Le Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie invite à impliquer les jeunes dans la préparation des Journées mondiales de la jeunesse qui sont célébrées au niveau local à la fête du Christ-Roi, au terme de l’année liturgique.
Voici le texte des « Orientations pastorales » publiées ce 18 mai 2021.
Orientations pastorales pour la célébration de la JMJ dans les Églises particulières
1. Les Journées Mondiales de la Jeunesse
L’institution des Journées Mondiales de la Jeunesse a été sans aucun doute une grande intuition prophétique de Saint Jean-Paul II, qui a ainsi expliqué les raisons de sa décision : «Tous les jeunes doivent se sentir accompagnés par l’Église : par conséquent, que toute l’Église, en union avec le Successeur de Pierre, se sente toujours plus engagée, au niveau mondial, en faveur des jeunes, de leurs inquiétudes et de leurs sollicitations, de leurs ouvertures et leurs espoirs, afin de correspondre à leurs attentes, en leur communiquant la certitude qu’est le Christ, la Vérité qu’est le Christ, l’amour qu’est le Christ…».[1]
Le Pape Benoît XVI a pris le relais de son prédécesseur et, à plusieurs reprises, a souligné combien ces événements représentent un don providentiel pour l’Église et les a définis comme «un remède contre la fatigue de croire», «une manière nouvelle et rajeunie d’être chrétien», «une nouvelle évangélisation vécue». [2]
Pour le Pape François aussi, les Journées Mondiales de la Jeunesse sont source d’un élan missionnaire d’extraordinaire force pour toute l’Église et, en particulier, pour les jeunes générations. Quelques mois seulement après son élection, il inaugura son pontificat par la JMJ de Rio de Janeiro en juillet 2013, au terme de laquelle il déclara que cette JMJ avait été «une nouvelle étape dans le pèlerinage des jeunes à travers les continents avec la Croix du Christ. Il ne faut jamais oublier – avait-il alors expliqué – que les Journées Mondiales de la Jeunesse ne sont pas des “feux d’artifice”, des moments d’enthousiasme qui sont une fin en soi, mais des étapes d’un long parcours, commencé en 1985, sur initiative du Pape Jean-Paul II.»[3] Puis il avait fait une importante mise au point : «Ne l’oublions jamais : les jeunes ne suivent pas le Pape, ils suivent Jésus-Christ, en portant sa Croix. Et le Pape les guide, les accompagne sur ce chemin de foi et d’espérance». [4]
Les célébrations internationales de l’événement se tiennent généralement tous les trois ans, chaque fois dans un pays différent, et en présence du Saint-Père. La célébration ordinaire de la JMJ, en revanche, a lieu chaque année dans les Églises particulières, lesquelles se chargent d’organiser l’événement.
2. Les JMJ dans les Églises particulières
La Journée Mondiale de la Jeunesse célébrée dans chaque Église particulière revêt une grande importance et une grande valeur non seulement pour les jeunes qui vivent dans cette région particulière, mais pour toute la communauté ecclésiale locale.
Pour différents motifs objectifs d’étude, de travail ou en raison de difficultés financières, nombreux sont les jeunes qui n’ont pas la possibilité de participer aux célébrations internationales des JMJ. C’est pourquoi, il est important que chaque Église particulière leur offre aussi la possibilité de vivre en première personne, ne serait-ce qu’au niveau local, une «fête de la foi », un temps fort de témoignage, de communion et de prière semblable aux célébrations internationales qui ont profondément marqué la vie de tant de jeunes à travers le monde entier.
