« Aujourd’hui, écrit le pape François au patriarche oecuménique Bartholomée Ier, dans notre action de grâce au Dieu d’amour, en obéissance à la volonté de notre Seigneur Jésus-Christ et dans la fidélité à l’enseignement des apôtres, nous reconnaissant combien il est urgent de grandir vers la pleine et visible communion ».
Le pape François a adressé un message à Bartholomée Ier, patriarche œcuménique de Constantinople, pour la fête de saint André, le 30 novembre 2017. Dans le cadre du traditionnel échange de délégations pour les fêtes de leurs saints patrons respectifs – le 29 juin à Rome pour la célébration des saints Pierre et Paul et le 30 novembre à Istanbul pour la célébration de saint André – c’est le cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, qui guide la délégation du Saint-Siège pour la fête à Istanbul (Turquie).
Le cardinal est accompagné de Mgr Brian Farrell, secrétaire du dicastère, de Mgr Andrea Palmieri, sous-secrétaire et du nonce apostolique en Turquie, Mgr Paul F. Russell. La délégation du Saint-Siège a pris part à la liturgie solennelle présidée par Bartholomée Ier dans l’église patriarcale Saint Georges au Phanar et a eu une rencontre avec le patriarche et des conversations avec la commission synodale chargée des relations avec l’Église catholique.
Évoquant « le consensus auquel sont parvenus les catholiques et les orthodoxes « sur certains principes théologiques fondamentaux régulant la relation entre primauté et synodalité dans la vie de l’Église », le pape estime que le temps est venu « d’envisager une manière commune de comprendre l’exercice du ministère de l’évêque de Rome, dans le cadre de la synodalité et au service de la communion de l’Église dans le contexte actuel ».
Le cardinal Koch a remis au patriarche œcuménique ce message autographe du pape François, dont il a donné la lecture publiquement à l’issue de la liturgie. Voici notre traduction :
HG
À Sa Sainteté Bartholomée, archevêque de Constantinople, patriarche oecuménique
Bien qu’absent de Rome, pour ma visite pastorale au Myanmar et au Bangladesh, je désire adresser mes meilleurs vœux fraternels à Sa Sainteté et au membres du Saint Synode, au clergé, aux moines et à tous les fidèles réunis pour la divine liturgie dans l’église patriarcale Saint-Georges, pour la commémoration liturgique de l’apôtre saint André, frère de Simon-Pierre et premier appelé parmi les apôtres, le saint patron de l’Église de Constantinople et du patriarcat œcuménique. Lorsque le diacre invite ceux qui sont réunis pendant la divine liturgie à prier « pour ceux qui voyagent sur terre, par mer et dans les airs », je vous demande, s’il vous plaît, de prier aussi pour moi.
La délégation que j’ai envoyée est un signe de ma solidarité spirituelle avec votre prière d’action de grâces et de louange pour tout ce que notre Dieu tout-puissant et miséricordieux a accompli à travers le témoignage de l’apôtre André. De même, la délégation du patriarcat œcuménique accueillie à Rome, en juin dernier, nous a manifesté sa proximité spirituelle tandis que nous célébrions les faits merveilleux que Dieu, source de tout bien, a accompli à travers les apôtres Pierre et Paul, saints patrons de l’Église de Rome.
Les apôtres ont proclamé jusqu’au bout de la terre, par leurs paroles et par le sacrifice de leur vie, ce qu’ils avaient eux-mêmes vu, entendu et expérimenté – la Parole de Vie, notre Seigneur Jésus-Christ, mort et ressuscité pour notre salut. Faire nôtre cette proclamation nous permet d’entrer en communion avec le Père, par le Fils, dans l’Esprit-Saint, qui est le véritable fondement de la communion qui unit déjà ceux qui sont baptisés dans la Très Sainte Trinité (cf. 1 Jn, 1, 1-3). Catholiques et orthodoxes, en professant ensemble les dogmes des sept premiers Conciles œcuméniques, en croyant dans l’efficacité de l’Eucharistie et des autres sacrements et en conservant la succession apostolique du ministère des évêques, expérimentent déjà une profonde proximité les uns avec les autres (cf. Unitatis redintegratio, 15). Aujourd’hui, dans notre action de grâce au Dieu d’amour, en obéissance à la volonté de notre Seigneur Jésus-Christ et dans la fidélité à l’enseignement des apôtres, nous reconnaissons combien il est urgent de grandir vers la pleine et visible communion.
