Audience avec le Congrès juif mondial, 22 novembre 2022 © Vatican Media

Audience avec le Congrès juif mondial, 22 novembre 2022 © Vatican Media

Juifs et chrétiens ensemble pour « rendre le monde plus fraternel »

Audience avec le Congrès juif mondial

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« A nos deux communautés de foi, est confiée la tâche de travailler pour rendre le monde plus fraternel » afin que « la paix ne reste pas une promesse de l’autre monde, mais qu’elle soit déjà une réalité dans celui-ci ». C’est ce qu’a déclaré le pape aux représentants du Congrès juif mondial ce mardi 22 novembre 2022.

Le pape François a reçu en audience les participants à la réunion du Comité exécutif du Congrès juif mondial (World Jewish Congress), ce mardi matin 22 novembre, dans le Palais apostolique du Vatican. Le pape a salué une visite qui « témoigne des liens d’amitié qui nous unissent et les renforce » et a souligné que juifs et catholiques partagent « d’inestimables trésors spirituels ».

« Chers amis », a déclaré le pape, « à la lumière de l’héritage religieux que nous partageons, regardons le présent comme un défi qui nous est commun, comme une exhortation à agir ensemble ». Il a invité à lutter contre les inégalités et à promouvoir la justice qui, « avec la vérité, l’amour et la liberté », est « une des conditions fondamentales pour une paix durable dans le monde ». Il s’agit, a insisté François, de faire « tout ce qui est humainement possible pour arrêter la guerre et ouvrir des chemins de paix ».

La « promesse réconfortante » que juifs et chrétiens ont en commun, celle d’un « ciel nouveau et d’une terre nouvelle », nourrit « notre espérance et « notre engagement », a souligné le pontife. C’est pourquoi, face à l’injustice, « cause sous-jacente de tant de conflits », des initiatives « communes et concrètes » sont nécessaires ; si elles exigent « courage », « collaboration » et « créativité », elles s’appuient sur la foi et la confiance dans le Très-haut, sur la « prière » et le « dialogue fraternel ».

Le Congrès juif mondial est une fédération internationale de communautés et d’organisations juives, fondée en 1936 à Genève, et dont le siège mondial est à New York. D’après sa charte, le Congrès juif mondial a pour but premier d’être le « bras diplomatique du peuple juif ».

Discours du pape François

Chers représentants du Congrès juif mondial, je vous souhaite fraternellement la bienvenue. Je vous remercie, Monsieur l’Ambassadeur Lauder, pour vos aimables paroles. Cette visite témoigne des liens d’amitié qui nous unissent et les renforce : depuis le Concile Vatican II, votre organisation dialogue avec la Commission pour les rapports religieux avec le judaïsme et organise depuis des années des congrès d’un grand intérêt.

Juifs et catholiques, nous avons en commun d’inestimables trésors spirituels. Nous professons notre foi dans le Créateur du ciel et de la terre, qui a non seulement donné origine à l’humanité mais qui façonne tous les êtres humains à son image et à sa ressemblance (cf. Genèse 1, 26). Nous croyons que le Tout-puissant n’est pas resté distant de sa création, mais qu’il s’est révélé, non pas en communiquant uniquement avec quelques-uns, de manière isolée, mais en s’adressant à nous comme peuple. A travers la foi et la lecture des Ecritures transmises dans nos traditions religieuses, nous pouvons entrer en relation avec lui et devenir des collaborateurs de sa volonté providentielle.

