C’est une véritable petite charte du disciple-missionnaire que le pape François a proposée au XIIe Chapitre Général des Petites sœurs missionnaires de la charité de don Orione dont il a reçu les participants vendredi 26 mai 2017 au Vatican.
Le pape François leur a proposé notamment le mystère de la Visitation de Marie, que l’Eglise célèbre le 31 mai, comme l’icône de leur charisme.
Les Petites sœurs missionnaires de la charité ont été fondées par saint Luigi Orione (1872-1940), le 29 juin 1915. Il leur joignit les Soeurs adoratrices Sacramentines (pour accueillir des non-voyantes), auxquelles s’ajoutèrent par la suite les Contemplatives de Jésus crucifié. Il a été canonisé à Rome par saint Jean-Paul II le 16 mai 2004.
Voici notre traduction intégrale de l’allocution du pape François, prononcée en italien.
AB
Discours du pape François
Chères sœurs,
Je vous remercie de cette visite à l’occasion de votre Chapitre Général. Je salue en particulier la Supérieure Générale et le Conseiller. Par votre intermédiaire je salue toutes les sœurs de l’Institution, spécialement celles qui sont les plus faibles et malades. Je salue également les Contemplatives de Jésus Crucifié et les Sacramentines non-voyantes.
Fondé par Don Orione, votre Institut est appelé à exercer la charité envers le prochain, en particulier envers les plus pauvres, les abandonnés et les exclus, ainsi que l’exprime si bien le thème que vous avez choisi pour ce Chapitre Général : « Se donner toutes à Dieu afin d’être toutes au prochain. Petites Sœurs Missionnaires de la Charité : disciples missionnaires, témoins joyeuses de la Charité dans les périphéries du monde ». Au nom de l’Église et de tous les pauvres, de manière toute spéciale les femmes et les enfants, et de tant de malades physiques et psychiques que vous assistez je vous remercie pour votre travail apostolique dans les différentes activités de pastorale des jeunes, dans les écoles, dans les maisons de personnes âgées, dans les petits « Cottolengo », dans les catéchèses et dans les patronages, avec les nouvelles pauvretés et dans tous les lieux où la Providence Divine vous a placées.
Vous vous appelez et vous êtes par vocation « missionnaires », c’est-à-dire évangélisatrices, et en même temps vous êtes au service des pauvres. Sœurs, soyez des missionnaires sans frontières. A tous, mais spécialement aux pauvres, au milieu desquels vous êtes appelées à reconnaître la chair du Christ, apportez la joie de l’Évangile qui est Jésus lui-même. A tous, montrez la beauté de l’amour de Dieu qui se manifeste dans le visage miséricordieux du Christ. Avec cette beauté remplissez le cœur de ceux que vous rencontrez. Que la proximité, la rencontre, le dialogue et l’accompagnement soient vos méthodes missionnaires. Ne vous laissez pas voler la joie de l’évangélisation.
La mission et le service des pauvres vous mettent « en sortie » et vous aident à dépasser les risques de l’auto-référence, de se limiter à survivre et de la rigidité de l’auto-défense (cf. Exhort. ap. Evangelii gaudium, 27,75). La mission et le service vous font assumer la dynamique de l’exode et du don, du sortir de vous-mêmes, de marcher et de semer ; ainsi que la conversion pastorale afin que toutes les structures soient évangélisatrices et au service du charisme (cf. Ibid, 21,53,131). Pour tous ces objectifs, il est fondamental de cultiver la communion avec le Seigneur, sachant que votre intimité avec Lui « une intimité itinérante, (que) la communion se présente essentiellement comme une communion missionnaire » (Ibib, 23) : non figée. Dans la prière, dans la communion.
Dans l’Église, la mission naît de la rencontre avec le Christ (cf. Ph 3,12-16). Maintenant l’Envoyé du Père nous envoie, nous. C’est lui qui nous appelle et nous envoie. Le centre de la mission de l’Église c’est Jésus. En tant que ses disciples, vous êtes appelées à être des femmes qui travaillent assidûment pour se transcender, se projetant vers la rencontre avec le Maître et avec la culture dans laquelle vous vivez.