C’est une source de joie d’apprendre qu’à la veille de la fête de saint André, lors d’une rencontre à laquelle Votre Sainteté a participé, le cinquantième anniversaire de la visite du pape Paul VI au Phanar, le 25 juillet 1967 a été commémoré. Ce moment de communion historique entre les pasteurs de l’Église de Rome et l’Église de Constantinople, rappelle les paroles prononcées par le patriarche Athénagoras en accueillant le pape Paul VI dans l’Église patriarcale Saint-Georges, où vous êtes rassemblés aujourd’hui. Je crois que ces paroles peuvent continuer d’inspirer le dialogue entre nos Églises : « Joignons ce qui était divisé, lorsque c’est possible, par des actes où les deux Églises sont impliquées, en donnant davantage de force aux questions de foi et à la discipline canonique que nous avons en commun. Menons le dialogue théologique selon le principe [de] la pleine communauté dans les fondamentaux de la foi, la liberté dans la pensée théologique, lorsque c’est pieux et édifiant et inspiré par le corps principal des Pères, et dans la variété des coutumes locales, comme cela a été encouragé par l’Église depuis le début » (Tomos Agapis, Vatican-Phanar (1958-1970), pp. 382-383).
J’exprime à Votre Sainteté ma sincère gratitude pour la généreuse et chaleureuse hospitalité offerte par le métropolite de Leros du patriarcat œcuménique, sous la responsabilité pastorale de Son Éminence Paisios, aux membres du Comité de coordination de la Commission internationale conjointe pour le dialogue théologique entre l’Église catholique et l’Église orthodoxe. Je désire encourager à nouveau ce dialogue théologique. Le consensus auquel sont parvenus les catholiques et les orthodoxes sur certains principes théologiques fondamentaux régulant la relation entre primauté et synodalité dans la vie de l’Église dans le premier millénaire peut servir pour évaluer, même de manière critique, certaines catégories et pratiques théologiques qui ont évolué pendant le second millénaire, en conformité avec ces principes. Un tel consensus peut nous permettre d’envisager une manière commune de comprendre l’exercice du ministère de l’évêque de Rome, dans le cadre de la synodalité et au service de la communion de l’Église dans le contexte actuel. Cette tâche délicate doit être poursuivie dans une atmosphère d’ouverture mutuelle et, par-dessus tout, dans l’obéissance aux exigences de l’Esprit-Saint à l’égard de l’Église.
Sainteté, frère aimé dans le Christ, ces derniers mois, j’ai suivi avec un grand intérêt votre participation à des événements internationaux importants, qui se sont tenus à travers le monde au sujet de la protection de la création, de la coexistence pacifique entre les peuples de cultures et de traditions religieuses différentes, et de la présence des chrétiens au Moyen-Orient. L’engagement de Votre Sainteté est une source d’inspiration, de soutien et d’encouragement pour moi personnellement car, comme vous le savez bien, nous partageons ces mêmes préoccupations. J’espère ardemment que catholiques et orthodoxes pourront promouvoir des initiatives conjointes au niveau local, concernant ces problèmes, car il y a de nombreux contextes dans lesquels orthodoxes et catholiques peuvent déjà travailler ensemble sans attendre le jour de la pleine et visible communion.
Avec l’assurance de mon souvenir constant dans la prière et avec des sentiments de chaleureuse affection, j’échange avec Votre Sainteté un baiser de paix fraternel.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat