Le cardinal Fridolin Ambongo, président du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM) et archevêque métropolitain de Kinshasa, a publié ce jeudi 11 janvier 2024 un communiqué au nom de la SCEAM, affirmant qu’il n’y aura pas de bénédictions données aux couples homosexuels dans toutes les Églises d’Afrique.
Voici le communiqué du cardinal Ambongo dans son intégralité :
Chers frères et sœurs dans le Seigneur,
Grâce et paix !
Le message que je vous transmets aujourd’hui a reçu l’accord de Sa Sainteté le pape François et de Son Éminence le cardinal Victor Manuel Fernández, préfet du Dicastère pour la doctrine de la foi. Il présente un résumé consolidé des positions adoptées par diverses conférences épiscopales nationales et interterritoriales à travers le continent africain, en réponse à la publication de la Déclaration du Dicastère pour la doctrine de la foi Fiducia supplicans du 18 décembre 2023. Au sein de l’Église Famille de Dieu en Afrique, cette Déclaration a provoqué une onde de choc, elle a semé confusions et troubles dans les esprits de nombreux fidèles laïcs, des personnes consacrées et même des pasteurs et a suscité de vives réactions.
La synthèse des réponses des conférences épiscopales africaines met en lumière une compréhension et une approche communes de leur part. Elle englobe leurs vues sur la doctrine inchangée du mariage au sein de l’Église, la prise en charge pastorale étendue à tous les membres de l’Église et leur position unifiée sur les unions homosexuelles.
1. Doctrine inchangée sur le mariage et sur la sexualité
Dans leurs différents messages, les conférences épiscopales de l’Église Famille de Dieu en Afrique commencent par réaffirmer leur indéfectible attachement au Successeur de Pierre, leur communion avec lui et leur fidélité à l’Évangile. Elles reconnaissent collectivement que la doctrine de l’Église sur le mariage et la famille reste inchangée. Elles ont toutes relevé les passages où Fiducia supplicans a réaffirmé cette position traditionnelle de l’Église et a exclu explicitement la reconnaissance du mariage homosexuel. Cette position, enracinée dans les Saintes Écritures, a été enseignée sans discontinuité par le Magistère universel de l’Église. Par conséquent, les rites et prières qui pourraient brouiller la définition du mariage – comme union exclusive, stable et indissoluble entre un homme et une femme, ouverte à la procréation – sont considérés comme inacceptables. La distinction faite par Fiducia supplicans entre les bénédictions liturgiques ou rituelles formelles et les bénédictions spontanées, n’entend pas imposer des bénédictions pour les couples irréguliers et les couples de personnes de même sexe (cf. 31) même si le document dit qu’elles « devraient être effectuées en dehors des cadres liturgiques » (cf. 31 & 38).
2. Soin et orientation pastoraux
À travers les déclarations des conférences piscopales, l’Église en Afrique, en tant que Famille de Dieu, réaffirme son engagement à poursuivre l’assistance pastorale à tous ses membres. Le clergé est encouragé à offrir un soin pastoral accueillant et soutenant, particulièrement aux couples en situations irrégulières. Les conférences épiscopales africaines soulignent que les personnes à tendance homosexuelle doivent être traitées avec respect et dignité, tout en leur rappelant que les unions de personnes de même sexe sont contraires à la volonté de Dieu et en peuvent donc pas recevoir la bénédiction de l’Église.
3. Position sur les unions homosexuelles et les couples de même sexe
Les conférences épiscopales préfèrent en général – chaque évêque restant libre dans son diocèse – ne pas offrir de bénédictions aux couples de même sexe. Cette décision découle de la préoccupation concernant la confusion potentielle et le scandale au sein de la communauté de l’Église. L’enseignement constant de l’Église décrit les actes homosexuels comme « intrinsèquement désordonnés » (Congrégation pour la doctrine de la foi, Déclaration Persona Humana, n. 8) et contraires à la loi naturelle. Ces actes, considérés comme excluant le don de la vie et manquant de complémentarité affective et sexuelle véritable, ne doivent être approuvés en aucune circonstance (Catéchisme de l’Église catholique, n. 2357).
