Voici « le temps de choisir ce qui compte et ce qui passe, de séparer ce qui est nécessaire de ce qui ne l’est pas »: ces paroles du pape François le 27 mars 2020, Place Saint-Pierre, sont rappelées par Mgr Duffé qui a présenté document commun à plusieurs dicastères : “En chemin pour le soin de la maison commune – Laudato si’ cinq ans après”. Il a insisté sur la mise en oeuvre de l’encyclique au niveau « local ».
Il relance concrètement la « conversion écologique » cinq ans après la parution de l’encyclique sociale et écologique du pape François, Laudato si’ (24 mai 2015).
Mgr Bruno-Marie Duffé, secrétaire du Dicastère pour le service du développement humain intégral, a insisté, dans son intervention orale sur la promotion du développement au niveau « local »: « Pour accomplir ce chemin, nous sommes appelés à revisiter les lieux de notre activité humaine : le rapport avec les éléments (l’eau, la terre et les océans), la biodiversité, le travail, l’économie, la finance, la vie des communautés locales et la planète : le local et le global. Il s’agit d’oser un développement intégral qui s’inspire de l’écologie intégrale : cette nouvelle harmonie avec la terre, avec les autres et avec soi-même. Ce chemin est en effet un chemin pour la vie et l’avenir de la vie, qui engage chaque personne et chaque communauté. »
Cette feuille de route pour la mise en oeuvre de l’écologie intégrale a été présenté au Vatican ce 18 juin 2020, par Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire pour les relations avec les Etats , Mgr Fernando Vérgez Alzaga, secrétaire général du Gouvernorat du Vatican, par Mgr Angelo Vincenzo Zani, secrétaire de la Congrégation pour l’éducation catholique, Mgr Bruno-Marie Duffé, secrétaire du Dicastère pour le service du développement humain intégral, ainsi que M. Aloysius John, secrétaire général de Caritas Internationalis et M. Tomás Insua, con-fondateur du Mouvement catholique mondial pour le climat.
Voici le texte original en français de Mgr Duffé, lu en espagnol lors de la conférence de presse.
AB
Intervention de Mgr Duffé
Pour introduire brièvement au Document qui nous réunit aujourd’hui, j’attirerai l’attention sur le titre qui évoque le chemin que nous sommes appelés à parcourir ensemble pour prendre soin de la terre et prendre soin des personnes. Je me limiterai à trois réflexions essentielles.
1. La première réflexion inscrit cette publication dans un contexte particulier : celui d’une crise sanitaire et sociale qui amplifie la crise écologique et morale, mise en lumière par l’Encyclique Laudato si’. Nous faisons en effet l’expérience de la fragilité, dans notre corps comme dans nos liens, dans nos pratiques de soin, dans nos manières de penser et de vivre le développement économique et social. Cette expérience de la vulnérabilité produit inévitablement de la peur et de l’inquiétude devant l’avenir. L’appel de l’Encyclique Laudato si’ à « écouter le cri de la terre et le cri des pauvres » ne vise pas à amplifier la peur mais à proposer un chemin de conversion. Nous le savons, ce chemin n’existe que par ceux qui le parcourent. Aujourd’hui Laudato si’ ne peut produire des fruits de conversion que si des témoins continuent le chemin qui a été ouvert par cette Lettre. « Témoins » veut dire « ceux qui transmettent », « ceux qui proposent », « ceux qui décident et se décident à agir ».
Qui sont ces témoins ? Ce sont les acteurs de la vie économique et politique ; ce sont les communautés locales, avec leur mémoire et leurs espoirs, ce sont les églises ; ce sont les jeunes aussi bien que les anciens car, comme le dit le Pape François, dans son Exhortation Christus vivit, pour que les jeunes puissent rêver le monde de demain, il faut que les anciens continuent de rêver aussi le monde d’aujourd’hui. Nous avons besoin d’éclairer les chemins pratiques de mise en œuvre de Laudato si’. C’est à cette pédagogie que le Document « En chemin pour la sauvegarde de la maison commune. 5 ans après Laudato si’ » entend contribuer.
2. L’expérience que nous vivons quotidiennement au sein du Dicastère pour le service du Développement Humain Intégral nous montre que le plan et la construction de l’Encyclique Laudato si’ proposent, en eux-mêmes, une démarche. Il s’agit avant tout de poser un regard sur le monde dans lequel nous vivons – et dans lequel certains « survivent ».
Regarder, écouter et se laisser toucher par ce que nous vivons et ceux avec qui nous vivons. Regarder et se laisser toucher par une terre qui souffre en silence et dont la souffrance est directement liée à l’activité humaine ainsi qu’au dérèglement climatique que cette activité induit.
Rencontrer une communauté humaine blessée par des inégalités croissantes et une conflictualité de plus en plus forte.
Contempler la beauté et la promesse de ce qui nous a été confié dans la Création du Père et dans l’amour du Christ.
Agir et décider en faveur d’un autre développement qui ne se définisse plus comme un « toujours plus » et une « fuite en avant » épuisant toutes les formes de la vie.
Eduquer par le dialogue et par les pratiques quotidiennes de la sobriété. L’exposé de quelques « bonnes pratiques » sont là pour éveiller d’autres initiatives éducatives et communautaires. Je pense ici à la démarche de jeunes en Argentine (« Cuidadores de la casa común ») ou en Afrique (avec la CYNESA).
Célébrer enfin, c’est-à-dire faire mémoire de la promesse inscrite en chacun, avec ses talents et ses expériences. Et offrir ce que nous avons partagé : nos peines et la joie simple mais forte de la solidarité.
Pour accomplir ce chemin, nous sommes appelés à revisiter les lieux de notre activité humaine : le rapport avec les éléments (l’eau, la terre et les océans), la biodiversité, le travail, l’économie, la finance, la vie des communautés locales et la planète : le local et le global. Il s’agit d’oser un développement intégral qui s’inspire de l’écologie intégrale : cette nouvelle harmonie avec la terre, avec les autres et avec soi-même. Ce chemin est en effet un chemin pour la vie et l’avenir de la vie, qui engage chaque personne et chaque communauté « et jusqu’à la communauté humaine tout entière » (Paul VI, Populorum progressio, 1967). Comment vivre ce que nous annonçons, lorsque nous parlons de dignité, de responsabilité partagée, de bien commun et de priorité pour les pauvres (ces principes qui composent la « Doctrine sociale de l’Eglise »)
3. Dans l’introduction du Document « En chemin pour le soin de la maison commune », nous sommes invités à garder à l’esprit la prière prononcée par le Pape François, le 27 mars 2020, pour implorer la fin de la pandémie. « Ce n’est pas, Seigneur, le moment de ton jugement, mais de notre jugement : le temps de choisir ce qui compte et ce qui passe, de séparer ce qui est nécessaire de ce qui ne l’est pas. Il est temps de redresser le cours de la vie vers Toi, Seigneur, et vers les autres. Et nous pouvons regarder les nombreux compagnons de voyages exemplaires qui, dans la peur, ont réagi en donnant leur vie ».
Ce guide ne dispense évidemment pas de lire l’Encyclique Laudato si’ qui demeure la source d’inspiration et d’initiative.
Laudato si’ est un chemin pour les acteurs du futur. Il importe de soutenir les compagnons de voyage : c’est bien le sens de ce document qui se veut une catéchèse déployée de la conversion à l’écologie intégrale.
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