CITE DU VATICAN, Vendredi 30 mars 2001 (http://www.zenit.org/) – Le projet de loi français pour la stérilisation de personnes handicapées a suscité l´indignation en Italie.
Le comble sera commis par le régime nazi
En France, la Une de La Croix du 27 mars tirait le signal d´alarme avec ce titre: « Inquiétudes sur la stérilisation des handicapés » et consacrait deux pages à la question, rappelant le scandale des stérilisations aux Etats-Unis, au Japon, et en Europe, en Suède par exemple. « Le comble sera commis par le régime nazi », rappelait le quotidien français.
Pour sa part, L´Avvenire rappelle les 15.000 cas de stérilisations forcées dénoncés en France, en 1997, par Charlie Hebdo, et condamnés par exemple par le prof. Axel Kahn (INSERM) comme « une attaque scandaleuse à la dignité humaine »: « Même si elle est acceptée par le patient, la stérilisation est discutable, cite L´Avvenire. Mais pratiquer un acte semblable sur qui n´est pas en mesure d´y consentir pleinement est impensable ». L´Avvenire souligne aussi les cas au Tibet et rappelle les 63.000 victimes recensées en Suède où la loi sur la stérilisation a été abolie en 1976.
La France « impitoyable »
En Italie, la nouvelle du projet français a soulevé l´indignation. « Handicapés, la France impitoyable »: ce titre barrait hier la Une de L´Avvenire, le quotidien italien d´inspiration catholique, avec en surtitre: « Débat enflammé au sénat. Une hypothèse dans le cadre d´une loi plus permissive sur l´avortement », et en sous-titre: « Mis au vote un projet de loi qui prévoit la stérilisation ». Aujourd´hui, L´Avvenire traite le même thème, à la Une également, sous le titre: « La France se reprend ». Surtitre: « Rejeté le projet de loi du gouvernement avec ses normes plus permissives en matière d´avortement ». Sous-titre: « Le sénat a repoussé la proposition de la stérilisation ».
Cette philosophie n´est pas différente de celle de l´euthanasie
Mais entre l´indignation d´un jour et l´apaisement du lendemain, que disait L´Avvenire? Les deux pages intérieures de L´Avvenire du 29 mars donnaient d´abord la parole aux associations et au président du comité de bioéthique sous ce titre: « En Italie, ce serait impossible ». Don Vincenzo Albanesi, président de la coordination nationale des communautés d´accueil commentait: « C´est une proposition dans la ligne du climat culturel de ce pays. Par exemple, donner la pilule abortive à des adolescentes, à l´école, veut dire choisir la ligne de la moindre responsabilité, éviter les problèmes de la façon la plus simple. Et stériliser les personnes porteuses d´un handicap mental c´est aussi couper court, résoudre à la racine une question épineuse. En plus des avantages économiques (l´aspect le plus immédiat). Surveiller constamment certains malades est coûteux. Une telle loi vient en aide aux dirigeants des grands instituts d´internement. Cette philosophie, au fond, n´est pas différente de celle de l´euthanasie ».
Nous sommes des « méditerranéens »,
Pour le P. Vincenzo, un tel projet serait impensable en Italie. « Avant tout, explique-t-il, parce que nous sommes des « méditerranéens », et nous sommes plus accueillants envers les personnes handicapées. Traditionnellement, la culture des pays nordiques est moins tolérante envers celui qui est « différent », tend plus à la ségrégation devant qui n´est pas comme les autres. Et puis chez nous, il y a eu une prise de position du comité de bioéthique en 1998, exprimant un refus absolu de la stérilisation des malades mentaux ».
Une offense à la dignité de la personne
Pour ce qui est de la vie sexuelle des personnes handicapées, don Vincenzo est favorable aux lieux de vie plus « humains » que sont les petites communautés permettant une « vie affective » et en même temps, une diminution des « tensions » y compris de « l´agressivité sexuelle », plus de « respect » de l´autre. Le problème est plus difficile lorsque la « solitude des familles » est plus grande, estime don Vincenzo qui dénonce aussi les abus dont des personnes handicapées peuvent être victimes. « Aujourd´hui, dans les communautés, on respire un climat plus humain, insiste le P. Vincenzo. La question de la sexualité est prise en compte. Il n´y a pas en Italie de demande de stérilisation de ces malades. Il me semble que chez nous on ressente une telle intervention comme une offense à la dignité de la personne. Cela reviendrait à dire: tu n´es pas un homme ».
Une culture qui tend à la ségrégation
Anna Contardi, coordinatrice nationale de l´Association italienne des personnes trisomiques, rappelle qu´il y a des personnes trisomiques mariées. Elle regrette que la question de la sexualité des personnes handicapées soit abordée sous l´angle du « danger », des « risques » de violences etc. C´est, dit-elle une « perspective mutilante ». La question est assez nouvelle, explique-t-elle, pour les personnes trisomiques dont l´espérance de vie s´est allongée: elles mouraient plus jeunes auparavant. A propos du cas français, elle ajoute: « En France, c´est différent. Chez nous, les personnes handicapées mentales vont à l´école avec les autres enfants. Là-bas il n´y a pas cette intégration, cette habitude que nous avons de vivre avec qui est « différent ». L´idée de la stérilisation vient d´une culture qui tend à la ségrégation, à ne pas vouloir voir ».
Un pas en arrière
Aujourd´hui L´Avvenire annonce que le sénat français a fait « un pas en arrière » à propos du « projet de loi du gouvernement Jospin qui prévoyait le recours à la stérilisation comme banal moyen de contraception pour les handicapés mentaux » introduit dans le projet de réforme de la loi Veil. « Les sénateurs, indique le quotidien italien, ont rejeté la proposition qui prévoyait l´allongement du temps légal de recours possible à l´avortement de dix à douze semaines de grossesse. Reste interdite la possibilité de distribuer des contraceptifs à des adolescents sans obligation d´ordonnance médicale. Le texte de la loi a déjà été approuvé par l´Assemblée, où les gauches ont la majorité. Les associations catholiques, qui s´étaient mobilisées contre la révision de la loi, marquent une grosse victoire: elles craignaient surtout que l´utilisation de la stérilisation comme moyen de contrôle de la sexualité des personnes handicapées mentales, déjà en soi un délit contre la dignité et l´intégrité de la personne, n´engendre une série d´abus très graves envers des personnes par définition fragiles et manipulables ». Un sujet que le quotidien reprend en p. 6 sous le titre: « France, non aux stérilisations ».