Nous avons également un regard similaire sur la fin, habités par la confiance que, sur le chemin de la vie, nous n’allons pas vers le néant, mais à la rencontre du Très-haut qui prend soin de nous, à la rencontre de celui qui nous a promis, à la fin des temps, un royaume éternel de paix, où prendra fin tout ce qui menace la vie et la coexistence humaine. Notre monde est marqué par la violence, l’oppression et l’exploitation, mais tout cela n’a pas le dernier mot : la promesse fidèle de l’Eternel nous parle d’un avenir de salut, d’un ciel nouveau et d’une terre nouvelle (cf. Is 65, 17-18 ; Ap 21, 1), où la paix et la joie auront leur demeure stable, où la mort sera éliminée à jamais, où il essuiera les larmes sur tous les visages (Is 25, 7-8), où il n’y aura plus ni deuil, ni cri ni douleur (cf. Ap 21, 4). Le Seigneur réalisera cet avenir, ou plutôt il sera lui-même notre avenir. Et même s’il existe des idées différentes dans le judaïsme et dans le christianisme sur la façon dont se manifestera cet accomplissement, la promesse réconfortante que nous avons en commun demeure. Elle nourrit notre espérance, mais également notre engagement, afin que le monde que nous habitons et l’histoire que nous vivons reflètent la présence de celui qui nous a appelés à être ses adorateurs et les gardiens de nos frères. Chers amis, à la lumière de l’héritage religieux que nous partageons, regardons le présent comme un défi qui nous est commun, comme une exhortation à agir ensemble. A nos deux communautés de foi, est confiée la tâche de travailler pour rendre le monde plus fraternel, en luttant contre les inégalités et en promouvant une plus grande justice, afin que la paix ne reste pas une promesse de l’autre monde, mais qu’elle soit déjà une réalité dans celui-ci. Oui, la voie de la coexistence pacifique commence par la justice qui, avec la vérité, l’amour et la liberté, est une des conditions fondamentales pour une paix durable dans le monde (cf. Jean XXIII, Lettre encyclique Pacem in terris, 18.20.25). Combien d’êtres humains, créés à l’image et à la ressemblance de Dieu, sont défigurés dans leur dignité, à cause d’une injustice qui déchire la planète et qui est la cause sous-jacente de tant de conflits, le marécage dans lequel stagnent les guerres et la violence ! Celui qui a tout créé selon un ordre et avec harmonie nous invite à assainir ce marécage d’injustices qui sape la coexistence fraternelle dans le monde, autant que les ravages environnementaux compromettent la santé de la terre.

Des initiatives communes et concrètes visant à promouvoir la justice demandent du courage, de la collaboration et de la créativité. Et elles bénéficient grandement de la foi, de la capacité à mettre sa confiance dans le Très-haut et à se laisser guider par lui, plutôt que par des simples intérêts terrestres, qui sont toujours immédiats et qui manquent de clairvoyance, particuliers et incapables d’embrasser l’ensemble. La foi, elle, nous renvoie à la pensée que tout homme est à l’image et à la ressemblance du Très-haut, appelé à marcher vers son royaume. Puis les Ecritures nous rappellent que nous ne pouvons faire que peu de choses ou rien si Dieu ne nous donne pas la force et l’inspiration : « Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les bâtisseurs » (Ps 126, 1). En d’autres termes, nos initiatives politiques, culturelles et sociales pour améliorer le monde – ce que vous appelez « Tiqqun Olam » – ne pourront pas aboutir comme nous l’espérons sans la prière et sans l’ouverture fraternelle aux autres créatures au nom de l’unique Créateur, qui aime la vie et bénit les artisans de paix.

Aujourd’hui, frères et sœurs, dans nombre de régions du monde, la paix est menacée. Reconnaissons ensemble que la guerre, toutes les guerres, est toujours, de toute façon et partout un échec pour toute l’humanité ! Pensons à celle en Ukraine, une guerre sacrilège qui menace juifs et chrétiens de la même manière, les privant de leurs proches, de leur maison, de leurs biens, de leur vie même ! Sans une volonté sérieuse de s’approcher les uns des autres et dans le dialogue fraternel il n’est pas possible de préparer le terrain de la paix. En tant que juifs et chrétiens, cherchons à faire tout ce qui est humainement possible pour arrêter la guerre et ouvrir des chemins de paix.

Chers amis, merci de tout cœur pour cette visite ; que le Très-haut, qui a des « projets de paix et non de malheur » (Jér 29, 11), bénisse vos œuvres bonnes ! Qu’il vous accompagne en chemin et nous guide ensemble sur la voie de la paix. Shalom !

 

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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