« La situation est désastreuse et nous demandons humblement à tout le monde de prier pour nous en ces temps difficiles », écrit un interlocuteur anonyme à l’AED. Regina Lynch, présidente exécutive de l’association qui reçoit ces messages rappelle : « N’oublions pas de prier pour le Myanmar. Parmi les nombreux conflits qui sévissent actuellement dans le monde, le peuple du Myanmar se sent abandonné au milieu de ses souffrances. Notre solidarité est donc un rayon de lumière dans les ténèbres auxquelles ils sont confrontés ».
Alors qu’il connaissait un processus de démocratisation depuis 2010, le pays a fait un brutal retour à la dictature militaire en 2021. L’opposante historique Aung Saan Suu Kyi a été jetée à nouveau en prison, les processus démocratiques ont cessé et la presse a été muselée. De cette façon, la junte a repris le pouvoir qui lui échappait à chaque élection avec son coup d’État, qui a replongé le pays des années en arrière. En 1990 déjà, il était tombé sous la coupe de son armée qui avait refusé l’élection d’Aung Saan Suu Kyi. En 2021, de violentes protestations ont éclaté aussitôt dans les grandes villes. Elles ont été férocement réprimées.
Les armées de défense des ethnies minoritaires qui négociaient jusqu’alors avec les militaires ont aussitôt repris les armes. Après avoir longtemps résisté à l’armée régulière birmane, elles se sont coordonnées et agissent à présent de concert. Le 23 octobre 2023, elles lançaient « l’opération 1027 », une vaste offensive lancée dans l’État de Shan, mais qui s’étend dans des États limitrophes. Malgré sa supériorité en matériel lourd, l’armée régulière paraît dépassée et perd du terrain. Ces combats pourraient mener à la chute de la junte, ce que beaucoup de Birmans appellent de leurs vœux, mais ils provoquent pour le moment un surcroit de violence contre les civils. Des milliers d’entre eux sont jetés sur les routes, avec peu de secours à espérer. Des crimes de guerre sont dénoncés régulièrement, en particulier par le site The Irrawaddy, qui notait récemment d’inquiétantes disparitions de civils d’ethnie Karen, probablement enlevés ou exécutés par la junte.
L’Église au côté de la population
Régina Lynch témoigne : « Tout au long des trois dernières années de guerre civile, l’Église s’est tenue aux côtés de la population qui a subi la destruction de nombreux lieux de culte et le déplacement de villages entiers. (…) La souffrance a atteint un point critique, poussant de plus en plus de civils à chercher refuge dans des églises considérées comme sûres. Malheureusement, des rapports ont fait état d’incidents bouleversants dans des enceintes sacrées, même certaines églises sont devenues des champs de bataille et des institutions religieuses ont été évacuées de force. Nous avons appris que des biens ecclésiastiques ont subi des dommages collatéraux en plusieurs endroits, ce qui ajoute à la gravité de la situation. »
Elle reçoit de plus en plus d’appels urgents, provenant de différents diocèses du pays, submergés par les demandes d’aides d’urgence et d’appels à la prière.
Birmanie ou Myanmar ?
Birmanie ou Myanmar ? Même le nom de ce grand territoire entre Inde et Thaïlande, Chine et Laos suscite le conflit. Au nom de « Birmanie », imposé par le colonisateur anglais, les responsables politiques de la junte militaire au pouvoir ont exhumé le terme ancien de « Myanmar ». Il s’en suit une « guerre des noms » : les opposants à la junte préfèrent appeler leur pays la Birmanie, tandis qu’officiellement – auprès des Nations unies notamment – le pays s’appelle effectivement le Myanmar.
L’église de l’ Ascension de Notre-Dame, bâtie en 1894 à Chant Tar, au coeur du pays, était l’une des plus ancienne de Birmanie. Elle a été réduite en cendre par l’armée régulière birmane.
