Magistrats, ne tombez pas « dans la toile d’araignée des corruptions »: c’est l’appel du pape aux juges et aux procureurs du monde réunis au Vatican pour un sommet contre la traite des personnes et le crime organisé
Après l’engagement des religions contre ces deux fléaux (2 décembre 2014) et celui des maires des grandes métropoles (21 juillet 2015), qui se sont fait entendre à l’ONU, ce sont des juges et des procureurs du monde entier qui se sont réunis au Vatican, lors d’un sommet organisé par l’Académie pontificale des sciences sociales, les vendredi 3 et samedi 4 juin 2016. Au terme du sommet, ils ont adopté une Déclaration finale, publiée par le Vatican en anglais et en espagnol: la version espagnole a été signée par le pape François.
La traite des personnes et le crime organisé sont « de véritables crimes contre l’humanité qui doivent être reconnus comme tels par toutes les autorités religieuses, politiques et sociales », dénonce le pape François qui invite les juges et les procureurs à être « libres » face à ces fléaux.
« Je vous demande, a dit le pape, d’accorder une attention particulière à la question de la traite et du trafic de personnes et je vous demande, face à tout cela et au crime organisé, de veiller à ne pas tomber dans la toile d’araignée des corruptions. »
Il a une nouvelle fois dénoncé des « crimes contre l’humanité » : « Comme a dit mon prédécesseur Benoît XVI, et comme je l’ai moi-même affirmé à plusieurs reprises, ces actes sont de véritables crimes contre l’humanité qui doivent être reconnus comme tels par toutes les autorités religieuses, politiques et sociales, et sanctionnées par des lois nationales et internationales. »
Il a invité au soutien des victimes pour qu’elles construise un avenir: « Nous savons qu’il est important que toute victime trouve le courage de parler de sa situation de victime au passé, un passé surmonté courageusement et auquel elle a survécu en trouvant une meilleure qualité de vie, en retrouvant sa dignité et sa liberté. »
A propos des sentences, il a suggéré de préférer des peines qui favorisent le changement du criminel : « Une peine refermée en soi, qui ne laisse pas de place à l’espérance, est une torture et non une peine. »
Il a salué les prisons où les responsables sont des femmes : plus de réalisme et de souci de la réinsertion.
Le pape François a salué l’engagement de l’Académie pontificale contre les esclavages modernes: « Ces activités visent à protéger la dignité et la liberté des hommes et des femmes de notre temps, en particulier à éliminer la traite et le trafic de personnes et les nouvelles formes d’esclavage comme le travail forcé, la prostitution, le trafic d’organes, le commerce de la drogue, la criminalité organisée. »
Pour le pape François, c’est le propre d’une académie de s’engager : « Une académie doit avoir des racines, et des racines dans le concret, sinon elle court le risque de développer une réflexion liquide, qui s’évapore et ne mène à rien. »
Et c’est à sa demande que l’académie poursuit ce projet de « libérer l’humanité des nouveaux esclavages et du crime organisé ».
Cette longue intervention du Pape François constitue une véritable charte, une feuille de route qui devient désormais une référence pour les diocèses du monde. Le pape encourage en effet l’engagement de l’Eglise « en politique », dans la « grande politique ». C’est pourquoi nous vous proposons notre traduction complète de l’orignal publié par le Vatican en italien.
Avec une traduction d’Océane Le Gall
