Le Premier ministre Chen Chien-Jen (au centre, en 2016 au Vatican) a participé à une récente réception à la Nonciature Apostolique à l'occasion de l'anniversaire des relations bilatérales © Missions étrangères de Paris

Le Premier ministre Chen Chien-Jen (au centre, en 2016 au Vatican) a participé à une récente réception à la Nonciature Apostolique à l'occasion de l'anniversaire des relations bilatérales © Missions étrangères de Paris

Taiwan et le Vatican célèbrent huit décennies de relations diplomatiques

Mgr Stefano Mazzotti souligne l’excellente qualité des relations bilatérales

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La République de Chine (Taïwan) et le Vatican entretiennent des relations diplomatiques officielles depuis le 23 octobre 1942. L’année dernière a marqué 80 années de reconnaissance mutuelle, mais cette année 2023 commémore l’anniversaire, reporté d’un an en raison de restrictions sanitaires. Plusieurs événements ont été organisés, notamment une réception officielle à la Nonciature apostolique de Taipei, un symposium de réflexion sur « la nature et l’importance des relations bilatérales » et une exposition à l’ambassade de Taïwan au Vatican.

François-Xavier Boulay

Le 23 septembre, la Conférence épiscopale régionale chinoise (nom officiel de la Conférence épiscopale catholique de Taïwan) et l’Institut de recherche académique catholique de l’Université catholique Fu Jen ont organisé un symposium à l’occasion du « 80e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre le Vatican et la République de Chine (Taïwan) ».

Les interventions et discussions de cette journée de recherche ont été assurées par le chargé d’affaires du Saint-Siège à Taipei, Mgr Stefano Mazzotti, le président de l’Université catholique Fu Jen, Mgr Pierre Liu Cheng-chung, et le recteur de l’Université, Vincent Chiang Han-sun. Une rétrospective des 80 dernières années a été organisée pour discuter des relations actuelles et de l’approfondissement de la coopération future au service de l’engagement bilatéral sur le chemin de l’Église œcuménique.

Une diplomatie confiante, gage de stabilité entre Taipei et le Saint-Siège

Outre le symposium organisé par la Conférence épiscopale, la Nonciature apostolique à Taipei a organisé une réception pour célébrer le dixième anniversaire du pontificat du pape François et le 81e anniversaire des relations bilatérales, en présence du Premier ministre taïwanais Chen Chien-jen, catholique pratiquant, du directeur des Affaires européennes au Ministère des affaires étrangères, Vincent Yao, et de nombreux représentants étrangers basés à Taipei.

À cette occasion, Mgr Stefano Mazzotti a souligné l’excellente qualité des relations bilatérales entre le Vatican et Taiwan, à la lumière de 80 ans de reconnaissance diplomatique officielle. Il a notamment souligné que « les relations officielles entre le Saint-Siège et Taïwan sont au même niveau que toutes les autres relations diplomatiques entre deux pays souverains. Nous reconnaissons mutuellement notre rôle et notre légitimité sur la scène internationale. »

Mgr Mazzotti a également souligné la signification profonde des liens bilatéraux, qui consistent en « la communion de l’Église catholique universelle et des catholiques taïwanais », ces derniers contribuant activement à renforcer les échanges mutuels en raison de la richesse, de la diversité et de la pluralité de leurs origines identitaires.

Taiwan soutient les efforts de l’Église envers la Chine

Le rapprochement entre le Saint-Siège et Pékin en 2018 avec l’accord provisoire sur la nomination des évêques, renouvelé depuis à deux reprises malgré les difficultés de dialogue, a relancé la question des relations Taïwan-Vatican sur la scène internationale, tout comme la main tendue du pape François aux autorités chinoises à plusieurs reprises. Le mois dernier, lors de sa visite en Mongolie, le pape a également salué le peuple chinois et a exhorté les catholiques de Chine à vivre « en bons chrétiens et en bons citoyens ».