Pareillement, la Journée Mondiale de la Jeunesse célébrée au niveau local revêt une signification extrêmement importante pour l’Église particulière elle-même. Elle lui offre l’opportunité de sensibiliser et de former la communauté ecclésiale dans son ensemble – laïcs, prêtres, personnes consacrées, familles, adultes et personnes âgées – afin qu’elle soit toujours plus consciente de sa mission de témoin de la foi auprès des jeunes générations. L’Assemblée générale du Synode des Èvêques sur le thème «Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel » (2018) a rappelé que toute l’Église, universelle et particulière, et chacun de ses membres, doit se sentir responsable des jeunes et être prête à se laisser interpeller par leurs questionnements, leurs désirs et leurs difficultés. La célébration de ces Journées de la Jeunesse au niveau local est donc extrêmement utile pour maintenir vive dans la conscience ecclésiale l’urgence de cheminer avec les jeunes, de les accueillir et de les écouter avec patience, de leur annoncer la Parole de Dieu de manière affectueuse et énergique.[5]
Et justement à propos de la célébration des JMJ au niveau local, notre Dicastère, dans le cadre de ses compétences[6], a élaboré des orientations pastorales pour les Conférences épiscopales, les Synodes des Églises patriarcales et des Archidiocèses majeurs, les Diocèses/Éparchies, les associations et mouvements ecclésiaux et, enfin et surtout, pour les jeunes du monde entier, afin que les «JMJ diocésaines/éparchiales » soient vécues pleinement comme un moment de célébration «pour les jeunes » et «avec les jeunes ».
Ces orientations pastorales visent à encourager les Églises particulières à valoriser de plus en plus la célébration diocésaine des JMJ et à la considérer comme une occasion propice pour programmer et réaliser de manière créative des initiatives qui attestent que l’Église considère sa mission avec les jeunes «comme une priorité pastorale épocale sur laquelle elle doit investir du temps, des énergies et des ressources».[7] Il faut faire en sorte que les jeunes générations se sentent mises au centre de l’attention et de la sollicitude pastorale de l’Église. En effet, les jeunes désirent être impliqués et appréciés, se sentir co-protagonistes de la vie et de la mission de l’Église.[8]
Les indications qui suivent sont été conçues principalement pour chaque diocèse, lieu d’expression privilégié de l’Église locale. Mais elles doivent clairement être adaptées aux différentes situations dans lesquelles l’Église vit dans les diverses régions du monde, par exemple dans le cas où les diocèses/éparchies sont de petites tailles et disposent de peu de ressources humaines et matérielles. Dans ces cas concrets, ou lorsque l’opportunité pastorale l’impose, les circonscriptions voisines ou chevauchantes peuvent unir leurs forces pour célébrer ensemble la Journée de la Jeunesse entre plusieurs circonscriptions, ou au niveau de la région ecclésiastique, ou au niveau national.
3. La célébration de la JMJ au niveau local en la Solennité du Christ-Roi
À l’issue de la célébration eucharistique de la solennité du Christ-Roi, le 22 novembre 2020, le Pape François a voulu relancer la célébration des JMJ dans les Églises particulières et a annoncé qu’à partir de 2021, cette célébration, qui se tenait traditionnellement le Dimanche des Rameaux, se tiendrait désormais le dimanche de la Solennité du Christ-Roi.[9]
À cet égard, rappelons que Saint Jean-Paul II, en la Solennité du Christ-Roi en 1984, convoqua les jeunes pour une rencontre à l’occasion de l’Année Internationale de la Jeunesse (1985), événement qui – avec la convocation du Jubilé des Jeunes de l’Année Sainte de la Rédemption (1984) – marqua le début du long parcours des JMJ : «En cette fête […] – avait-il déclaré – l’Église proclame le Royaume du Christ, déjà présent, mais encore en croissance mystérieuse vers sa pleine manifestation. Vous, les jeunes, êtes les porteurs irremplaçables de la dynamique du Royaume de Dieu, l’espérance de l’Église et du monde ». Telle est donc la genèse des JMJ : le jour du Christ-Roi, les jeunes du monde entier sont invités «à venir à Rome pour une rencontre avec le Pape au début de la Semaine Sainte, le samedi et le dimanche des Rameaux ».[10]
En effet, il n’est pas difficile de voir le lien entre le Dimanche des Rameaux et la Solennité du Christ-Roi. Lors des Rameaux, l’Église fait mémoire de l’entrée de Jésus à Jérusalem, comme un «roi doux, monté sur un âne » (Mt 21,5) et acclamé comme Messie par la foule : «Hosanna au Fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur !» (Mt 21,9). L’évangéliste Luc ajoute explicitement le titre de «Roi » à l’acclamation que la foule adresse à «celui qui vient», soulignant ainsi que le Messie est aussi Roi, et que son entrée à Jérusalem représente en quelque sorte une intronisation royale : «Béni soit celui qui vient, le Roi, au nom du Seigneur» (Lc 19,38).
