si admirée et recherchée ce n’est pas tant à cause de son éloquence – elle parlait de manière plutôt simple – que parce qu’elle « mettait de l’amour dans ses actions », comme Jésus l’a enseigné.

Le message de l’Evangile avait pris racine en elle, elle le comprenait et y croyait. Elle l’avait laissé imprégner son être et ceci se reflétait dans sa manière de vivre. Elle ne s’accordait pas de compromis et en cela, sa détermination et son courage étaient admirables. Même ceux qui la critiquaient étaient impressionnés par cela.

Sa vie et son œuvre donnaient de l’authenticité à ses paroles et c’était ce que les gens cherchaient lorsqu’ils l’invitaient à prononcer des discours ou lorsqu’ils choisissaient de lui décerner des prix ou des honneurs. Même dans une société aussi sécularisée, vivre l’Evangile de manière radical est encore attrayant.

L’un des aspects particulièrement importants de cet attrait était le service de Mère Teresa aux plus nécessiteux. Sa compassion, son attention, son service efficace aux plus nécessiteux – le dernier et le plus petit, la personne rejetée et mal-aimée – étaient l’expression d’un amour total, un amour d’abnégation, en réponse à l’appel spécial qu’elle avait reçu en 1946 à désaltérer la soif d’amour et d’âmes, de Jésus.

A une époque où le rejet de la vie est si commun et où les gens sont abandonnés à cause de l’indifférence, Mère Teresa est apparue comme un messager auprès de chaque personne qu’elle rencontrait : « Dieu t’aime et te veut, il te désire ardemment, il a soif de toi ». Elle a vécu ce message en embrassant les plus pauvres, les plus abandonnés, les moins aimés, ceux que personne d’autre ne voulait et pour lesquels personne d’autre n’avait le temps. Avec elle, chaque personne se sentait spécialement aimée.

Le fait que Mère Teresa ait fait naître cette admiration montre que les gens sont encore à la recherche de spirituel. Même sans le savoir, les gens ont soif de Dieu. Comme le dit le Saint Père dans sa Lettre Apostolique « Novo Millennio Ineunte » : « La sainteté (…), message éloquent qui n’a pas besoin de paroles, elle représente d’une manière vivante, le visage du Christ ». Au fond, c’est la sainteté de Mère Teresa qui a attiré les gens à elle, et c’était Son visage qu’ils admiraient en elle.

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ZENIT Staff

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