Journée des grands-parents et des personnes âgées, 25 juillet 2021, capture ZENIT / Vatican Meda

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Journée des grands-parents : le pape exhorte à « partager du temps avec eux »

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Prévenir le regret de demain (Homélie intégrale)

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Le pape François exhorte à « partager du temps » avec les personnes âgées : « Il nous revient, aujourd’hui, de prévenir le regret de demain de ne pas avoir consacré assez d’attention à ceux qui nous ont aimés et nous ont donné la vie », souligne-t-il à l’occasion de la première Journée mondiale des grands-parents et des personnes âgées, ce 25 juillet 2021.

Encore convalescent après son hospitalisation pour une opération chirurgicale (4-14 juillet), le pape a délégué Mgr Rino Fisichella, président du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, pour célébrer la messe en la basilique Saint-Pierre – à laquelle ont participé 2500 personnes.

Dans son homélie lue par son représentant, le pape a invité à un examen de conscience : « Quel regard avons-nous sur les grands-parents et les personnes âgées ? Quelle est la dernière fois où nous avons tenu compagnie ou téléphoné à une personne âgée pour lui exprimer notre proximité et nous laisser bénir par ses paroles ?… Est-ce que j’ai rendu visite aux grands-parents ? Aux personnes âgées de ma famille ou de mon quartier ? Est-ce que je les ai écoutés ? Est-ce que je leur ai accordé un peu de temps ? »

Le pape a aussi mis en garde contre « une société qui court, affairée et indifférente, absorbée par trop de choses et incapable de s’arrêter pour porter un regard, une salutation, une caresse… une société dans laquelle nous sommes tous une foule anonyme et nous ne sommes plus capables de lever les yeux et de nous reconnaître ».

« Les grands-parents, qui ont nourri notre vie, ont aujourd’hui faim de nous : de notre attention, de notre tendresse. De nous sentir proches », a-t-il insisté.

Le pape a souhaité « une nouvelle alliance entre les jeunes et les personnes âgées », c’est-à-dire « partager le trésor commun de la vie… rêver ensemble… surmonter les conflits entre les générations ».

« Souvent dans nos sociétés, nous avons donné à la vie l’idée de “chacun pour soi”. Mais cela tue ! » a-t-il déploré, il faut que jeunes et personnes âgées soient « ensemble », comme « le trésor de la tradition et la fraîcheur de l’Esprit ».

Homélie du pape François

Alors qu’il s’asseyait pour enseigner, Jésus « leva les yeux et vit qu’une foule nombreuse venait à lui. Il dit à Philippe : “Où pourrions-nous acheter du pain pour qu’ils aient à manger ?” » (Jn 6, 5). Jésus ne se contente pas de donner des enseignements, mais il se laisse interroger par la faim qui habite la vie des gens. Et, ainsi, il nourrit la foule en distribuant cinq pains d’orge et deux poissons qu’il a reçus d’un jeune garçon. A la fin, comme il restait des morceaux de pain, il dit aux siens de les rassembler, « pour que rien ne se perde » (v. 12).

En cette Journée consacrée aux grands-parents et aux personnes âgées, je voudrais m’arrêter précisément sur ces trois moments : Jésus qui voit la faim de la foule ; Jésus qui partage le pain ; Jésus qui recommande de rassembler les morceaux qui sont restés. Trois moments qui peuvent être résumés en trois verbes : voir, partager, garder.

Voir. L’évangéliste Jean, au début du récit, souligne ce détail : Jésus lève les yeux et voit la foule affamée qui a beaucoup marché pour le rencontrer. C’est ainsi que commence le miracle, par le regard de Jésus qui n’est pas indifférent ou affairé, mais qui ressent les affres de la faim qui tenaille l’humanité épuisée. Il se préoccupe de nous, il a de la sollicitude pour nous, il veut assouvir notre faim de vie, d’amour et de bonheur. Dans les yeux de Jésus, nous voyons le regard de Dieu : c’est un regard attentif qui nous aperçoit, qui scrute les attentes que nous portons dans le cœur, qui voit la fatigue, l’épuisement et l’espoir avec lesquels nous allons de l’avant. Un regard qui sait saisir le besoin de chacun : aux yeux de Dieu il n’existe pas de foule anonyme, mais chaque personne avec sa faim. Jésus a un regard contemplatif, c’est-à-dire, capable de s’arrêter devant la vie de l’autre et de lire dedans.

C’est aussi le regard que les grands-parents et les personnes âgées ont eu sur notre vie. C’est la manière dont ils ont pris soin de nous depuis notre enfance. Après une vie souvent faite de sacrifices, ils ne nous ont pas été indifférents ou occupés sans nous. Ils ont eu des yeux attentifs, remplis de tendresse. Lorsque nous grandissions et que nous nous sentions incompris, ou apeurés par les défis de la vie, ils se sont rendus compte de ce qui changeait dans notre cœur, de nos larmes cachées et des rêves que nous portions au-dedans de nous. Nous sommes tous passés par les genoux des grands-parents, qui nous ont tenus dans les bras. Et c’est aussi grâce à cet amour que nous sommes devenus adultes.

