Rencontre avec le postulateur de la cause de béatification de Mère Teresa

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« C’était une femme totalement éprise de Jésus »

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CITE DU VATICAN, Lundi 23 décembre 2002 (ZENIT.org) – Le secret de Mère Teresa de Calcutta ? Le P. Brian Kolodiejchuk, M.C., postulateur de son procès de béatification répond sans hésiter un instant : « C’était une femme totalement éprise de Jésus ».

En publiant le décret de reconnaissance d’un miracle attribué à l’intercession de la religieuse albanaise (1910-1997) le Père Kolodiejchuk, cofondateur de la branche sacerdotale des Missionnaires de la Charité, ouvre ainsi les portes de la béatification de Mère Teresa. Dans un entretien accordé à Zenit, il commente quelques aspects les plus remarquables de cette figure, qui apparaissent à l’issue d’un énorme travail de recherche constituant pas moins de 80 volumes.

-Mère Teresa a impressionné le monde par son engagement auprès des plus pauvres. Comment fut-il possible à cette femme de s’avancer sans peur dans les rues de Calcutta et du monde pour soigner les plaies des lépreux ou caresser les ‘parias’ des sociétés modernes ?

-Je crois que la clé de sa vie est précisément dans le fait que c’était une femme totalement éprise de Jésus. Nous avons trouvé des écrits de sa jeunesse dans lesquels elle confessait que Jésus fut son premier amour. Elle parlait comme une jeune fille amoureuse.

Pour elle, son engagement auprès des plus nécessiteux, des plus pauvres d’entre les pauvres, était la réponse à un appel. Même dans les moments d’obscurité, elle était convaincue qu’il s’agissait d’un authentique appel de Jésus. C’est avec conviction qu’elle répétait fréquemment qu’il s’agissait de « l’œuvre de Dieu ». Elle sentait qu’elle était comme un crayon dans les mains de Dieu, son instrument.

-Toute béatification est un message pour le monde. Quel est le message que transmet l’Eglise en annonçant la béatification de Mère Teresa ?

-Son message central est l’amour : envers Dieu, pas seulement envers le prochain. Durant la période où elle reçut l’appel à fonder la Congrégation des Missionnaires de la Charité, elle connut une dure épreuve intérieure, une expérience spirituelle pendant laquelle elle ne sentait pas de consolation. Toutefois, pendant ce temps d’épreuve aussi ce fut l’amour qui l’amena à répondre à sa mission. Lors d’une occasion où elle lui donnait une reconnaissance publique, Indira Gandhi, premier ministre de l’Inde, prononça à peu près ces paroles : « Aujourd’hui, dans ce monde si frénétique, il est facile d’oublier les choses les plus essentielles. Mère Teresa nous enseigne que le plus essentiel c’est l’amour ».

Sa vie est pleine d’exemples de l’amour des autres, et pas seulement des pauvres mais aussi de toutes les personnes qu’elle rencontrait : les sœurs Missionnaires de la Charité, les personnes qui lui rendaient visite… En réalité, Mère Teresa nous laisse pour message de faire les choses ordinaires avec un amour extraordinaire. Lorsqu’elle s’adressait aux personnes qu’elle rencontrait, elle disait que cet amour ne doit pas seulement s’exercer à l’égard des pauvres : il faut commencer par aimer les membres de sa famille qui ont besoin d’une parole d’encouragement, commencer par aider le voisin qui peut-être a besoin d’écrire une lettre à quelqu’un, commencer par sourire à celui qui en a besoin.

Nous avons pu vérifier combien la foi est une de ses vertus caractéristiques pourtant on ne peut pas aimer ainsi du matin jusqu’au soir, en dormant trois ou quatre heures par nuit, en consacrant chaque jour de sa vie aux plus pauvres.

-Quel fut le plus grand défi du procès de béatification ?