Il est demandé au missionnaire d’être une personne audacieuse et créative. Le critère bien commode du « on a toujours fait comme cela », n’est pas valable. Il n’est pas valable. Repensez aux objectifs, aux structures, au style et aux méthodes de votre mission (cf. EG, 33). Nous sommes en train de vivre une époque où il est nécessaire de tout repenser à la lumière de ce que nous demande l’Esprit. Ceci exige un regard spécial sur les destinataires de notre mission et sur la réalité elle-même : le regard de Jésus qui est le regard du Bon Pasteur ; un regard qui ne juge pas, mais scrute la présence du Seigneur dans l’histoire ; un regard de proximité pour contempler, s’émouvoir et rester avec l’autre à chaque fois que c’est nécessaire ; un regard profond de foi ; un regard respectueux et plein de compassion, qui guérisse, libère, conforte. Ce regard particulier vous rendra courageuses et créatives et vous aidera à être toujours à la recherche de chemins nouveaux pour vous faire parvenir à tous la Bonne Nouvelle qui est le Christ.
Au missionnaire il est aussi demandé d’être une personne libre, qui vit sans rien qui ne lui soit propre. Je ne me lasse pas de répéter que la facilité, l’acédie, et la mondanité sont des forces qui empêchent le missionnaire de « sortir », de « partir » et de se mettre en chemin et, en définitive, partager le don de l’Évangile. Le missionnaire ne peut pas se mettre en chemin avec le cœur plein de choses (facilité), avec le cœur vide (acédie) ou à la recherche de choses étrangères à la Gloire de Dieu (mondanité). Le missionnaire est une personne libre de tous ces poids et de ces chaînes ; une personne qui vit sans rien à elle, seulement pour le Seigneur et pour son Évangile ; une personne qui vit sur un chemin de conversion personnelle constante et qui travaille sans relâche à la conversion pastorale.
Au missionnaire on demande d’être une personne habitée de l’Esprit Saint. C’est l’Esprit qui rappelle aux disciples tout ce que Jésus a dit (cf. Jn 14,16), qui les enseigne (cf. Jn 16,14-15), qui rend témoignage à Jésus et conduit les disciples à lui rendre témoignage à leur tour (cf. Jn 15,26-27). Ce qu’on demande au missionnaire c’est qu’il soit une personne docile à l’Esprit, qui favorise son mouvement, le « vent » qui pousse vers les endroits les plus impensables pour y annoncer l’Évangile. Une telle docilité est appelée à grandir continuellement, pour devenir capable d’apporter la présence de Jésus à tant de personnes écartées de la société. Même vous, chères sœurs, soyez en ce sens des personnes spirituelles, en vous laissant conduire, pousser et guider par l’Esprit.
Au missionnaire on demande qu’il ait une spiritualité fondée sur le Christ, sur la parole de Dieu, sur la liturgie. Une spiritualité « holistique », qui implique toute la personne dans ses différentes dimensions, basée sur la complémentarité, sur l’intégration et sur l’inclusion. Elle vous permet d’être filles du ciel et filles de la terre, mystiques et prophétiques, disciples et témoins en même temps.
Enfin, au missionnaire on demande d’être des prophètes de la miséricorde. L’Année de la Vie Consacrée s’est conclue pendant que commençait le Jubilé extraordinaire de la Miséricorde. Ce chemin nous a appelé à nettoyer nos yeux et nos cœurs de l’indifférence pour accueillir et offrir au monde, avec humilité, comme des serviteurs, la prophétie de la miséricorde, à l’image de Dieu le Père. Votre charisme de servantes des pauvres exige de vous d’exercer la prophétie de la miséricorde, c’est-à-dire d’être des personnes centrées sur Dieu et sur les crucifiés de ce monde. Laissez-vous provoquer par l’appel à l’aide de tant de situations de douleur et de souffrance. En tant que prophètes de miséricorde, annoncez le pardon et l’embrassement du père, source de joie, de sérénité et de paix (cf. Misericordiae Vultus, 2).
Ensemble avec les autres Instituts et mouvements fondés par Don Orione, vous formez une famille. Je vous encourage à parcourir les routes de la collaboration entre toutes les composantes de cette riche famille charismatique. Dans l’Église, personne ne marche « en solitaire ». Cultivez entre vous l’esprit de rencontre, l’esprit de famille et de coopération.
Je conclus en vous proposant l’icône de la Visitation comme exemple pour votre mission et pour votre service aux pauvres. Comme la Vierge Marie, mettez-vous en chemin, en hâte – pas la hâte du monde, mais celle de Dieu – et pleine de la joie qui habite votre cœur chantez votre Magnificat. Chantez l’amour de Dieu pour chaque créature. Annoncez aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui que Dieu est amour et qu’il peut combler de signification le cœur de celui qui le chercher et se laisse rencontrer par lui.
© Traduction de ZENIT, Hugues de Warren
Petites soeurs de don Orione, audience du 26 mai 2017, facebook
Petite charte du disciple-missionnaire (traduction complète)
Chapitre des Petites sœurs missionnaires de la charité de don Orione