Les estimations indiquant une augmentation de 132 millions de personnes sous-alimentées dans le monde, à la suite de la pandémie, révèlent « un système qui ne fonctionne pas », constate sœur Alessandra Smerilli, sous-secrétaire du Dicastère pour le service du développement humain intégral et chef de la délégation du Saint-Siège au pré-sommet des Nations Unies sur les Systèmes alimentaires. Le Vatican recommande au contraire un système « inclusif ».
C’est aujourd’hui, 26 juillet 2021, que commence, à Rome, le « pré-sommet » des Nations Unies sur les « Systèmes alimentaires », en vue du sommet mondial qui se tiendra en septembre 2021 à New York.
Sœur Alessandra Smerilli, Fille de Marie auxiliatrice, et également coordinatrice de la task-force économie de la Commission vaticane COVID-19, en dit davantage au micro de Radio Vatican.
Pour un système inclusif
Elle rappelle notamment que le Saint-Siège prône un « système alimentaire inclusif » qui reconnaisse le rôle de la famille et permette à ceux qui sont aujourd’hui exclus ou laissés de côté de participer aux décisions et aux politiques les concernant: il faut, « une interaction forte et respectueuse entre science et connaissances traditionnelles, deux piliers fondamentaux dans les systèmes alimentaires ».
Le Vatican recommande une approche globale: « un système alimentaire durable dans le monde post-pandémie devrait garantir une approche holistique qui considère les dimensions économiques, environnementales, sociales, culturelles et sanitaires de la nourriture. Cela suppose un engagement important dans l’éducation à la consommation de nourriture. Mais il devrait aussi protéger les droits de propriété des communautés pauvres et indigènes, ainsi que les “biens communs“, ces forêts et ces terres traditionnellement gérées et partagées par une communauté entière ».
Il s’agit également de construire des chaînes de réapprovisionnement et de distribution alimentaires résilientes et durables, ce qui nécessite « des infrastructures reliant les petits agriculteurs aux marchés locaux et nationaux ».
Aujourd’hui, dans le monde, explique sœur Alessandra Smerilli, les trois causes principales de la faim sont « les 3 C » : Conflits, Covid-19 et Changement climatique. On estime que la pandémie aura pour effet d’augmenter de 132 millions le nombre de personnes sous-alimentées, les plus vulnérables et les personnes déplacées étant les principales victimes. Ces chiffres, diagnostique la religieuse salésienne, révèlent « un système qui ne fonctionne pas ».
Le système alimentaire mondial actuel, précise sœur Alexandra Smerilli, est en effet « dominé par des intérêts corporatifs qui excluent les petits producteurs de nourriture, les travailleurs de la chaîne alimentaire, les familles et les consommateurs de l’accès à une sécurité alimentaire ». En effet, explique-t-elle, « presque 70% des profits du commerce mondial de produits agricoles sont concentrés dans les mains de quelques entreprises ». Une confrontation avec « les grands » de l’industrie alimentaire est indispensable, estime la religieuse, en vue d’une réelle transition vers l’agro-écologie et vers des systèmes alimentaires durables.
Les enjeux de la rencontre de Rome
Le pré-sommet est, explique-t-elle, un événement mondial important qui vise à « attirer l’attention sur la nécessité de transformer les systèmes agro-alimentaires pour réaliser la vision de l’Agenda 2030 pour le Développement durable afin qu’augmente la résilience dans le contexte de la pandémie: il faut renforcer les chaînes de la valeur locale, améliorer la nutrition, réutiliser et recycler les ressources alimentaires et réduire de moitié les gaspillages ».
Pour le chef de la délégation du Saint-Siège, « le succès du pré-sommet et du sommet dépendra de l’implication de toutes les parties prenantes qui ont un intérêt et un rôle dans le fonctionnement des systèmes alimentaires et des actions concrètes qui seront mises en œuvre à partir de ce sommet ».
Pour le Saint-Siège, explique la religieuse, « le droit à la nourriture est fondamental pour la dignité humaine ». Le pain et le vin, et toute nourriture sont avant tout « fruit de la terre et du travail des hommes », rappelle-t-elle.
Interrogée sur le travail de la Commission vaticane COVID-19, la coordinatrice rappelle les principes de la dignité de tout être humain, du bien commun et de la protection de notre maison commune, sur lesquels il se fonde pour soutenir des actions qui favorisent un modèle qui régénère l’agriculture et des systèmes alimentaires s’inspirant de l’agro-écologie, au profit à la fois des personnes et de la planète.