La dimension royale du Christ est si importante pour Luc qu’elle traverse la vie terrestre de Jésus-Christ, du début jusqu’à la fin et l’accompagne tout au long de son ministère. À l’Annonciation, l’Ange prophétise à Marie que l’enfant qu’elle a conçu recevra de Dieu «le trône de son père David, il régnera sur la maison de Jacob pour toujours, et son règne n’aura pas de fin» (Lc 1,32-33). Et au moment dramatique de la crucifixion, alors que les autres évangélistes se limitent à mentionner les insultes des deux crucifiés en même temps que Jésus, Luc présente l’émouvante figure du «bon larron» qui, du haut de l’échafaud de la croix, prie Jésus en disant : «Souviens-toi de moi quand tu seras dans ton royaume» (Lc 23,42). Les paroles d’accueil et de pardon que Jésus prononce en réponse à cette prière montrent clairement qu’il est un Roi venu pour sauver : «Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis» (Lc 23,43).
La grande annonce qui doit être faite aux jeunes et qui doit être au centre de toute JMJ diocésaine/éparchiale célébrée le jour du Christ-Roi est donc celle-ci : accueillez le Christ ! Accueillez-le comme Roi dans vos vies ! C’est un Roi qui est venu pour
sauver ! Sans lui, il n’y a pas de vraie paix, pas de vraie réconciliation intérieure et pas de vraie réconciliation avec les autres hommes ! Sans son Royaume, la société elle-même perd son visage humain. Sans le Royaume du Christ, toute véritable fraternité et toute proximité authentique avec ceux qui souffrent disparaissent.
Le Pape François a rappelé que «Le Mystère de Jésus-Christ Rédempteur de l’homme demeure au centre» des deux célébrations liturgiques, le Christ-Roi et le Dimanche des Rameaux.[11] Le cœur du message reste donc que la grandeur de l’homme vient de l’amour qui sait se donner aux autres «jusqu’au bout».
L’invitation est donc faite à tous les diocèses/éparchies de célébrer les JMJ en la solennité du Christ-Roi. Le Saint-Père souhaite en effet que ce jour-là, l’Église tout entière mette les jeunes au centre de son attention pastorale, prie pour eux, pose des gestes qui les rendent protagonistes, promeuve des campagnes de communication, etc. L’idéal serait d’organiser le jour-même du Christ-Roi, un événement (diocésain/éparchial, régional ou national). Toutefois, pour diverses raisons, il peut s’avérer nécessaire d’organiser l’événement à une autre date.
Cette célébration devra s’inscrire dans un parcours pastoral plus large, dont les JMJ ne sont qu’une étape.[12] Rien de surprenant donc que le Saint-Père ait déclaré: «La pastorale des jeunes ne peut être que synodale, autrement dit, constituer un “marcher ensemble” ». [13]
4. Éléments clés de la JMJ
Au cours du Synode des Évêques sur le thème «Les jeunes, la foi et le discernement vocationnel», plusieurs interventions des Pères synodaux ont abordé le thème de la Journée Mondiale de la Jeunesse. À cet égard, le Document Final affirme : «Les Journées Mondiales de la Jeunesse – nées d’une intuition prophétique de Saint Jean-Paul II, qui demeure un point de référence aussi pour les jeunes du troisième millénaire –, et les rencontres nationales et diocésaines/éparchiales jouent un rôle important dans la vie de beaucoup de jeunes car elles offrent une expérience vivante de foi et de communion, qui les aide à affronter les grands défis de la vie et à assumer de façon responsable leur place dans la société et dans la communauté ecclésiale».[14]
En soulignant que ces rencontres renvoient «à l’accompagnement pastoral ordinaire des différentes communautés, où l’accueil de l’Évangile doit être approfondi et traduit en choix de vie»,[15] le Document affirme qu’elles «offrent la possibilité de cheminer dans la dynamique du pèlerinage, d’expérimenter la fraternité avec tous, de vivre ensemble joyeusement la foi et de grandir dans l’appartenance à l’Église».[16]
Explorons maintenant quelques-uns des ces «éléments clés»[17] qui doivent être au cœur de chaque JMJ, même dans sa dimension locale, et qui ont donc une valeur programmatique évidente.
a. Que la Journée des Jeunes soit une “fête de la foi” !
