Le dialogue « vers la pleine unité » des chrétiens, le témoignage et le service commun sont des « réponses » qui sont dues aux chrétiens persécutés, a affirmé le pape François en recevant le révérend Derek Browning, modérateur de l’assemblée de l’Église réformée d’Écosse, accompagné d’une délégation, ce jeudi matin, 26 octobre 2017, au Vatican. « Leur témoignage nous impose d’avancer, avec amour et courage, jusqu’à la fin », a-t-il insisté.
« Comment pouvons-nous annoncer le Dieu d’amour (cf. 1 Jn 4,8) si nous ne nous aimons pas entre nous ? … L’annonce et la mission ne sont pas pleinement crédibles si elles ne sont pas accompagnées de l’unité », a-t-il souligné.
Dans un tweet publié après l’audience, le révérend Browning a rendu hommage au pape comme « un homme chaleureux et de sincérité ». « Nous avons prié ensemble », ajoute-t-il en saluant « un honneur et un privilège ».
Le pape avait déjà reçu en 2015 un ancien modérateur, le révérend John P. Chalmers. Voici notre traduction du discours du pape François.
Discours du pape François
Cher frère Modérateur,
Chers frères et sœurs en Christ,
Je vous accueille avec joie et je remercie le Modérateur pour son intervention significative ainsi que pour notre rencontre. Votre présence m’offre l’occasion de transmettre mes salutations chaleureuses à tous les membres de l’Eglise d’Ecosse.
Notre rencontre a lieu à proximité du cinquième centenaire de la Réforme, dont je me suis uni à la commémoration à Lund il y a un an. Remercions le Seigneur pour le grand don d’être parvenus à vivre cette année en vrais frères, non plus en rivaux, après trop de siècles d’étrangéité et de conflit. Cela a été rendu possible, grâce à Dieu, par le chemin œcuménique, qui a permis l’intensification de la compréhension, de la confiance et de la collaboration concrète entre nous. La purification réciproque de la mémoire est l’un des fruits les plus significatifs de ce chemin qui nous rapproche. S’il est vrai que le passé en soi est inaltérable, il est aussi vrai qu’aujourd’hui nous nous comprenons finalement à partir du regard de Dieu sur nous : nous sommes d’abord ses enfants, re-nés en Christ par le même Baptême, et donc frères. Durant si longtemps, nous nous sommes observés à distance avec un regard “trop humain”, en nourrissant des soupçons, avec la perspective concentrée sur les différences et les erreurs et le cœur tendu vers la récrimination vis-à-vis des torts subis.
Dans l’esprit de l’Evangile, nous poursuivons désormais sur le chemin de la charité humble qui conduit au dépassement des divisions et à la guérison des blessures. Nous sommes entrés dans un dialogue de communion, un dialogue qui épouse le langage de celui qui appartient à Dieu et qui est la condition indispensable pour l’évangélisation : comment pouvons-nous annoncer Dieu d’amour (cf. 1 Jn 4,8) si nous ne nous aimons pas entre nous ? En Ecosse, à Edimbourg, il y a plus de cent ans, des missionnaires chrétiens ont eu l’audace de reproposer avec un élan renouvelé la volonté vibrante de Jésus que nous soyons « un… pour que le monde croie » (Jn 17,21). Ils avaient compris que l’annonce et la mission ne sont pas pleinement crédibles si elles ne sont pas accompagnées de l’unité. C’est toujours vrai, aujourd’hui comme alors.
J’ai appris que sur l’emblème de l’Eglise d’Ecosse est représenté le buisson ardent, en présence duquel Moïse fit l’expérience du Dieu vivant. Je suis touché par le fait que dans ce texte biblique fondamental le Seigneur se définisse avec un nom qui durera dans les siècles, « Dieu de vos pères » (Ex 3,15). De cette façon, Il nous appelle nous aussi à entrer, en enfants et frères, dans une histoire de relations qui nous précède, à accueillir la vie de foi non pas de façon isolée et abstraite, mais dans le cadre d’une communauté concrète, d’un “nous”, parce que personne ne devient chrétien par lui-même et personne ne peut vivre en chrétien sans les autres. Nous appartenons à la famille des croyants, de tant de frères et sœurs qui ont commencé à marcher dans une vie nouvelle par le Baptême (cf. Rm 6,4) et qui nous accompagnent sur cette route.
Je pense, en particulier, aux chrétiens qui aujourd’hui rencontrent de graves épreuves, parce qu’ils souffrent et sont persécutés pour le nom de Jésus. Ils confessent la foi, jusqu’au martyr, ils sont si nombreux à porter une lourde croix. Leur témoignage nous impose d’avancer, avec amour et courage, jusqu’à la fin. Notre dialogue tendu vers la pleine unité, notre témoignage et notre service commun, notre engagement à prier les uns pour les autres et à dépasser les blessures du passé, sont des réponses qui leur sont dues aussi à eux, au sein de ce grand “nous” de la foi.
Je prie et j’espère que le chemin vers l’unité visible continue chaque jour et porte de riches fruits à l’avenir, comme dans le passé récent. L’Eglise catholique, qui, en particulier à travers le Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, poursuit depuis des décennies une collaboration féconde avec l’Eglise d’Ecosse et avec la Communion Mondiale des Eglises réformées, désire continuer à avancer ensemble. Avec gratitude pour votre présence ici et sur le chemin œcuménique, je demande à l’Esprit Saint de renforcer notre communion dans le Christ Jésus, à la gloire de Dieu le Père. Et nous pouvons nous adresser à Lui ensemble dans la prière les uns pour les autres : “Notre Père…”.
Traduction de Zenit, Anne Kurian
Révérend Derek Browning, Eglise d'Ecosse © L'Osservatore Romano
Eglise d’Ecosse: le dialogue œcuménique est une réponse due aux martyrs
Le pape reçoit le Rév. Browning (Traduction intégrale)