Vue d’ensemble de la salle Paul VI, salle de travail pour le Synode © Vatican Media

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Conférence « Laudate Deum : voix et témoignages sur la crise climatique »

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Discours de Benoît Halgand, intervenant pour le monde francophone

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Ce matin, à 10 heures, au Largo della Radio, devant la Palazzina Leon XIII au Vatican, s’est tenue une conférence intitulée « Laudate Deum : voix et témoignages sur la crise climatique ».

Le intervenants étaient Giorgio Leonardo Renato Parisi, prix Nobel de physique 2021, Vandana Shiva, scientifique, activiste et écologiste, Carlo Petrini, gastronome, sociologue et activiste, Jonathan Safran Foer, écrivain, Luisa-Marie Neubauer, animatrice des « Vendredis de l’avenir » en Allemagne, Benoît Halgand, cofondateur des organisations de jeunesse françaises « Pour un réveil écologique » et « Lutte et Contemplation », Jubran Ali Mohammed Ali, jeune homme originaire de Libye, Ridhima Pandey, star du film « The Letter : Un message pour notre Terre » sur Laudato si’, Alessandra Sarmentino, animatrice du projet Policoro de l’archidiocèse de Palerme, animatrice du mouvement Laudato si’ et associée d’Azione Cattolica et Yann Arthus-Bertrand, photographe, cinéaste et ambassadeur de l’ONU pour le climat. Certains d’entre eux étaient présents par visio.

Nous publions ci-dessous les discours de Benoît Halgand.

Bonjour à chacun et chacune,

C’est une grande joie pour moi d’être ici et de pouvoir réagir aux paroles courageuses de sa Sainteté le pape François sur la crise climatique. Pour me présenter rapidement, j’ai 25 ans, je suis catholique pratiquant et engagé depuis quelques années dans les mouvements climat en France. Je prends la parole au nom de plusieurs centaines de chrétiens, rassemblés au sein du collectif « Lutte et Contemplation ». Ce collectif veut concilier une action collective face aux défis écologiques et sociaux avec une vie de prière et de conversion.

Comme de nombreux jeunes de ma génération, j’ai une conscience aiguë du péril climatique en cours. Comme il est angoissant de savoir que nous vivons dans un monde où l’humanité est en passe de détruire ses conditions d’existence. Mais comme il est révoltant, aussi, d’entendre tous les discours sceptiques, relativistes, ou techno solutionnistes, y compris de certains gouvernements. Ainsi, je remercie chaleureusement le pape François de nous rappeler avec clarté et fermeté l’urgence des questions climatiques et sociales.

Je voudrais en particulier rebondir sur trois éléments présents dans l’exhortation apostolique qui me semblent particulièrement prophétiques.

Tout d’abord, la nécessité d’une réponse politique et d’une société civile forte face aux enjeux structurels posés par la crise écologique. La culpabilisation des consommateurs et l’insistance sur les petits gestes du quotidien est une stratégie dilatoire des puissants pour éviter de se remettre en question. En tant que diplômé de Polytechnique, j’ai souvent été confronté à ce discours irresponsable de la part des soi-disant élites du monde des affaires. Mais comme d’autres, j’ai choisi de m’écarter de la carrière prestigieuse qui s’offrait à moi. Il ne m’est pas possible de travailler pour une entreprise écocidaire guidée par le profit à court terme. J’ai décidé de travailler à temps partiel, dans une association de formation à la transition écologique, et de consacrer le reste de mon temps à des engagements bénévoles dans l’Église et dans la société civile. Je suis convaincu que nous avons besoin d’espaces de mobilisation collective face aux catastrophes écologiques.

Face à un pouvoir qui nous corrompt, face à des institutions internationales trop souvent au service d’indicateurs purement financiers, face à la technique qui nous asservit et nous isole, je voudrais relayer cette demande aux chrétiens : « Quel est le sens, en définitive, de [notre] travail et de [nos] efforts ? »

Je voudrais également souligner l’urgence, bien explicitée par le pape, de sortir des énergies fossiles. Le charbon est une énergie du 20e siècle. Il n’existe pas de pétrole vert et le gaz n’est pas une énergie de transition. Nous devons maintenant nous battre contre chaque nouveau projet de combustible fossile. Alors que nous sommes nombreux en France à nous mobiliser contre le projet mortifère EACOP de Total Énergies en Ouganda et Tanzanie, ces mots du pape résonnent en nous profondément. Nous partageons sa dénonciation des stratégies de marketing et de communication de telles entreprises qui induisent en erreur les populations locales, alors qu’un tel projet ne fera qu’accroître les inégalités et les dégâts environnementaux.

Pour finir, j’aimerais insister sur le fait que si nous nous mobilisons ainsi, ce n’est pas par devoir moral, ou par peur du futur, mais bien par amour et parce que notre foi en un Dieu miséricordieux nous y engage. Aujourd’hui la technique asservit les âmes, le système publicitaire corrompt nos esprits et l’idolâtrie du marché nous éloigne de Dieu. Comme le souligne Laudate Deum, nous ne pouvons pas espérer grandir dans notre relation au Christ, à nos frères et sœurs et à la Création, si nous continuons de subir les injonctions consuméristes du système économique. C’est bien pour suivre le Christ et pour aimer davantage que nous désirons lutter.

Pour autant, nos luttes seront vaines si nous ne nous laissons pas profondément réconcilier et renouveler par le Christ. Le mal contre lequel nous nous battons n’est pas extérieur à nous, ni à nos Églises, nous sommes traversés et fragilisés par les désirs de domination et de possession. Nous devons prendre le temps de contempler, de nous arrêter régulièrement et de nourrir notre relation à Dieu.

Alors que l’Église subit une forme d’effondrement dans nos pays occidentaux sécularisés, je suis convaincu qu’annoncer et vivre l’Évangile aujourd’hui nécessite une réponse intégrale et incarnée dans les défis de notre temps. C’est ancré dans le Christ, au côté des plus pauvres, communautairement, que nous devons nous mobiliser. Confiant que l’Esprit Saint nous précède dans nos luttes pour la justice sociale et climatique, demandons-lui l’audace et pour aller de l’avant joyeusement.

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Rédaction

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