La célébration des JMJ offre aux jeunes une expérience vivante et joyeuse de foi et de communion, un espace pour expérimenter la beauté du visage du Seigneur. [18] La rencontre avec la personne de Jésus-Christ est au centre de la vie de foi. C’est pourquoi chaque JMJ doit renouveler l’invitation faite à chaque jeune de rencontrer le Christ et d’entamer un dialogue personnel avec lui. C’est «la fête de la foi, lorsque l’on rend grâce ensemble au Seigneur, l’on chante, l’on écoute la Parole de Dieu, l’on demeure en silence d’adoration. Tout cela est le point culminant de la JMJ».[19]
Dans ce sens, le programme des JMJ internationales (dimensions kérygmatique, formative, testimoniale, sacramentelle, artistique, etc.) peut inspirer les réalités locales, qui pourront l’adapter de manière créative. Une attention particulière devra être accordée aux moments d’adoration silencieuse de l’Eucharistie, comme acte de foi par excellence, et aux liturgies pénitentielles, comme lieu privilégié de rencontre avec la miséricorde de Dieu.
En outre, il faut tenir compte du fait qu’à chaque JMJ, l’enthousiasme naturel des jeunes, le dynamisme avec lequel ils embrassent les choses qui les impliquent et qui caractérise aussi leur manière de vivre la foi, tout cela stimule et revigore la foi de tout le peuple de Dieu. Convoqués par l’Évangile et invités à une expérience avec le Seigneur, les jeunes deviennent souvent des témoins courageux de la foi, ce qui rend toujours l’événement des JMJ surprenant et unique.
b. Que la Journée des Jeunes soit une “expérience d’Église” !
C’est important que la célébration diocésaine/éparchiale de la JMJ devienne une occasion pour les jeunes de faire l’expérience de la communion ecclésiale et de prendre conscience du fait qu’ils font partie intégrante de l’Église. La première forme d’implication des jeunes doit être l’écoute. Dans la préparation de la Journée diocésaine/éparchiale de la jeunesse, il convient de trouver des moments et des moyens appropriés pour que la voix des jeunes soit entendue au sein des structures de communion existantes : conseils diocésains/éparchiaux et interdiocésains/interéparchiaux, conseils presbytéraux, conseils locaux des évêques… Rappelons-nous toujours qu’ils sont le visage jeune de l’Église !
Les différents charismes présents sur le territoire doivent pouvoir trouver une place aux côtés des jeunes. Il est fondamental que l’organisation de la célébration diocésaine/éparchiale de la JMJ soit chorale, impliquant les différents états de vie, dans une proposition de travail synodal, comme l’a souhaité le Saint-Père dans Christus Vivit: «Animés par cet esprit, nous pourrons avancer vers une Eglise participative et coresponsable, capable de mettre en valeur la richesse de la diversité dont elle se compose, en accueillant aussi avec gratitude l’apport des fidèles laïcs, notamment des jeunes et des femmes, celui de la vie consacrée féminine et masculine, et celui de groupes, d’associations et de mouvements. Personne ne doit être mis ou ne doit pouvoir se mettre à l’écart». [20] Ainsi, l’on pourra rassembler et coordonner toutes les forces vives de l’Église particulière, ainsi que réveiller celles qui sont «endormies».
Dans ce contexte, la présence de l’Évêque local et sa disponibilité à être parmi les jeunes seront, pour les jeunes eux-mêmes, un grand signe d’amour et de proximité. Pour de nombreux jeunes, en effet, la célébration diocésaine/éparchiale des JMJ devient souvent une occasion de rencontre et de dialogue avec leur pasteur. Le Pape François encourage ce style pastoral de proximité, où «il faut privilégier le langage de la proximité, la langue de l’amour désintéressé, relationnel et existentiel qui touche le cœur, atteint la vie, éveille l’espérance et les désirs».[21]
c. Que la Journée des Jeunes soit une “expérience missionnaire” !
