LA GRANDE PROMESSE (VALLADOLID)
Reportage par Pilar Alvarez Mateo, chargée de l’accueil des pèlerins au sanctuaire de la Grande Promesse (Valladolid)
Cinquante ans après les apparitions de Paray-le-Monial, ont lieu celles de Valladolid au jeune jésuite espagnol Bernardo de Hoyos (1711-1735).
Dieu a fait de Marguerite-Marie Alacoque et de Bernardo de Hoyos les dépositaires de la dévotion ou spiritualité du Sacré Cœur. Notre Seigneur leur est apparu à tous les deux et il l’a fait pour leur révéler son intériorité, le drame qui ronge son Cœur : un Amour qui n’est pas aimé. Avec Marguerite- Marie, cette dévotion commence à se répandre dans toute l’Europe ; avec Bernardo, elle s’étend dans l’Espagne du XVIIIe siècle : avec les peuples de l’Amérique espagnole et les Philippines, l’Espagne représentait alors un tiers de l’Église universelle. Ainsi le culte au Sacré Cœur a été introduit sur le continent américain, où il est encore très présent.
Aimer le Christ, c’est se laisser aimer par lui
« Ce divin maître veut que je sois “un disciple du Sacré Cœur de Jésus et un disciple bien-aimé.” C’est ce qu’il m’a dit, comme il l’a dit à sa servante la vénérable Marguerite. »
Ces paroles de Notre Seigneur à Bernardo nous rappellent celles de saint Jean lorsque, dans l’Évangile, il se définit comme « le disciple bien-aimé » de Jésus. Il est très important de partir de là pour com- prendre la notion de réparation. Avec Bernardo, Jésus insiste : la réparation est toujours la réponse à un amour que nous recevons en premier lieu. Jean n’emploie pas cette expression pour se vanter, mais pour nous montrer ce que chacun de nous devrait être, un « disciple bien-aimé ». Pour Jean, aimer le Christ, c’est se laisser aimer par lui. Jean vit absorbé dans l’amour débordant qu’il reçoit de Jésus, c’est ce qui le fascine et le fait sortir de lui-même, dans un mouvement de réponse à l’Amour. C’est pourquoi nous le voyons au pied de la croix.
Bernardo comprend que la première chose à faire est d’aller au Christ et de se laisser aimer. Résonnent ici le cri de Jésus « Venez à moi » (Mt 11, 28-30) et sa lamentation « Et vous ne voulez pas venir à moi pour avoir la vie ! » (Jn 5, 40). Bernardo ne veut pas laisser Jésus avec un cœur oppressé sans la possibilité de se donner à lui, il veut s’adoucir à l’Amour. Nous comprenons l’urgence de nous tourner vers la lecture priante de la Parole et vers les sacrements, sources de vie.
Jésus, après nous avoir demandé de venir à lui, nous invite à porter son joug en apprenant de son cœur doux et humble. Tel est le programme que Bernardo a suivi.
« Après la communion, j’ai eu cette même vision du Cœur, bien que cette fois je l’aie vu entouré d’une couronne d’épines et d’une croix… J’ai aussi vu la blessure par laquelle semblent sortir les esprits les plus purs de ce sang, qui a racheté le monde. L’amour divin de Jésus invitait mon cœur à entrer par cette blessure… Et quand mon cœur a accepté, le Seigneur lui a dit : “Ne vois-tu pas qu’il est entouré d’épines et qu’elles te piqueront ?” Tout était fait pour provoquer plus d’amour, qui, en entrant dans son être le plus intime, lui permit d’expérimenter que les épines étaient des roses », raconte- t-il. Aimer, c’est partager tout ce que l’être aimé vit, c’est jouir et souffrir. Bernardo n’a pas peur des épines. Au contraire, « les épines sont ce qui excite l’amour ». Invité à faire sienne la blessure, il se consacre au Sacré Cœur avec le ferme désir d’unir les battements de son cœur aux siens, d’être un seul cœur. Bernard ne refuse pas le joug que le Christ lui offre, il sait que de cette façon, non seulement il accueille son salut, mais il devient aussi son Cyrénéen, pour réparer les manques d’amour et collaborer à la rédemption. C’est alors qu’il fait l’expérience que « les épines sont des roses », que « le joug est facile à porter et le fardeau léger », parce que le Christ est devenu son Cyrénéen à lui. En réalité, c’est lui qui l’aide à porter le fardeau en prenant sur lui la plus grande par- tie du poids. Il est Dieu et Bernardo seulement son « disciple bien-aimé ».
Pour Bernardo, l’Eucharistie est « le sacrement de l’amour ». Sa réparation, à présent, se concentre sur le Cœur eucharistique de Jésus, quand il perçoit avec douleur com- bien son Cœur vivant et battant est rejeté et négligé. Il désire se com- porter comme un chevalier envers son roi, lui offrir sa fidélité et sa sensibilité. Il lui rendra visite fréquemment, il recevra la communion avec pureté et enthousiasme, il revêtira une belle tenue pour célébrer la Sainte Messe ; et son cœur, au milieu des occupations, ne sera pas séparé du Tabernacle. Entrons dans le dynamisme réparateur de Bernardo ! Rendons au Cœur Sacré de Jésus amour pour amour ! ¨