Le pape François dénonce les maladies de l’environnement et leur impact sur les maladies « rares », – « orphelines ».
Le pape a reçu les participants de la XXXe Conférence internationale organisée par le Conseil pontifical pour la pastorale de la santé, jeudi 19 novembre, dans la salle Regia du palais apostolique du Vatican. Le congrès a pour thème : « La culture de la santé et de l’accueil au service de l’homme et de la planète » (19-21 novembre).
Le pape François interpelle les décideurs : « A propos de ces dommages produits par la dégradation de l’environnement, pour moi, c’est une surprise – quand je vais à l’audience le mercredi ou que je vais dans les paroisses – de trouver tant de malades, surtout des enfants… Les parents me disent : « Il a une maladie rare ! On ne sait pas ce que c’est. » Ces maladies rares sont des conséquences de la maladie que nous infligeons à l’environnement. Et c’est grave ! »
Voici notre traduction intégrale du discours du pape François.
A.B.
Discours du pape François
Chers frères et sœurs,
Merci pour votre accueil ! Je remercie Son Excellence Mgr Zygmunt Zimowski pour les aimables salutations qu’il m’a adressées en votre nom à tous, et je souhaite cordialement la bienvenue aux organisateurs et aux participants de cette trentième Conférence internationale consacrée à « la culture de la santé et de l’accueil au service de l’homme et de la planète ». Et un merci sincère à tous les collaborateurs du dicastère.
De multiples questions seront abordées au cours de ce rendez-vous annuel qui marque les trente années d’activités du Conseil pontifical pour les services de santé (pour la pastorale de la santé) et coïncide avec le vingtième anniversaire de la publication de la lettre encyclique Evangelium vitae, de saint Jean-Paul II.
C’est justement le respect pour la valeur de la vie et, plus encore, l’amour de celle-ci, qui trouve une application unique lorsqu’on se fait proche, lorsqu’on s’approche, qu’on prend soin de celui qui souffre dans son corps et dans son esprit : toutes ces actions qui caractérisent la pastorale de la santé. Des actions et, avant même, des attitudes auxquelles l’Église donnera une importance particulière pendant le Jubilé de la miséricorde, qui nous appelle tous à être proches de nos frères et sœurs qui souffrent davantage. Dans Evangelium vitae, nous pouvons retrouver les éléments constitutifs de la « culture de la santé » : à savoir l’accueil, la compassion, la compréhension et le pardon. Ce sont les attitudes habituelles de Jésus face à la multitude de personnes dans le besoin qui s’approchaient de lui tous les jours : des malades de toutes sortes, des pécheurs publics, des possédés, des marginaux, des pauvres, des étrangers… Et curieusement, dans notre culture actuelle du déchet, ceux-ci sont repoussés, ils sont laissés de côté. Ils ne comptent pas. C’est curieux… Qu’est-ce que cela veut dire ? Que la culture du déchet n’est pas celle de Jésus. Elle n’est pas chrétienne.
De telles attitudes sont celles que l’encyclique appelle des « exigences positives » du commandement sur le caractère inviolable de la vie, qui avec Jésus se manifestent dans toute leur ampleur et leur profondeur et qui, aujourd’hui encore, peuvent, ou plutôt doivent caractériser la pastorale de la santé : elles « vont de la nécessité de prendre soin de la vie du frère (l’homme de la même famille, appartenant au même peuple, l’étranger qui habite la terre d’Israël) à la prise en charge de l’étranger, jusqu’à l’amour de l’ennemi » (n. 41).
Cette proximité à l’égard de l’autre – une proximité pour de bon et non pas feinte – jusqu’à le sentir comme quelqu’un qui m’appartient – même mon ennemi m’appartient en tant que frère – dépasse toutes les barrières de nationalité, d’extraction sociale, de religion… comme nous l’enseigne le Bon Samaritain de la parabole évangélique. Elle dépasse même cette culture au sens négatif, selon laquelle, dans les pays riches comme dans les pays pauvres, les êtres humains sont acceptés ou refusés en fonction de critères utilitaristes, en particulier d’utilité sociale ou économique. Cette mentalité est liée à la fameuse « médecine des désirs » : une coutume de plus en plus répandue dans les pays riches, caractérisée par la recherche à tout prix de la perfection physique, dans l’illusion d’une éternelle jeunesse ; une coutume qui conduit précisément à rejeter ou à marginaliser celui qui n’est pas « efficace », qui est vu comme un poids, un dérangement, ou simplement qui n’est pas beau.
De même, comme je le rappelais dans ma récente encyclique Laudato si’, se « faire proche » implique aussi d’assumer des responsabilités incontournables à l’égard de la création et de notre « maison commune » qui appartient à tous et qui est confiée au soin de tous, y compris pour les générations à venir.
La préoccupation de l’Église, en effet, concerne le sort de la famille humaine et de toute la création. Il s’agit de nous éduquer tous à « garder » et à « administrer » la création dans son ensemble, ce don confié à la responsabilité de chaque génération pour qu’elle la remette à son tour encore plus intègre et humainement vivable pour les générations à venir. Cette conversion du cœur à l’« Évangile de la création » suppose que nous nous l’approprions et que nous nous fassions les interprètes du cri pour la dignité humaine qui s’élève surtout parmi les plus pauvres et les exclus, comme le sont bien souvent les personnes malades ou souffrantes. À l’approche du Jubilé de la miséricorde, désormais imminent, que ce cri puisse trouver un écho sincère dans nos cœurs, de sorte que dans l’exercice des œuvres de miséricorde, corporelles et spirituelles, selon les responsabilités confiées à chacun, nous puissions accueillir le don de la grâce de Dieu, tout en nous faisant « canaux » et témoins de la miséricorde.
Au cours de ces journées d’approfondissement et de débat, où vous considérez aussi le facteur environnemental dans ses aspects majoritairement liés à la santé physique, psychique, spirituelle et sociale de la personne, je souhaite que vous puissiez contribuer à un nouveau développement de la culture de la santé, comprise dans son sens intégral. Je vous encourage, dans cette perspective, à garder toujours présente, dans vos travaux, la réalité de ces populations qui subissent davantage les dommages provoqués par la dégradation de l’environnement, des dommages souvent permanents et graves pour la santé. Et à propos de ces dommages produits par la dégradation de l’environnement, pour moi, c’est une surprise – quand je vais à l’audience le mercredi ou que je vais dans les paroisses – de trouver tant de malades, surtout des enfants… Les parents me disent : « Il a une maladie rare ! On ne sait pas ce que c’est. » Ces maladies rares sont des conséquences de la maladie que nous infligeons à l’environnement. Et c’est grave !
Demandons à la Très Sainte Vierge Marie, santé des malades, d’accompagner les travaux de votre Conférence. Confions-lui l’engagement quotidien des différents professionnels du monde de la santé en faveur de ceux qui souffrent. Je vous bénis tous de tout cœur, vos familles, vos communautés et aussi toutes les personnes que vous rencontrez dans les hôpitaux et dans les maisons de santé. Je prie pour vous. Et vous, s’il vous plaît, priez pour moi. Merci.
© Traduction de Zenit, Constance Roques
PHOTO.VA - OSSERVATORE ROMANO
Les maladies de l’environnement et les maladies "rares"
Congrès du dicastère pour la Santé (texte complet)