CITE DU VATICAN, Jeudi 25 juillet 2002 (ZENIT.org) – Sous le titre: « Glorification de Dieu, Seigneur et Créateur », L’Osservatore Romano en français du 23 juillet (http://ww.vatican.va) publie la traduction de la catéchèse liturgique sur le Ps 148 donnée par Jean-Paul II en italien lors de l’audience générale de mercredi 17 juillet, à Castel Gandolfo.
Lecture: Ps 148, 1-6
1. Le Psaume 148 qui vient de s’élever vers Dieu constitue un véritable « cantique des créatures », une sorte de Te Deum de l’Ancien Testament, un alleluia cosmique qui entraîne tout et tous dans la louange divine.
Un exégète contemporain le commente ainsi: « Le psalmiste, en les appelant par leur nom, place les êtres dans l’ordre: dans le ciel, deux astres selon le moment, et les étoiles à part; d’un côté, les arbres fruitiers, de l’autre, les cèdres; sur un plan, les reptiles, et sur un autre, les oiseaux; ici, les princes et là, les peuples; sur deux rangs, se donnant peut-être la main, de jeunes garçons et de jeunes filles… Dieu les a établis en leur donnant une place et une fonction; l’homme les accueille, en leur donnant une place dans son langage, et ainsi disposés, il les conduit à la célébration liturgique. L’homme est le « pasteur de l’être » ou le liturgiste de la création » (L. Alonso Schökel, Trente psaumes: poésie et prière, Bologne 1982, p. 499).
Nous suivons nous aussi ce chœur universel, qui retentit dans l’abside du ciel et qui a pour temple le cosmos tout entier. Laissons-nous conquérir par le souffle de la louange que toutes les créatures élèvent à leur Créateur.
2. Dans le ciel, nous trouvons les poètes de l’univers stellaire: les astres les plus lointains, les groupes d’anges, le soleil et la lune, les étoiles brillantes, les « cieux des cieux » (cf. v. 4), c’est-à-dire l’espace interstellaire, les eaux supérieures que l’homme de la Bible imagine conservées dans des réservoirs avant de se déverser sous forme de pluie.
L’alléluia, c’est-à-dire l’invitation à « louer le Seigneur », retentit au moins huit fois et a pour objectif final l’ordre et l’harmonie des êtres célestes: « Il les posa […] sous une loi qui jamais ne passera » (v. 6).
Le regard se tourne ensuite vers l’horizon terrestre où se déroule une procession de poètes, au moins vingt-deux, c’est-à-dire une sorte d’alphabet de louange, disséminé sur notre planète. Voilà les monstres marins et les abîmes, symboles du chaos aquatique sur lequel la terre est fondée (cf. Ps 23, 2), selon la conception cosmologique des anciens sémites.
Le Père de l’Eglise, saint Basile, observait: « Même les abîmes ne furent pas jugés méprisables par le Psalmiste, qui les a accueillis dans le chœur général de la création; au contraire, avec un langage qui leur est propre, ils complètent eux aussi harmonieusement l’hymne au Créateur » (Homiliae in hexameron, III. 9: PG 29, 75).
3. La procession se poursuit avec les créatures de l’atmosphère: le feu des éclairs, la grêle, la neige, le brouillard et le vent d’ouragan, considéré comme un messager rapide de Dieu (cf. Ps 148, 8).
Arrivent ensuite les montagnes et les collines, considérées par la tradition populaire comme les créatures les plus antiques de la terre (cf. v. 9a). Le règne végétal est représenté par les arbres fruitiers et les cèdres (cf. v. 9b). Le monde animal est en revanche représenté par les fauves, le bétail, les reptiles et les oiseaux (cf. v. 10).
Voilà enfin l’homme qui préside la liturgie de la création. Il est présenté à tous les âges et sous toutes ses formes: enfants, jeunes et personnes âgées, rois et populations (cf. vv 11-12).
4. Nous confions à présent à saint Jean Chrysostome la tâche de jeter un regard d’ensemble sur cet immense chœur. Il le fait à travers des paroles qui renvoient également au Cantique des trois jeunes gens dans la fournaise ardente, sur lequel nous avons médité lors de la dernière catéchèse.
Cet éminent Père de l’Eglise et Patriarche de Constantinople affirmait: « En raison de leur grande rectitude d’âme, les saints, lorsqu’ils s’apprêtent à rendre grâce à Dieu, ont l’habitude d’appeler de nombreuses créatures à participer à leur louange, en les exhortant à entreprendre avec eux cette belle liturgie. C’est également ce que firent les trois jeunes gens dans la fournaise, lorsqu’ils appelèrent toute la création à rendre grâce pour les bienfaits reçus et à chanter des hymnes à Dieu (Dn, 3). C’est également ce que fait ce Psaume, en interpellant les deux parties du monde, celle qui se trouve en haut et celle qui se trouve en bas, la partie sensible et la partie intelligible.
Le prophète Isaïe fit également la même chose, lorsqu’il dit: « Cieux criez de joie, terre exulte, que les montagnes poussent des cris, car Yahvé a consolé son peuple » (Is 49, 13). Et le Psautier s’exprime de nouveau ainsi: « Lorsque Israël sortit d’Egypte, que la maison de Jacob sortit d’un peuple barbare, les montagnes sautillèrent comme des béliers et les collines comme les agneaux d’un troupeau » (Ps 113, 1.4). Et ailleurs, dans Isaïe: « Que les nuages déversent la justice » (Is 45, 8). En effet, les saints considérant qu’ils ne suffisaient pas à eux seuls pour louer le Seigneur, se tournent de tous les côtés en interpellant chacun pour participer à l’hymne commun » (Expositio in psalmum CXLVIII: PG55, 484-485).
5. Nous sommes invités nous aussi à nous associer à cet immense chœur, en devenant la voix explicite de chaque créature et en louant Dieu dans les deux dimensions fondamentales de son mystère. D’un côté, nous devons adorer sa grandeur transcendante, car « sublime est son nom, lui seul, sa majesté par dessus terre et ciel! », comme le dit notre Psaume (v. 13). De l’autre côté, nous reconnaissons sa bonté pleine de bienveillance, car Dieu est proche de ses créatures et il vient en particulier en aide à son peuple: « Il rehausse la vigueur de son peuple… le peuple de ses proches » (v. 14), comme l’affirme encore le Psalmiste.
Face au Créateur tout-puissant et miséricordieux, recueillons alors l’invitation de saint Augustin à le louer, à l’exalter, à le célébrer à travers ses ouvres: « A la vue de ces créatures, tu es ravi, tu t’élèves jusqu’au Créateur, la vue des créatures visibles t’élève jusqu’aux créatures invisibles. Alors sa confession est sur la terre et aussi dans le Ciel… Si ses œuvres sont belles, combien est plus grande la beauté du Créateur? » (Ennarationes sur les Psaumes, IV, Rome 1977, pp. 887-889).
©L’Osservatore Romano