Hermine Speier ( 1898-1989), réfugiée juive allemande, embauchée par les Musées du Vatican après l’arrivée d’Hitler au pouvoir, est aussi la première femme embauchée par cette institution : les 41 carnets relatant sa vie viennent d’être remis au Vatican, indique Vatican News.
Ce sont les descendants du professeur Bartolomeo Nogara, directeur des Musées du Vatican de 1920 à 1954, qui ont remis ces documents précieux au Vatican.
Le professeur Nogara a embauché Hermine Speier aux archives photographiques du musée pontifical. Et c’est le pape Pie XI qui a signé son contrat en 1934, ce qui a fait d’elle la première femme à occuper un poste au sein de l’institution culturelle du Saint-Siège.
Son bras droit, le cardinal Eugenio Pacelli et son successeur, sous le nom de Pie XII, confirmera la nomination de Hermine Speier, à la barbe de l’occupant nazi : elle sera cachée parmi les moniales du monastère Sainte-Cécile au Transtévère. Elle reprendra son service à la fin de la guerre.
Née dans une famille juive fortunée de Francfort-sur-le-Main, elle avait obtenu un doctorat en philologie puis en archéologie classique à l’université de Heidelberg. Elle avait ensuite travaillé comme assistante de Bernhard Schweitzer à Königsberg jusqu’en 1928, date à laquelle son professeur, Ludwig Curtius, alors directeur du Deutsches Archäologisches Institut à Rome, l’avait chargée des archives photographiques.
L’arrivée de Hitler au pouvoir, en 1933, l’a contrainte à quitter ses fonctions, les lois antisémites interdisant aux Juifs tout travail dans la fonction publique. C’est alors qu’elle fut embauchée au Vatican. Par cette embauche, souligne Vatican News, le Vatican a envoyé « un double message : contre l’antisémitisme nazi et en faveur de l’emploi des femmes. »
Elle prendra sa retraite en 1967 avant de se retirer en Suisse, où elle s’éteignit en janvier 1989, à Montreux. Mais sa tombe se trouve dans les murs du Vatican au fameux cimetière appelé « Campo Teutonico ». En effet, elle avait voulu devenir catholique.
Hermine Speier a laissé son empreinte aux Musées du Vatican : elle est à l’origine de la classification des archives photographiques des Musées selon trois périodes : classique, médiévale et moderne. Responsable de nombreux événements culturels, elle « se positionne comme une femme incontournable de la vie vaticane des décennies de l’après-guerre ». En plus de ses fonctions de conservatrice des archives photographiques, elle a également travaillé, note son biographe, Georg Daltrop, avec l’archéologue Filippo Magi sur les expositions étrusques et romaines, ainsi que des expositions sur des vases grecs et celles associées à des fouilles spécifiques.
Elle est aujourd’hui considérée comme « une figure essentielle à l’histoire des douze musées du Vatican », souligne Vatican News.