Le Saint-Siège estime que l’élimination totale des armes nucléaires est « un impératif moral et humanitaire ». C’est ce qu’a déclaré Mgr Auza, observateur permanent du Saint-Siège aux Nations Unies à la réunion plénière de haut niveau pour promouvoir la « Journée internationale pour l’élimination totale des armes nucléaires », à New York, le 26 septembre 2016.
« Les traités de désarmement ne sont pas simplement des obligations juridiques, a-t-il souligné, ce sont aussi des engagements moraux fondés sur la confiance entre les États et enracinés dans la confiance que les citoyens placent dans leurs gouvernements. »
Mgr Auza a rappelé que « l’abolition des armes nucléaires » était une nécessité « pour notre propre bien et celui des générations futures » : « Une paix durable exige donc que tous œuvrent pour un désarmement nucléaire progressif et concerté ». Il a mis en garde aussi contre « le danger réel et présent » que les armes nucléaires « tombent entre les mains de groupes terroristes extrémistes et d’autres acteurs non étatiques violents ».
MD
Déclaration de Mgr Auza
Monsieur le Président,
Le Saint-Siège espère vivement que cette commémoration annuelle de la Journée internationale pour l’élimination totale des armes nucléaires contribuera à sortir de l’impasse qui a entravé le processus de désarmement de l’Organisation des Nations Unies depuis beaucoup trop longtemps maintenant.
En février 1943, deux ans et demi avant l’essai Trinity, le pape Pie XII avait déjà exprimé sa profonde préoccupation concernant l’utilisation violente de l’énergie atomique. Après Hiroshima et Nagasaki et compte tenu des conséquences totalement incontrôlables et aveugles des armes nucléaires, le pape Pie XII a exigé la proscription et le bannissement effectifs de la guerre atomique, appelant la course aux armements une relation coûteuse de terreur mutuelle. Le Saint-Siège a maintenu cette position depuis l’avènement des armes nucléaires.
Ma délégation estime que les armes nucléaires offrent un faux sentiment de sécurité, et que la paix précaire promise par la dissuasion nucléaire est une illusion tragique. Les armes nucléaires ne peuvent pas créer pour nous un monde stable et sûr. La paix et la stabilité internationales ne peuvent être fondées sur la destruction mutuelle assurée ni sur la menace d’un anéantissement total. Le Saint-Siège estime que la paix ne peut pas être uniquement le maintien d’un équilibre du pouvoir. Au contraire, comme l’a affirmé le pape François : « La paix doit être construite sur la justice, le développement socio-économique, la liberté, le respect des droits de l’homme, la participation de tous aux affaires publiques et le renforcement de la confiance entre les peuples ».
Une paix durable exige donc que tous œuvrent pour un désarmement nucléaire progressif et concerté.
Le Saint-Siège a été une des parties au Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP) depuis le début, afin d’encourager les États possédant le nucléaire à abolir les armes nucléaires, pour dissuader les États ne possédant pas le nucléaire d’acquérir ou de développer des capacités nucléaires, et pour encourager la coopération internationale sur les utilisations pacifiques de matières nucléaires. Tout en croyant fermement que le TNP demeure vital pour la paix et la sécurité et regrettant profondément notre échec collectif à aller de l’avant avec un programme de désarmement international positif, le Saint-Siège continuera de s’affirmer contre à la fois la possession et l’utilisation des armes nucléaires, jusqu’à ce que l’élimination totale des armes nucléaires soit atteinte.
En effet, le Saint-Siège considère que c’est un impératif moral et humanitaire de faire avancer les efforts en vue de l’objectif final de l’élimination totale des armes nucléaires. Les traités de désarmement ne sont pas simplement des obligations juridiques ; ce sont aussi des engagements moraux fondés sur la confiance entre les États et enracinés dans la confiance que les citoyens placent dans leurs gouvernements. Si les engagements en faveur du désarmement nucléaire ne sont pas pris de bonne foi et entraînent par conséquent des abus de confiance, la prolifération de ces armes sera le corollaire logique.
Pour notre propre bien et celui des générations futures, nous n’avons aucune option raisonnable ou morale autre que l’abolition des armes nucléaires. Les armes nucléaires sont un problème mondial et elles ont un impact sur tous les pays et tous les peuples, y compris les générations futures. L’interdépendance croissante et la mondialisation exigent que toute réponse que nous apportons à la menace des armes nucléaires soit collective et concertée, basée sur la confiance réciproque, et dans un cadre de désarmement général et complet, comme le requiert l’art.VI du TNP. De plus, il y a le danger réel et présent que les armes nucléaires et autres armes de destruction massive tombent entre les mains de groupes terroristes extrémistes et d’autres acteurs non étatiques violents.
L’Agenda 2030 pour le développement durable fait appel à nous tous afin que nous nous lancions dans la mise en œuvre de cette ambition de taille qui consiste à améliorer la vie de tous, en particulier ceux qui ont été et qui sont à la traîne. Il serait naïf et myope de chercher à assurer la paix et la sécurité dans le monde par les armes nucléaires plutôt que par l’éradication de l’extrême pauvreté, l’augmentation de l’accessibilité aux soins de santé et à l’éducation, et la promotion d’institutions et de sociétés pacifiques à travers le dialogue et la solidarité.
Monsieur le Président,
Personne ne pourra jamais dire qu’un monde sans armes nucléaires est facilement réalisable. Ce ne l’est pas; c’est extrêmement difficile; pour certains, cela peut même sembler utopique. Mais il n’y a pas d’autre alternative que de travailler sans relâche à sa réalisation.
Permettez-moi de conclure en réaffirmant la conviction que le pape François a exprimée dans son message au Président de la Conférence de Vienne de décembre 2014, sur l’impact humanitaire des armes nucléaires : « Je suis convaincu que le désir de paix et de fraternité planté profondément dans le cœur humain portera du fruit de manière concrète afin de garantir que les armes nucléaires seront interdites une fois pour toutes, dans l’intérêt de notre maison commune.
© Traduction de Zenit, Constance Roques