CITE DU VATICAN, Mercredi 20 mars 2002 (ZENIT.org) – Aux Moluques, à Amboine, des manifestations spontanées réunissent chrétiens et musulmans, mais le gouverneur de la province met en garde contre tout excès d’optimisme, indique la revue des Missions étrangères de Paris, dans son édition du 15 mars (EDA, cf. eglasie.mepasie.org).
L’accord de paix entre les communautés chrétiennes et musulmanes signé à Malino le 12 février dernier (1) a été salué à Amboine, chef-lieu de la province des Moluques, par des manifestations spontanées réunissant chrétiens et musulmans. Quelques rares incidents, sans réelle gravité, ont été relevés ici ou là mais, selon les témoignages recueillis sur place, la tension entre les communautés semble avoir fait place à une atmosphère de détente et de joie. Toutefois, le gouverneur de la province, Saleh Latuconsina, a déclaré dans les colonnes du Jakarta Post daté du 12 mars que, si la plupart des groupes en présence avaient accepté l’accord en onze point dit de « Malino II » (2), un petit nombre d’organisations continuait à le rejeter et faisait campagne pour persuader les Moluquois de les soutenir dans leur cause.
La plus importante manifestation de masse a eu lieu le 27 février à Amboine. Ce jour-là, des musulmans s’étaient réunis devant la grande mosquée Al-Fatah pour entendre leurs responsables expliquer en détail l’accord conclu quinze jours auparavant à Malino, sur l’île de Célèbes. Ils ont été rejoints par des chrétiens que leurs leaders religieux avaient aussi informés des tenants et aboutissants de l’accord de paix. Ensemble, les deux groupes ont formé un seul cortège, rassemblant petit à petit et spontanément plusieurs milliers de personnes, jusqu’à 25 000 selon certaines sources, et paradant de manière pacifique à travers les rues d’Amboine.
Selon Sœur Brigitta Renyaan, religieuse catholique, « ce défilé pacifique était l’expression du bonheur de personnes qui désiraient la paix depuis longtemps et qui n’en pouvaient plus d’attendre ». Le 2 mars, une autre manifestation pacifique de 3 000 personnes a failli mal tourner lorsque deux de ses participants ont été poignardés – sans que leurs jours ne soient mis en danger. Les forces de l’ordre ont dû intervenir pour rétablir le calme, usant à cette occasion de leurs armes pour des tirs de semonce en l’air.
Pour assurer la sécurité, l’armée et la police ont établi des postes de contrôle communs afin de surveiller les groupes qui sont opposés à l’accord de paix. Dans le Jakarta Post du 12 mars, le gouverneur de la province a appelé les Moluquois à ne pas pécher par optimisme : « C’est un fait qu’il existe des personnes qui n’approuvent pas l’accord. J’espère que les gens ici ne se reposent pas sur leurs lauriers. » Le commandant militaire des Moluques, Mustopo, estime pour sa part que 80 % des Moluquois adhèrent à Malino II et que les 20 % restants s’y opposent. « Ce sont les conclusions de nos enquêtes sur le terrain », a-t-il déclaré, sans préciser qui sont ces opposants.
D’après l’article du Jakarta Post, du côté des opposants musulmans, on trouve le Front moluquois des défenseurs de l’islam, placé sous le contrôle de Husni Putuhena, Rustam Kastor, père idéologique des Laskar Jihad (3), les Laskar Jihad eux-mêmes et quelques autres groupes extrémistes musulmans. Au début du mois de mars, sur les ondes de la station SPMM (Suara Perjuangan Muslim Maluku – ‘La voix de lutte des musulmans moluquois’), radio contrôlée par les Laskar Jihad, Husni Putuhena et Rustam Kastor ont exprimé leur opposition à la totalité des onze points de l’accord de paix.
Toujours selon le Jakarta Post, du côté chrétien, les opposants à Malino II ne rejettent pas ce texte dans sa totalité et se contentent d’en contester certains points. Alex Manuputty, du Front pour l’indépendance des Moluques (FKM), et la RMS (République moluquoise du Sud) refusent ainsi de figurer dans le point 6 de l’accord et d’être assimilés à des Laskar Kristus (‘Combattants chrétiens’), en parallèle aux Laskar Jihad musulmans. Les responsables de la RMS refusent de même que leur mouvement soit considéré, au point 3 de l’accord, comme un mouvement séparatiste.
Enfin, selon le Centre de crise du diocèse catholique d’Amboine, la question primordiale du désarmement des parties en présence a commencé à trouver un début de réponse du côté chrétien. Plusieurs communautés chrétiennes en effet, notamment celles d’Airsalobar, de Gunung Nona et de Kudamati, ont été parmi les premières à remettre officiellement leurs armes aux autorités. Aux termes de l’accord de paix, les Moluquois ont du 1er au 31 mars pour remettre leurs armes sans crainte d’être poursuivis. Après cette date, les autorités se sont engagées à partir à la recherche des armes présentes aux Moluques et à traduire en justice toutes les personnes en possession illégale d’armes.
(C) Eglises d´Asie