« L’amour élimine les frontières, supprime les motifs de friction, surmonte les conflits. En slovaque on dit : l’amour déplace les montagnes », rappelle M. Richard Duda, président de l’Union centrale des communautés juives de Slovaquie.
Il a accueilli le pape François à la rencontre de la Place Rybné námestie à Bratislava, ce lundi 13 septembre 2021. Cette rencontre a aussi permis à deux témoins d’évoquer la Shoah en Slovaquie: un survivant de la Shoah, et une religieuse ursuline, soeur Samuela, qui a évoqué les 500 justes parmi les Nations déjà reconnus, parmi ceux qui ont sauvé des juifs pendant la persécution nazie.
M. Duda a témoigné de la force de son mariage avec une chrétienne : « Avec mon épouse bien-aimée nous formons un couple judéo-chrétien indissoluble depuis plus de trois décennies. Notre relation est un petit univers régi par le respect mutuel, le respect et la compréhension. »
Il voit l’importance de la famille pour soutenir les sociétés : « Je suis convaincu que des relations familiales harmonieuses sont capables d’assurer la stabilité de la société partout dans le monde. Dans des sociétés où l’appartenance religieuse ou ethnique ne sera qu’une opportunité d’enrichissement mutuel et de coexistence pacifique. »
Quant aux relations entre juifs et chrétiens, il recommande « la communication continue » comme « le principe le plus important pour guider le développement des relations judéo-chrétiennes ».
Voici notre traduction, rapide, de travail, de l’allocution de M. Duda, à partir d’une traduction en italien de l’original slovaque.
AB
Témoignage de M. Richard Duda
En Europe centrale, selon la tradition judéo-chrétienne, il existe des lieux qui incarnent la symbiose entre chrétiens et juifs. A Bratislava et dans toute la Slovaquie, il y en a plusieurs. Nous sommes dans une ville où les empereurs et l’impératrice étaient couronnés dans la cathédrale et où travaillait l’un des personnages les plus importants du judaïsme : Rabbi Chatam Sofer, connu dans le monde entier. Et nous sommes dans un lieu extraordinairement symbolique. Il est rempli de mémoire historique : ici le temple chrétien et le temple juif se côtoyaient. Les habitants de la ville multiethnique ont prié ici le Dieu unique et vécu ensemble les moments de joie et d’inquiétude que la vie apportait. L’architecture a donc incarné la coexistence des communautés jusqu’au moment où vint la période des ténèbres, période où la roue de l’histoire tourna à l’envers.
La communauté juive a failli disparaître pendant la Seconde Guerre mondiale et la synagogue a été victime d’une intervention barbare pendant la période de construction du communisme. Aujourd’hui, à la place de la synagogue, il y a un mémorial dédié aux victimes de crimes de guerre, un mémorial de l’Holocauste. C’est un porteur muet du message aux générations futures : le mal gagne quand les méchants arrivent au pouvoir et que les bons ne trouvent pas la force ou le courage de résister au mal. La Slovaquie est un pays qui a l’expérience des deux. Les témoignages de courage et de volonté de risquer sa vie sont la preuve que ces braves gens sont majoritaires en Slovaquie.
Pour la communauté juive de Slovaquie, c’est aujourd’hui un tournant, un moment historique, car vos pas en tant que Pontife vous ont amené à ce lieu de mémoire des vies perdues de milliers de membres de notre communauté. Nous apprécions vraiment ce geste. Les erreurs du passé ne doivent pas être oubliées afin de ne plus jamais les répéter. Puisse ce lieu véhiculer aussi le message de la collaboration entre chrétiens et juifs. Ces dernières années, nous avons essayé de l’intensifier. Nous organisons de nombreuses conférences, expositions et conférences sur les thèmes qui nous unissent. Nous sommes convaincus que la communication continue est le principe le plus important pour guider le développement des relations judéo-chrétiennes. Ce n’est qu’à travers elle qu’un rapprochement stable et une coexistence pacifique peuvent être atteints. Nous espérons que la sincérité et la disponibilité à un dialogue ouvert nous permettront un jour de mettre un terme même aux côtés obscurs de la coexistence, qui a marqué les relations entre les habitants de cette terre il y a 80 ans, lors du terrible conflit de la guerre mondiale.
L’amour du prochain a une place centrale dans le christianisme et aussi dans le judaïsme. Si le commandement de l’amour se traduit par des lois et des institutions, la société a la possibilité de devenir juste. Et nous voulons tous cela.
L’amour élimine les frontières, supprime les motifs de friction, surmonte les conflits. En slovaque on dit : l’amour déplace les montagnes. Avec mon épouse bien-aimée nous formons un couple judéo-chrétien indissoluble depuis plus de trois décennies. Notre relation est un petit univers régi par le respect mutuel, le respect et la compréhension. Je suis convaincu que des relations familiales harmonieuses sont capables d’assurer la stabilité de la société partout dans le monde, dans des sociétés où l’appartenance religieuse ou ethnique ne sera qu’une opportunité d’enrichissement mutuel et de coexistence pacifique.
© Traduction de Zenit, Anita Bourdin