Pour étayer cette position, une grande majorité des interventions des évêques africains s’appuie avant tout sur la Parole de Dieu. Elles citent les passages qui condamnent l’homosexualité, notamment Lv 18, 22-23 où l’homosexualité est explicitement prohibée et considérée comme une abomination. Ce texte législatif témoigne de ces pratiques dans l’environnement d’Israël, comme d’autres pratiques que Dieu interdit, tel que l’infanticide (cf. Le sacrifice d’Isaac). Une conférence épiscopale a ajouté le scandale des homosexuels de Sodome (cf. Gn 19, 4-11). Dans la narration du texte, l’homosexualité est si abominable qu’elle entraînera la destruction de la ville. Dans le Nouveau Testament, saint Paul, dans l’épitre aux Romains, condamne lui aussi ce qu’il appelle des rapports contre nature (cf. Rm 1, 26-33) ou mœurs infâmes (cf. 1Co 6, 9-10). En plus de ces raisons bibliques, le contexte culturel en Afrique, profondément enraciné dans les valeurs de la loi naturelle concernant le mariage et la famille, complique davantage l’acceptation des unions de personnes de même sexe, car elles sont considérées comme contradictoires aux normes culturelles et intrinsèquement mauvaises.
4. Déclaration conclusive
En résumé, les conférences épiscopales à travers l’Afrique, qui ont fortement réaffirmé leur communion avec le pape François, estiment que les bénédictions extra-liturgiques proposées dans la Déclaration Fiducia supplicans ne pourront pas se faire en Afrique sans s’exposer à des scandales. Elles rappellent, comme le fait clairement Fiducia supplicans, au clergé, aux communautés religieuses, à tous les croyants et aux personnes de bonne volonté, que la doctrine de l’Église sur le mariage chrétien et la sexualité reste inchangée. Pour cette raison, nous, évêques africains, ne considérons pas comme approprié pour l’Afrique de bénir les unions homosexuelles ou les couples de même sexe parce que, dans notre contexte, cela causerait une confusion et serait en contradiction directe avec l’éthos culturel des communautés africaines. Le langage de Fiducia supplicans demeure trop subtil à comprendre pour les gens simples. Par ailleurs, il reste très difficile de convaincre que des personnes de même sexe qui vivent dans une union stable ne revendiquent pas la légitimité de leur propre statut.
Nous, évêques africains, insistons sur l’appel à la conversion de tous. À la manière d’Osée, Jésus vient pour témoigner de la tendresse de Dieu : « Il n’est pas venu appeler les justes, mais les pécheurs » (Mt 9,3). Cela ne fait aucun doute. Mais Jésus tend aussi la main au pécheur pour qu’il se lève, pour qu’il se convertisse (cf. Mc 1, 5). Après avoir témoigné de tant de tendresse pour la femme adultère, il lui dit : « va désormais, ne pèche plus » (Jn 8, 11). Comme sel de la terre et lumière du monde (cf. Mt 5, 13-14), la mission miséricordieuse de l’Église est d’aller à contre-courant de l’esprit du monde (cf. Rm 12, 2) et de lui proposer le meilleur, même s’il est exigeant.
Certains pays préfèrent avoir plus de temps pour l’approfondissement de la Déclaration qui, en fait, propose la possibilité de ces bénédictions mais ne les impose pas. Quoi qu’il en soit, nous réfléchirons encore sur la valeur du thème général de ce document, au-delà des seules bénédictions pour les couples en situation irrégulière, c’est-à-dire sur la richesse des bénédictions spontanées dans la pastorale populaire.
Grâce et paix
« Grâce et paix » : c’est par ces mots repris à saint Paul qu’en communion avec Sa Sainteté le pape François et tous les évêques africains, en tant que président du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM), je termine ce message appelant ainsi les communautés chrétiennes à ne pas se laisser ébranler. Sa Sainteté le pape François, farouchement opposé à toute forme de colonisation culturelle en Afrique, bénit de tout cœur les peuples africains et les encourage à demeurer fidèles, comme toujours, à la défense des valeurs chrétiennes.