Du 12 au 14 mars se tient à Panama la 3e Conférence latino-américaine « Vulnérabilité et abus ». Le Saint-Père appelle à éradiquer les situations qui pourraient protéger les abuseurs au sein de l’Église. Nous publions ci-dessous le texte dans son intégralité, traduit par Zenit.
Chers participants au congrès,
Je tiens à saluer les organisateurs et les participants à ce troisième congrès latino-américain promu par le CEPROME, intitulé Vulnérabilité et abus : Vers une vision plus large de la prévention, et recommander au Seigneur leur travail, afin qu’ils continuent à progresser dans l’éradication du fléau des abus dans toutes les sphères de la société.
Lors de ma rencontre du 25 septembre dernier avec une délégation de ce Conseil, j’ai souligné l’engagement de l’Église à voir le visage de Jésus souffrant dans chacune des victimes. Mais en même temps, la nécessité de déposer à ses pieds « la souffrance que nous avons reçue et causée », en le priant « pour les pécheurs les plus malheureux et les plus désespérés, pour leur conversion, afin qu’ils puissent voir dans les autres les yeux de Jésus qui les appelle ».
À cette occasion, je vous ai invités, et je vous invite aujourd’hui encore, à voir ce problème avec les yeux de Dieu, à entrer en dialogue avec lui. Ce regard divin peut nous aider à comprendre la vulnérabilité, car le Seigneur « dans notre faiblesse perfectionne sa puissance, et aux faibles il donne la force de lui rendre témoignage » (cf. Préface des saints martyrs, 1). Dieu nous appelle à un changement complet de mentalité dans notre conception des relations, en privilégiant le plus petit, le pauvre, le serviteur et l’ignorant, par rapport au riche, à l’enrichi, au maître et au savant, sur la base de la capacité à accueillir la grâce que Dieu nous a donnée et à faire de nous-mêmes un don aux autres.
Considérer sa propre faiblesse comme une excuse pour ne pas être des personnes et des chrétiens à part entière, incapables de prendre en main leur destin, créera des personnes infantiles et rancunières, et ne représente en rien la petitesse à laquelle Jésus nous invite. Au contraire, la force de celui qui, comme saint Paul, se glorifie de ses faiblesses et se confie à la grâce du Seigneur (cf. 2 Co 12, 8-10) est un don que nous devons demander dans la prière, pour nous-mêmes et pour les autres. Grâce à elle, nous pourrons affronter les contradictions de la vie et contribuer au bien commun dans le cadre de la vocation à laquelle nous avons été appelés.
En termes de prévention, notre travail doit sans aucun doute viser à éradiquer les situations qui protègent ceux qui se cachent derrière leur position pour s’imposer aux autres de manière perverse, mais aussi à comprendre pourquoi ils sont incapables d’entrer en relation avec les autres de manière saine. De même, on ne peut pas rester indifférent à la raison pour laquelle certains acceptent d’aller à l’encontre de leur propre conscience, par peur, ou se laissent cajoler par de fausses promesses, tout en sachant au fond d’eux-mêmes qu’ils sont sur la mauvaise voie. Humaniser les relations dans toute société, y compris dans l’Église, signifie s’efforcer de former des personnes mûres et cohérentes qui, fortes de leur foi et de leurs principes éthiques, sont capables d’affronter le mal, en témoignant de la vérité en lettres capitales.
Une société qui n’est pas fondée sur ces postulats d’intégrité morale sera une société malade, avec des relations humaines et institutionnelles déformées par l’égoïsme, la méfiance, la peur et la tromperie. Mais confions notre faiblesse à la force que le Seigneur nous donne. Et nous reconnaissons que « ce trésor, nous l’avons dans des vases d’argile, pour montrer que la puissance transcendante appartient à Dieu et non à nous » (2 Co 4, 7).
Demandons cette grâce au Roi des martyrs pour être ses témoins dans le monde. Qu’il vous bénisse et que la Sainte Vierge vous garde. Et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier pour moi.
Rome, Saint Jean de Latran, 1er mars 2024
François