« La raison fondamentale du problème dramatique de la traite des personnes c’est la demande », affirme Mgr Janusz Urbańczyk, observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Dans son intervention à la 21e conférence contre la traite des personnes intitulée « Faire face à la demande : s’attaquer à une cause profonde de la traite des êtres humains », le 14 juin 2021, Mgr Urbańczyk rappelle que « deux facteurs clés » qui alimentent la demande et « déterminent le contexte » dans lequel vivent « les victimes de la traite » sont « la pauvreté, le chômage et le manque d’opportunités » et « un système économique, soucieux uniquement de maximiser le profit ».
Malgré « un effort considérable des gouvernements et des parlements nationaux », souligne l’observateur permanent du Saint-Siège, « nous constatons tristement, encore plus pendant la pandémie actuelle, que les trafics continuent d’augmenter, d’alimenter le profit et d’asservir les gens ».
Les normes législatives, explique-t-il, « sont soit mal appliquées, soit, ne reflétant pas suffisamment la réalité du phénomène, elles ne sont pas assez efficaces ».
D’autres éléments, poursuit-il, démontrent « l’éloignement de ces réglementations par rapport à la réalité ».
Il cite à ce propos les paroles du pape François : « La traite des êtres humains trouve un terrain fertile dans l’approche du capitalisme néolibéral, dans la dérégulation des marchés visant à maximiser les profits sans limites éthiques, sans limites sociales, sans limites environnementales. …Si cette logique est suivie, il n’y a que le calcul des avantages et des inconvénients. … Les choix ne se font pas en regardant les gens : les gens sont des nombres, à exploiter. »
Par conséquent, « une économie sans traite des êtres humains est une économie avec des règles de marché qui favorisent la justice, et non des intérêts particuliers exclusifs ».
Il faut une législation plus stricte
Dans son autre intervention à cette même conférence, le 15 juin 2021, Mgr Urbańczyk souligne que la traite des personnes « se superpose au trafic international de drogue ». « Ces deux phénomènes sont interconnectés, alimentés et justifiés », affirme-t-il.
Par ailleurs, poursuit l’observateur permanent, « l’exploitation sexuelle se conjugue de plus en plus avec le trafic de drogue. Ces deux fléaux font chaque jour des victimes aux quatre coins de la terre ».
Mgr Urbańczyk caractérise l’exploitation sexuelle comme « manque de culture, qui dégrade le corps d’autrui, principalement des femmes et de plus en plus d’enfants, en un objet qui peut être utilisé, niant la dignité humaine ».
Limiter « cette non-culture » nécessite, selon Mgr Urbańczyk, « la promotion d’une culture du respect et de la dignité, une sensibilisation et une formation constantes » ainsi qu’ « une législation de plus en plus stricte pour réprimer l’exploitation sexuelle ».
La pandémie, note l’observateur permanent, « n’a pas limité la demande qui favorise la traite à des fins d’exploitation sexuelle ; au contraire, il l’a augmenté ». La demande se fait souvent via Internet, note-t-il. D’où l’invitation de prendre des « mesures … pour garantir qu’Internet et les médias sociaux promeuvent la dignité de la personne humaine et ne deviennent pas un média qui alimente la violation des droits de l’homme ».
En concluant, Mgr Urbańczyk rappelle que « l’Église catholique, à travers ses différentes institutions, s’est depuis longtemps consacrée à la protection des victimes d’exploitation sexuelle ». En outre, « l’Église est engagée dans l’éducation et la formation des personnes, afin que les stéréotypes, souvent confirmés et promus par la société, puissent être surmontés ». Ce sont « évidemment de petites gouttes dans un océan, dit-il, mais elles peuvent produire des exemples qui peuvent être multipliés avec la bonne volonté des institutions et de la société civile ».