Il y a quelques jours, le Saint-Père a rencontré les professeurs et étudiants de l’Institut de théologie Saint-Paul en Sicile. Nous publions ci-dessous le texte du discours qu’il a prononcé dans son intégralité.
Éminence, Excellences, chers frères et sœurs, bonjour et bienvenue !
Je salue le modérateur du Studium Théologique, le directeur du Studium, les enseignants, les fonctionnaires et les étudiants.
Le Studium Théologique San Paolo peut être considéré comme l’un des premiers fruits du Concile Vatican II : il a été fondé en 1969, lorsque les diocèses de la Sicile orientale ont décidé de créer un lieu unique de formation théologique, qui s’est avéré fructueux au fil du temps pour les prêtres, les religieux et les laïcs. Je vous encourage à poursuivre sur cette voie : continuer à marcher ensemble, en offrant une formation large, incisive sur dans la vie ecclésiale et sociale. Avec la Faculté de Théologie de Palerme, à laquelle il est affilié, votre Studium est un un modèle qui stimule également d’autres Églises à marcher ensemble dans ce domaine. En effet, lorsque nous parlons de communion, nous devons également inclure la relation entre les structures de formation, qui deviennent des laboratoires de communion et de mission, inspirées par la réflexion théologique. La récente Assemblée ordinaire du Synode des évêques a souligné la dimension synodale du ministère des théologiens et des institutions théologiques (cf. Document final, 67).
La mission d’un Studium Théologique ne peut ignorer le territoire dans lequel il est situé. C’est ainsi que dans votre parcours académique, vous faites l’expérience de l’ecclésialité, qui vous place les uns à côté des autres, dans la diversité des vocations et des dons et dans la recherche de nouvelles voies d’évangélisation. Il s’agit là aussi d’un signe des temps, à saisir avec sagesse ; c’est un style de coresponsabilité auquel vous êtes « formés » aujourd’hui et qui doit se poursuivre dans la vie de vos Églises, en valorisant les charismes de chaque personne. Au fil des années, le nombre d’étudiantes parmi vous a augmenté, elles sont maintenant intégrées dans vos communautés ecclésiales avec des tâches de responsabilité pastorale, d’enseignement religieux et académique : cela aussi est un signe des temps, dans un domaine où les femmes ont souvent été dévalorisée dans leur rôle social. Mais n’oublions pas que la Sicile est le pays des saintes martyres Agathe et Lucie, qui ont été la « semence » d’une foi robuste, capable de se renouveler et d’engendrer toujours de nouveaux témoins, comme par exemple, à notre époque, les bienheureux Giuseppe Puglisi et Rosario Livatino.
Votre terre possède de merveilleuses beautés naturelles et artistiques, malheureusement -malheureusement- menacées par la spéculation de la Mafia et la corruption, qui entravent le développement et appauvrissent les ressources, condamnant surtout les zones intérieures et provoquant l’émigration des jeunes. La Mafia appauvrit toujours. Toujours. La Sicile a besoin d’hommes et de femmes capables de regarder l’avenir avec espoir et de former de nouvelles générations libres et transparentes dans la prise en charge du bien commun, afin d’affaiblir les anciennes et les nouvelles formes de pauvreté. Je vous regarde, vous les jeunes, et je vous dis : dans le Christ, « nous apprenons à avoir des relations saines et heureuses les uns avec les autres, et à construire dans ce monde le royaume d’amour et de justice de Dieu ». Et travailler pour que les jeunes qui partent étudier reviennent. Que la Sicile ne perde pas son sang jeune qui est parti étudier. « Nos cœurs unis au cœur du Christ, sont capables d’accomplir ce miracle social » (Lettre encyclique Dilexit nos, 28). Sachez que la culture et la formation d’un Studium Théologique sont au service du peuple, des pauvres, des derniers. Sur votre terre, qui a toujours été un carrefour de peuples, beaucoup de migrants débarquent et beaucoup restent et s’intègrent : Je vous exhorte à être accueillants, à être créatifs dans la fraternité. Cet engagement sera plus fructueux si vous savez dialoguer avec les cultures et les religions des autres peuples de la Méditerranée, qui regardent l’avenir avec espoir.
S’il vous plaît, n’éteignons pas l’espérance des pauvres, de ces pauvres que sont les migrants ! Et vous êtes accueillants envers les migrants. Intégrez les migrants. Pour vous aussi, le défi des migrants Musulmans : comment les intégrer et les aider à entrer dans les diocèses.
Votre Studium Théologique a établi une relation fructueuse avec l’Université de Catane, la plus ancienne institution culturelle de Sicile et de nombreux conférenciers participent à des cours sur la littérature chrétienne, le droit et la bioéthique. Cette collaboration est certainement bénéfique pour vous, car elle ouvre vos études et votre avenir à un dialogue, pour mieux comprendre le monde dans lequel vous vivez et pour inculturer la foi. D’autre part, elle offre une contribution fructueuse à la culture de votre peuple, marquée par le caractère tragique de certaines expériences de vie. Je pense aux grands de la littérature sicilienne, en particulier à Verga, qui peuple ses romans de « perdants », résignés à la douleur et à la pauvreté. Un film me vient à l’esprit qui vous reflète bien : « Kaos ». Je l’ai vu trois fois, parce que je devais aussi l’enseigner. Mais il vous reflète bien avec votre culture. En dialogue avec cette culture, qui s’exprime dans tant de manières de vivre et de penser, sachez apporter l’espoir et l’engagement, sachez « abonder dans l’espérance ». Ne jamais abonder dans la plainte, dans la résignation, non… Se plaindre, c’est le propre des gens qui n’ont pas de courage. Non, allez de l’avant avec espoir, et soyez missionnaires de l’espérance. Continuez, soyez courageux !
Frères et sœurs, nous célébrons aujourd’hui la mémoire liturgique de saint Nicolas, un saint qui unit l’Orient et l’Occident, un pasteur de l’Église qui nous rappelle le Concile de Nicée, auquel il a participé et où il s’est consacré à la défense de la foi en la divinité du Christ. Je vous prie également de tenir compte de l’appel que j’ai lancé en vue de l’anniversaire du Concile de Nicée, afin qu’il représente « un appel à toutes les Églises et Communautés ecclésiales à persévérer sur le chemin de l’unité visible » (Bulle Spes non confundit, 17). Ne nous lassons pas, essayons de chercher les formes adéquates pour répondre pleinement à la prière de Jésus « pour que tous soient un » (Jn 17,21).
Que la Vierge Hodegetria, patronne de la Sicile, accompagne toujours votre voyage. Je vous bénis de tout cœur. Et s’il vous plaît, priez pour moi ! Je vous remercie.