Les JMJ internationales se sont avérées une excellente occasion pour les jeunes de vivre une expérience missionnaire. Il devrait en être de même pour la célébration diocésaine/éparchiale. Comme le dit le Pape François, «la pastorale des jeunes doit toujours être une pastorale missionnaire».[22]
Pour ce faire, l’on pourra par exemple organiser des missions au cours desquelles les jeunes sont invités à visiter les personnes à domicile pour leur porter un message d’espoir, un mot de réconfort ou simplement pour se mettre à leur écoute.[23] Forts de leur enthousiasme, les jeunes – dans la mesure du possible – peuvent également être les protagonistes de moments d’évangélisation publique, avec des chants, des prières et des témoignages, dans les rues et sur les places de la ville où se retrouvent habituellement leurs pairs, car les jeunes sont les meilleurs évangélisateurs des jeunes. Leur présence et leur foi joyeuse constituent déjà en soi une «annonce vivante» de la Bonne Nouvelle qui attire d’autres jeunes.
L’on devra également encourager et promouvoir des activités dans lesquelles les jeunes font l’expérience du bénévolat, du service gratuit et du don de soi. Il ne faut pas non plus oublier que le dimanche qui précède la Solennité du Christ-Roi, l’Église célèbre la Journée Mondiale des pauvres. Quelle meilleure occasion de promouvoir des initiatives dans lesquelles les jeunes donnent de leur temps, de leur force aux plus pauvres, aux exclus, à ceux qui sont mis à l’écart par la société ! De cette façon, les jeunes se voient offrir la possibilité de devenir «les protagonistes de la révolution de la charité et du service, capables de résister aux pathologies de l’individualisme consumériste et superficiel».[24]
d. Que la Journée des Jeunes soit une “occasion de discernement vocationnel” et un “appel à la sainteté”!
Dans le cadre d’une expérience de foi ecclésiale et missionnaire forte, la priorité doit être donnée à la dimension vocationnelle. Il s’agit d’une approche graduelle qui fait d’abord comprendre aux jeunes que toute leur vie est placée devant Dieu qui les aime et les appelle. Dieu les a appelés d’abord à la vie, Il les appelle sans cesse au bonheur, Il les appelle à le connaître et à écouter sa voix et surtout à accepter son Fils Jésus comme leur maître, leur ami, leur Sauveur. Reconnaître et se mesurer avec ces “vocations fondamentales” représente un premier grand défi pour les jeunes car, lorsqu’ils sont pris au sérieux, ces premiers “appels” de Dieu orientent déjà vers des choix de vie
exigeants : l’acceptation de l’existence comme un don de Dieu, à vivre donc en référence à Lui et non de manière autoréférentielle ; le choix d’un style de vie chrétien, dans les relations affectives et sociales ; le choix du parcours d’étude, de l’engagement dans le travail et de tout son avenir de manière à ce qu’il soit pleinement en accord avec l’amitié avec Dieu que l’on a embrassée et que l’on veut conserver ; le choix de faire de toute son existence un don pour les autres qui sera vécu dans le service et l’amour désintéressé. Il s’agit de choix souvent radicaux, en réponse à l’appel de Dieu, qui donnent une orientation décisive à toute la vie des jeunes. «La vie […] est le temps des choix forts, décisifs, éternels – a précisé le Pape François parlant aux jeunes –. Des choix banals mènent à une vie banale, des grands choix rendent grande la vie».[25]
À l’intérieur de cet “horizon vocationnel” plus large, il ne faut pas non plus craindre de proposer aux jeunes le choix incontournable de l’état de vie qui correspond à l’appel que Dieu adresse à chacun d’entre eux individuellement, qu’il s’agisse du sacerdoce ou de la vie consacrée, même sous la forme monastique, ou du mariage et de la famille. Dans ce sens, l’implication des séminaristes, des personnes consacrées, des couples mariés et des familles peut être d’une grande aide car, par leur présence et leur témoignage, ils peuvent contribuer à susciter chez les jeunes les bonnes questions vocationnelles et le désir de se mettre à la recherche du «grand projet» que Dieu a prévu pour eux. Dans le processus délicat qui doit les amener à mûrir ces choix, les jeunes doivent être accompagnés et prudemment éclairés. Le moment venu, il faudra donc les encourager à faire leur choix personnel de manière décisive, confiants dans l’aide de Dieu, sans rester dans un état perpétuel d’indétermination.