À Taiwan, ce n’est pas une réaction d’inquiétude qui est manifestée par les autorités, qui ont même déclaré soutenir les efforts du Saint-Siège pour dialoguer avec la Chine dans le but de défendre et « d’améliorer la situation de la liberté religieuse et des droits de l’homme ». Le porte-parole de la diplomatie taïwanaise, Jeff Liu, a rappelé que Taïwan partage les mêmes valeurs que le Vatican et que « fidèle à ses valeurs de liberté religieuse et de défense des droits de l’homme, Taïwan a toujours soutenu cette voie pacifique du dialogue pour résoudre les divergences sur les questions religieuses ».

Outre cette attitude positive, Jeff Liu a ajouté que Taïwan apportait une aide active en travaillant avec son partenaire pour promouvoir et approfondir la coopération dans les domaines de l’aide humanitaire mondiale, de la santé et de l’éducation, dans le cadre des échanges bilatéraux qui ont eu lieu au cours des huit dernières décennies.

Enfin, le gouvernement taïwanais a réaffirmé, comme pour apaiser d’éventuelles inquiétudes, que la volonté de dialogue du Vatican ne comportait aucune dimension politique, mais restait strictement dans le domaine des affaires religieuses, tout comme l’accord sur la nomination des évêques. Cependant, Pékin a déjà répété à plusieurs reprises que toute avancée dans les relations sino-vaticanes ne serait possible que si le Vatican rompait d’abord ses liens officiels et ses échanges avec Taïwan, ce que le Saint-Siège refuse de faire.

Les catholiques rassurés par les tensions dans le détroit de Taiwan

Interrogés sur les risques de conflit ou d’isolement de l’île, les Taïwanais sont généralement plus pragmatiques, principalement préoccupés par les problèmes économiques, et pensent qu’une guerre avec la Chine est peu probable. Pour la majorité des fidèles catholiques, qui représentent environ 1 % de la population taïwanaise, la montée des tensions entre les deux rives du détroit de Taïwan n’est ni nouvelle ni très préoccupante. Elles séparent clairement le niveau diplomatique des relations Taïwan-Vatican du niveau confessionnel de la vie de l’Église locale.

Le P. Jeffrey Chang, recteur de l’École de Théologie Saint Robert Bellarmin, ajoute que la vie de l’Église locale ne dépend pas de la question de la reconnaissance diplomatique entre la République de Chine (Taïwan) et l’État du Vatican. Au quotidien, la plupart des catholiques vivent leur foi indépendamment de ces questions politiques. Ce n’est pas la reconnaissance diplomatique ou autre qui dicte leur pratique religieuse.

Parallèlement, les communautés chrétiennes de Taïwan prient régulièrement pour la paix dans le détroit et dans le monde lors des offices dominicaux, qui sont aussi l’occasion de prier pour les chrétiens chinois et les personnes persécutées pour leurs croyances. Les liens spirituels sont plus importants que les tensions ou les inquiétudes. Cependant, le P. Chang reconnaît qu’il est vrai qu’en cas de rupture diplomatique en faveur de Pékin, même sans abandonner Taipei, certains le vivraient avec un sentiment, sinon d’abandon, du moins de mauvaise image en termes de confiance et de contre-témoignage en termes de dialogue et d’autorité morale.

Participation active de l’Église locale à la vie de l’Église universelle

Ordonné évêque en avril 2002, Monseigneur Norbert Pu, nommé par le pape François, administre le diocèse de Chiayi (sud-ouest de Taïwan). Il incarne la participation active de l’Église catholique taïwanaise à la vie de l’Église et aux activités du Saint-Siège, à commencer par la formation dispensée aux nouveaux évêques sous l’égide du Dicastère pour l’évangélisation, à laquelle il a participé début septembre. Parmi les évêques des sept diocèses de Taiwan, Mgr Norbert Pu participe également ce mois-ci à l’assemblée plénière du Synode qui vient de s’ouvrir au Vatican.

Outre les pasteurs, les fidèles taïwanais sont également actifs dans la vie de l’Église, comme en témoigne la présence festive et diversifiée de plus de 300 jeunes catholiques aux Journées mondiales de la jeunesse à Lisbonne, l’archevêque de Taipei, Thomas Chung An-zu, comptant plus que jamais sur ce terrain dynamique pour transmettre l’Évangile à la société, face à une baisse du nombre de croyants accentuée par le vieillissement de la population.

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Rédaction

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