Madagascar: "Ce qui frappe, c’est le manque de violence"

Un Salésien témoigne à « Fides »

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CITE DU VATICAN, Jeudi 7 mars 2002 (ZENIT.org) – « Ce qui frappe, c’est le manque de violence ». Le P. Cosimo Alvati, Salésien missionnaire à Madagascar depuis neuf ans, a accepté de répondre aux questions de l´agence Fides, organe de la Congrégation romaine pour l´Evangélisation des Peuples, sur les perspectives actuelles de la crise malgache.

– Qu’est-ce qui frappe le plus dans les protestations de la population malgache ?
– Ce qui frappe, c’est le manque de violence. Depuis deux mois, des centaines de milliers de personnes, avec des pointes allant au million, descendent dans la rue pour manifester de manière pacifique. Les manifestations ne se font pas seulement dans la Capitale, mais aussi dans d’autres Provinces et dans d’autres villes, comme Antsirabé où ils ont manifesté chaque jour. En Province, toutefois, les gens sont plus sujets aux intimidations des partisans de M. Ratsiraka, et, dans plusieurs régions du pays, les manifestations ont été annulées.
La communauté internationale doit réfléchir sur ce qui se passe à Madagascar : c’est le premier cas en Afrique où les armes ne tirent pas, où les machettes ne tranchent rien ; il n’y a pas de violence. Les manifestations se font dans la paix, dans la danse, dans la fête, dans la prière.

– Que doit faire, à votre avis, la communauté internationale ?
-Jusqu’à présent, les violences ont été très limitées, et la sagesse malgache a prévalu, car elle repose sur l’amitié et sur la solidarité.
Mais la situation pourrait précipiter. Avec la déclaration de sécession de 5 Provinces (sauf Antananarivo), et la nomination de la nouvelle Capitale, on pourrait se trouver face à un affrontement au sein de l’armée. Si toutes les forces armées acceptent d’obéir au Ministre de la Défense nommé par M. Ravalomanana, la situation pourra évoluer de manière pacifique. S’il y a des franges militaires dissidentes, on risque la guerre civile. Les acteurs internationaux les plus influents à Madagascar, le France, les Etats-Unis, l’Union Européenne (premier partenaire économique du pays) doivent intervenir pour éviter que l’affrontement ne dégénère en violence. Madagascar peut servir d’exemple pour toute l’Afrique ; on ne peut laisser de côté une tentative de solution pacifique pour résoudre une crise aussi grave.
Une solution pourrait être le référendum proposé par M. Ravalomanana. Les Malgaches devraient exprimer leur accord ou leur désaccord d’avoir M. Ravalomanana comme Président. Les Etats Unis ont déclaré qu’ils appuyaient le référendum, à condition que les deux adversaires soient d’accord.

– Quel est selon vous le rôle de la France
– La France a une forte présence économique à Madagascar. Mais la communauté française de l’île, qui compte 20.000 personnes environ, a condamné l’attitude de Paris vis-à-vis de M. Ravalomanana : devant l’ambassade de France, il y a eu des manifestations où la communauté française a exprimé son désaccord avec la politique de Paris, en portant des banderoles avec l’inscription  » Honte « . La communauté française de l’île a critiqué aussi les services de R.F.I. sur M. Ravalomanana, et signé deux pétitions adressées au Ministère français des Affaires Etrangères, dans laquelle ils déclarent qu’ils sont proches du peuple malgache, et demandent à Paris de changer d’attitude à l’égard de M. Ravalomanana.

– Quelle est l’attitude de l’Eglise dans l’affrontement en cours ?
– D’après certains moyens internationaux d’information, l’Eglise catholique a appuyé M. Ravalomanana. En réalité, l’Eglise Catholique est neutre : elle ne se déclare en faveur d’aucun candidat. Avant les élections, avec d’autres Eglises chrétiennes, elle a rédigé un portrait idéal en dix points du Président qui devait avoir des caractéristiques bien précises : honnêteté, correction, respect de la justice et de la volonté du peuple. Les Eglises ont demandé de figurer parmi les observateurs des élections.
Début février, la Conférence épiscopale de Madagascar a publié un communiqué dans lequel elle rappelait qu’elle ne soutenait aucun des deux candidats, mais signalait des principes qui doivent être à la base du processus démocratique : respect de la justice, de la liberté, du choix populaire, de la recherche de la vérité, contre toute forme d’exploitation du pouvoir à des fins personnelles, et appuyait le droit de manifester de la population en général et des individus en particulier, mais aussi des prêtres et des religieux, en tant qu’ils sont citoyens.
Pour sa part, le cardinal Armand Gaétan Razafindratandra, archevêque de Tananarive voit en M. Ratsiraka un  » mauvais perdant « . Les manifestations qui se déroulent chaque jour sur la Place du 13 mai dans la capitale, en faveur de M. Ravalomanana, se terminent toujours pas un moment de prière, présidé à tour de rôle par les différentes Eglises chrétiennes.

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ZENIT Staff

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