Les apparitions de Lourdes mettent en lumière « la pédagogie de la Vierge envers Bernadette » : « On a dit que la Vierge s’était faite sa "catéchiste" », souligne Mgr Jacques Perrier, évêque émérite de Lourdes.
Il présente son nouvel ouvrage « Chroniques Mariales. Apparitions de Lourdes et fêtes de la Vierge », publié par ZenitBooks, sur les apparitions de Lourdes et les fêtes mariales de l'année liturgique.
Zenit - Comment est né ce livre ? Quel a été votre "fil rouge" de rédaction ?
Mgr Jacques Perrier - Ce « livre » est, en fait, le recueil de deux séries de chroniques demandées par Zenit. Une des séries est consacrée aux fêtes de Marie au cours de l’année liturgique ; l’autre, aux apparitions de la Vierge de Lourdes. Dans les deux cas, il s’agissait donc de suivre Marie, sans idée préconçue, en laissant chaque fête ou chaque apparition apporter une nouvelle touche.
- Les apparitions de la Vierge à Lourdes ont-elles des liens avec les fêtes liturgiques mariales, comme le laisse entendre votre titre ?
Pour l’essentiel, les apparitions (17 sur 18) se situent entre la veille du Carême et le lendemain de Pâques. Mais deux fêtes mariales font aussi partie du calendrier des apparitions. Tout d’abord, l’Annonciation, le 25 mars. Je sais bien que cette fête est classée comme « fête du Seigneur ». Mais c’est aussi ce jour-là que l’ange désigne Marie comme celle qui est « pleine de grâce », chef d’œuvre de la grâce. Or c’est précisément le 25 mars 1858, à la 16ème apparition, que la Dame finit par donner son nom : « Je suis l’Immaculée Conception. » Et ce seront ses dernières paroles à Lourdes. La toute dernière apparition, le 16 juillet, coïncide avec la fête de Notre-Dame du Mont Carmel. Dans l’Écriture, le Carmel est symbole de beauté. Et Bernadette dit que, ce 16 juillet 1858, jamais la Vierge ne lui avait parue plus belle.
- Est-ce que la rédaction de ces chroniques a mis en relief quelque chose de particulier pour vous ?
La réponse n’est pas la même pour chacune des deux séries. En ce qui concerne les apparitions, il y a longtemps que les chapelains de Lourdes mettent en lumière la pédagogie de la Vierge envers Bernadette. On a dit que la Vierge s’était faite sa « catéchiste ». Entre le 11 février et le 16 juillet, les événements se déroulent selon une certaine logique. La liturgie, au contraire, obéit à une certaine fantaisie, bien que, d’ordinaire, « liturgie » et « fantaisie » ne riment pas ensemble. Toutes les fêtes n’ont pas la même importance ; leurs origines sont diverses ; de même que leurs dates d’entrée dans le cycle liturgique. Il arrive même à certaines d’être rétrogradées comme, hélas, celle de Notre-Dame de Lourdes qui n’est plus qu’une « mémoire facultative ». Heureusement, le pape Jean Paul II en a fait la Journée Mondiale du Malade.
- Quelle est la pointe du message de Lourdes ?
L’originalité radicale de Lourdes, c’est la parole de la Vierge : « Je suis l’Immaculée Conception. » Quatre ans plus tôt, le pape avait proclamé l’Immaculée Conception de la Vierge. A Lourdes, Marie transforme des mots abstraits en son nom propre. A l’époque, les catholiques, le pape et Bernadette les premiers, ont vu dans les apparitions de Lourdes une confirmation du dogme. Cette confirmation était d’autant mieux venue que, quelques années plus tard, en 1870, le pape devenait le « prisonnier du Vatican », dans une Rome militairement annexée au royaume d’Italie. Aujourd’hui, cet aspect historique est moins important. C’est la formulation même qui est riche d’un sens qui reste à découvrir. Que veut dire la Vierge en parlant comme Jésus : « Je suis… » ?
- Quelle est la fête liturgique mariale qui vous touche le plus ?
Désormais, c’est Notre-Dame des Douleurs. En 2008, le pape Benoît XVI est venu à Lourdes, non pas le 8 septembre, date trop proche de la rentrée scolaire, mais les 13, 14 et 15 septembre, jours où la liturgie célèbre la Croix glorieuse et Notre-Dame des Douleurs. Ce jour-là, avant de donner l’onction des malades à un certain nombre de personnes, dont des enfants, le pape a prononcé une homélie très touchante sur le sourire de la Vierge. Une homélie parle, certes, de Dieu. Mais elle dit aussi beaucoup sur celui qui la prononce.
- Vous avez remis votre ouvrage au pape François le 10 février dernier. Est-ce un « prélude » pour son prochain voyage en France et à Lourdes ?
Depuis un siècle, tous les papes étaient venus à Lourdes, sinon comme papes (Jean Paul II et Benoît XVI), du moins comme évêques accompagnant leur diocèse. Le pape François n’a pas cette expérience. La question de son pèlerinage éventuel à Lourdes ne me regarde pas. Mais le cadeau était une manière de lui dire qu’il serait certainement le bienvenu à Lourdes.