À la base de tout choix vocationnel, se trouve l’appel encore plus fondamental à la sainteté. Les JMJ doivent faire résonner dans le coeur des jeunes l’appel à la sainteté[26] comme un véritable chemin vers le bonheur et l’épanouissement personnel. Une sainteté selon l’histoire et le caractère personnel de chaque jeune, sans mettre de limites aux voies mystérieuses que Dieu réserve à chacun et qui peuvent conduire à des histoires héroïques de sainteté – comme cela s’est produit et se produit encore pour de nombreux jeunes – ou à cette «sainteté de la porte d’à côté» dont personne n’est exclu. Il convient donc de mettre à profit le riche patrimoine des saints de l’Église locale et universelle, frères aînés dans la foi, dont les vies nous confirment que le chemin de la sainteté est non seulement possible et praticable, mais est aussi source de grande joie.
e. Que la Journée des Jeunes soit une “expérience de pèlerinage”!
Les JMJ ont été, dès le début, un grand pèlerinage. Un pèlerinage dans l’espace – de différentes villes, pays et continents vers la destination choisie pour la rencontre avec le Pape et les autres jeunes – et un pèlerinage dans le temps – d’une génération de jeunes à une autre qui a “pris le relais” – qui a profondément marqué ces trente-cinq dernières années de la vie de l’Église. Les jeunes des JMJ sont donc un peuple de pèlerins. Ils ne sont pas des voyageurs sans destination, mais un peuple uni, des pèlerins qui “marchent ensemble” vers un but, vers une rencontre avec Quelqu’un, Celui qui est capable de donner un sens à leur existence, le Dieu fait homme qui appelle chaque jeune à devenir son disciple, à tout quitter et à «marcher derrière lui». La logique du pèlerinage exige de se focaliser sur l’essentiel, invite les jeunes à laisser derrière eux les sécurités confortables et vides pour adopter un style de voyage sobre et accueillant, ouvert à la Providence et aux «surprises de Dieu», un style qui éduque au dépassement de soi et à la capacité d’affronter les défis qui se présentent sur le chemin.
La célébration diocésaine/éparchiale des JMJ peut donc proposer des moyens concrets afin que les jeunes puissent faire de véritables expériences de pèlerinage. Des expériences qui incitent les jeunes à quitter leurs maisons et à se mettre en route, un parcours au cours duquel ils apprennent à connaître la sueur et le labeur du voyage, la fatigue du corps et la joie de l’esprit. En effet, à travers le pèlerinage fait ensemble, nous nous faisons souvent de nouveaux amis, nous expérimentons la passionnante communauté d’idéaux en regardant ensemble vers l’objectif commun, le soutien mutuel dans les difficultés, la joie de partager le peu dont nous disposons. Tout cela est d’une importance capitale aujourd’hui spécialment, car de nombreux jeunes risquent de s’isoler dans des mondes virtuels et irréels, loin de la poussière des «routes du monde». Ils sont donc privés de cette satisfaction profonde qui naît de la conquête dure et patiente de l’objectif désiré, non pas grâce à un simple clic, mais grâce à la ténacité et à la persévérance du corps et de l’âme. De cette manière, la Journée de la jeunesse diocésaine/éparchiale est une occasion précieuse pour faire découvrir aux jeunes générations les sanctuaires locaux ou d’autres lieux significatifs de la piété populaire. Sans jamais oublier que, «Les diverses manifestations de piété populaire, en particulier les pèlerinages, attirent les jeunes qui n’ont pas tendance à s’insérer facilement dans les structures ecclésiales, et sont une expression concrète de la confiance en Dieu. »[27]
f. Que la Journée des Jeunes soit une “expérience de fraternité universelle”!