-Deux tâches se sont avérées particulièrement difficiles :
La première, celle de récolter ou de chercher toutes les informations disponibles, car il s’agissait de rassembler du matériel, des témoignages, des faits auprès de personnes du monde entier. Au cours du procès, nous avons compilé plus de 8.000 documents, 80 volumes de documentation avec des témoignages écrits. 113 personnes ont témoigné de sa vie, de sa vertu et de sa réputation de sainteté. Plusieurs autres centaines de personnes qui ne pouvaient pas se déplacer ont envoyé leur témoignage. Nous ne nous sommes pas contentés de faire le travail indispensable. Nous avons fait beaucoup plus que le minimum, et ce travail a servi à mieux comprendre qui elle était.
Le deuxième défi a consisté à écrire la « Positio », le document dans lequel on réunit tous ces témoignages, faits, documents, pour baser la postulation de sa cause de béatification sur des arguments solides. Tant de matériel ne rendait pas les choses faciles. Nous avons compté sur une équipe bien assortie de prêtres, religieuses et laïcs, de bénévoles, qui ont rendu possible ce travail.

-Cet énorme travail de recherche a-t-il fait découvrir quelque aspect caché jusqu’à ce jour de Mère Teresa ?

-Cela nous a permis de comprendre que sa simplicité cachait en réalité une profondeur que peu de gens avaient perçue ou encore moins imaginée. Avant même ses 36 ans, âge où elle commença les Missionnaires de la Charité, ses écrits témoignent d’une maturité spirituelle étonnante. Nous savions qu’une personne à la réputation de sainteté mondiale, exerçant une attirance si extraordinaire, devait avoir ‘quelque chose’. Mais de quoi s’agissait-il ? C’était son secret. Sa profondeur, sa vie spirituelle, son amour jusque dans les épreuves, sont aujourd’hui à découvert.

-Au cours des derniers mois, on a parlé de la « nuit obscure » que, comme les mystiques, Mère Teresa a vécu à des moments importants de sa vie. De quoi s’agissait-il ?

-Le fruit spirituel provient du sacrifice, de la croix. Avant l’inspiration de son œuvre, elle avait déjà fait l’expérience de l’obscurité. Cependant, il est important de prendre en compte que cette « nuit », cette souffrance intérieure, est le fruit de son union au Christ, comme ce fut le cas pour sainte Thérèse de Jésus ou pour saint Jean de la Croix. En s’unissant au Christ, elle comprit la souffrance de Jésus lorsque sur la Croix il s’écria : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Cette « nuit », cette souffrance, résulte aussi de l’apostolat, de l’amour du prochain. En aimant le Christ, elle comprend aussi la souffrance des autres, leur solitude, et aussi leur éloignement de Dieu.

La « nuit obscure » de Mère Teresa était due à la double dimension que comprend l’amour dont vivent les religieux : tout d’abord, l’amour « sponsal », l’amour du Christ, qui unit à ses souffrances et ensuite, l’amour « rédempteur », qui pousse à partager la rédemption, à annoncer aux autres l’amour de Dieu pour qu’ils découvrent le salut par la prière et le sacrifice.

Plus qu’une épreuve de foi, ce fut une épreuve d’amour. Plus encore que de ne pas sentir l’amour de Jésus, elle souffrit à cause de son désir de Jésus, de sa soif de Jésus, de sa soif d’amour. Le but de la Congrégation est précisément d’étancher la soif de Jésus sur la croix par notre amour pour Lui et notre engagement pour les âmes.

Mère Teresa partageait non seulement la pauvreté physique et matérielle des pauvres, mais elle sentait la soif, l’abandon que vivaient ces personnes. De fait, la pauvreté la plus grande est celle de ne pas être aimé, d’être rejeté.

-Certains journaux et agences de presse ont voulu nier le caractère miraculeux de la guérison qui a ouvert les portes au procès de béatification de Mère Teresa de Calcutta. Quelle en est l’histoire véritable ?

-Il s’agit d’une Indienne, Monika Besra, qui fut guérie en septembre 1998. D’une part, elle souffrait d’une méningite tuberculeuse. D’autre part, elle avait une volumineuse tuméfaction systique endoabdominale (un
e tumeur) sur l’ovaire droit. Sans aucune explication médicale, comme le vérifia ensuite la Commission scientifique qui analysa le cas, cette tumeur disparut. Il est vrai que la méningite tuberculeuse avait pu être guérie, comme l’ont dit quelques journaux, par un effet de la médecine. Mais le miracle n’était pas là : le miracle fut la guérison soudaine (en une nuit) et inexplicable de la tumeur de cette femme dont le ventre ressemblait à celui d’une femme enceinte de six mois.

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ZENIT Staff

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