Et nous : quel regard avons-nous sur les grands-parents et les personnes âgées ? Quelle est la dernière fois où nous avons tenu compagnie ou téléphoné à une personne âgée pour lui exprimer notre proximité et nous laisser bénir par ses paroles ? Je souffre quand je vois une société qui court, affairée et indifférente, absorbée par trop de choses et incapable de s’arrêter pour porter un regard, une salutation, une caresse. J’ai peur d’une société dans laquelle nous sommes tous une foule anonyme et nous ne sommes plus capables de lever les yeux et de nous reconnaître. Les grands-parents, qui ont nourri notre vie, ont aujourd’hui faim de nous : de notre attention, de notre tendresse. De nous sentir proches. Levons les yeux vers eux, comme Jésus le fait avec nous.

Partager. Après avoir vu la faim de ces personnes, Jésus veut les nourrir. Mais cela se fait grâce au don d’un jeune garçon, qui offre ses cinq pains et deux poissons. Il est beau qu’au centre de ce prodige, dont a bénéficié tant de personnes adultes – environs cinq mille personnes – il y ait un garçon, une jeune, qui partage ce qu’il a.

Aujourd’hui nous avons besoin d’une nouvelle alliance entre les jeunes et les personnes âgées, de partager le trésor commun de la vie, de rêver ensemble, de surmonter les conflits entre les générations afin de préparer l’avenir de tous. Sans cette alliance de vie, de rêves et d’avenir, nous risquons de mourir de faim, parce que les liens brisés, les solitudes, les égoïsmes, les forces destructrices augmentent. Souvent dans nos sociétés, nous avons donné à la vie l’idée de “chacun pour soi”. Mais cela tue ! L’Evangile nous exhorte à partager ce que nous sommes et ce que nous avons : c’est seulement ainsi que nous pouvons être rassasiés. J’ai rappelé plusieurs fois ce que dit à ce propos le prophète Joël : (cf. Jl 3, 1) : jeunes et personnes âgées ensemble. Les jeunes, prophètes de l’avenir qui n’oublient pas l’histoire d’où ils viennent ; les personnes âgées, rêveurs jamais fatigués qui transmettent l’expérience aux jeunes, sans leur barrer la route. Jeunes et personnes âgées, le trésor de la tradition et la fraîcheur de l’Esprit. Jeunes et personnes âgées ensemble. Dans la société et dans l’Eglise : ensemble.

Garder. Après qu’ils eurent mangé, l’Evangile mentionne que de nombreux morceaux de pain sont restés. Et Jésus recommande : « Rassemblez les morceaux en surplus, pour que rien ne se perde » (Jn 6, 12). C’est ainsi qu’est le cœur de Dieu: non seulement il nous donne plus que ce dont nous avons besoin, mais il se soucie aussi que rien ne se perde, pas même un fragment. Un petit morceau de pain peut sembler peu de chose, mais aux yeux de Dieu rien ne doit être rejeté. A plus forte raison personne ne doit être rejeté. C’est une invitation prophétique que nous sommes appelés aujourd’hui à faire retentir en nous et dans le monde : rassemblez, conservez avec soin, gardez. Les grands-parents et les personnes âgées ne sont pas des restes de vie, des déchets à jeter. Ils sont ces précieux morceaux de pain qui sont restés sur la table de notre vie, qui peuvent encore nous nourrir d’une odeur agréable que nous avons perdue, “l’odeur agréable de la mémoire”. Ne perdons pas la mémoire dont sont porteuses les personnes âgées, car nous sommes fils de cette histoire et sans racines nous flétrirons. Elles nous ont protégés tout au long du chemin de la croissance, maintenant c’est à nous de protéger leur vie, d’alléger leurs difficultés, d’écouter leurs besoins, de créer les conditions pour qu’ellespuissent être facilitées dans les tâches quotidiennes et ne se sentent pas seules. Demandons-nous : “Est-ce que j’ai rendu visite aux grands-parents ? Aux personnes âgées de ma famille ou de mon quartier ? Est-ce que je les ai écoutés ? Est-ce que je leur ai accordé un peu de temps ?”. Protégeons- les, afin que rien ne se perde : rien de leur vie et de leurs rêves. Il nous revient, aujourd’hui, de prévenir le regret de demain de ne pas avoir consacré assez d’attention à ceux qui nous ont aimés et nous ont donné la vie.

Frères et sœurs, les grands-parents et les personnes âgées sont le pain qui nourrit notre vie. Soyons reconnaissants pour leurs yeux attentifs, qui nous ont aperçus, pour leurs genoux qui nous ont tenus dans les bras, pour leurs mains qui nous ont accompagnés et soulevés, pour les jeux qu’ils ont faits avec nous et pour les caresses avec lesquelles ils nous ont consolés. S’il vous plaît, ne les oublions pas. Allions-nous à eux. Apprenons à nous arrêter, à les reconnaître, à les écouter. Ne les rejetons jamais. Gardons-les dans l’amour. Et apprenons à partager du temps avec eux. Nous en sortirons meilleurs. Et ensemble, jeunes et personnes âgées, nous nous rassasierons à la table du partage bénie par Dieu.

© Librairie éditrice du Vatican

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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