Les JMJ doivent être une occasion de rencontre pour tous les jeunes, et pas seulement pour les jeunes catholiques. «Chaque jeune a quelque chose à dire aux autres, a quelque chose à dire aux adultes, a quelque chose à dire aux prêtres, aux sœurs, aux évêques et au Pape ! ».[28]
Dans cette optique, la célébration diocésaine/éparchiale des JMJ peut être une occasion opportune pour faire rassembler et dialoguer tous les jeunes qui vivent sur un territoire donné, au-delà de leurs croyances, de leur vision de la vie, de leurs convictions. Chaque jeune doit se sentir invité à participer et accueilli comme un frère. Il est important de construire «une pastorale des jeunes, capable de créer des espaces inclusifs, où il y aura de la place pour toutes sortes de jeunes et où se manifestera réellement que nous sommes une Église aux portes ouvertes».[29]
5. Le protagonisme des jeunes
Comme nous l’avons déjà dit plus haut, il est important que les agents de la pastorale des jeunes soient de plus en plus attentifs à impliquer les jeunes dans toutes les étapes de la planification pastorale des JMJ, selon un style synodal-missionnaire, en valorisant la créativité, le langage et les méthodes propres à leur âge. Qui connaît mieux qu’eux le langage et les problèmes de leurs pairs ? Qui est le plus à même de les atteindre par l’art, les médias sociaux… ?
Le témoignage et l’expérience des jeunes qui ont déjà participé aux JMJ internationales méritent d’être valorisés dans la préparation de l’événement diocésain/éparchial.
Dans certaines Églises particulières, après leur participation aux JMJ internationales ou à l’organisation d’initiatives pour les jeunes au niveau national et diocésain/éparchial, des jeunes «vétérans» de ces expériences ont été impliqués dans la mise en place d’équipes de pastorale des jeunes dans différents domaines : paroissial, diocésain/éparchial, national, etc. Cela prouve que lorsque les jeunes sont des protagonistes à part entière de la réalisation d’événements réellement significatifs, ils s’approprient facilement des idéaux qui ont inspiré ces événements, ils en saisissent l’importance avec leur esprit et leur cœur, ils s’en passionnent et sont prêts à consacrer du temps et de l’énergie pour les partager avec les autres. Des expériences fortes de foi et de service donnent souvent lieu à une volonté de s’engager dans le travail pastoral ordinaire de sa propre Église locale.
Nous insistons pour dire qu’il faut avoir le courage d’impliquer et de confier des rôles actifs aux jeunes, aussi bien ceux qui proviennent des différentes réalités pastorales présentes dans le diocèse que ceux qui n’appartiennent à aucune communauté, groupe de jeunes, association ou mouvement. La JMJ diocésaine/éparchiale peut être une belle occasion de mettre en valeur la richesse de l’Église locale, en évitant que les jeunes moins présents et moins «actifs» dans les structures pastorales établies ne se sentent exclus. Tous doivent se sentir des «invités spéciaux», tous doivent se sentir attendus et aimés, dans leur irrépétable unicité et leur richesse humaine et spirituelle. L’événement diocésain/éparchial peut donc être une occasion propice pour stimuler et accueillir tous ces jeunes qui cherchent peut-être leur place dans l’Église et qui ne l’ont pas encore trouvée.
6. Message annuel du Saint-Père pour la JMJ
Chaque année, en vue de la célébration diocésaine/éparchiale des JMJ, le Saint-Père publie un Message pour les jeunes. Il serait donc opportun que les rencontres préparatoires et la JMJ diocésaine/éparchiale elle-même s’inspirent des paroles que le Saint-Père adresse aux jeunes, et en particulier du passage biblique proposé dans le Message.
Il serait également important que les jeunes écoutent la Parole de Dieu et la parole de l’Église, et qu’ils les entendent de la vive voix des personnes qui leur sont proches, qui connaissent en profondeur leur caractère, leur histoire, leurs goûts, leurs difficultés et leurs batailles, leurs attentes et leurs espoirs, et qui savent donc bien appliquer les textes bibliques et magistériels aux situations concrètes que vivent les jeunes qu’ils ont sous les yeux. Ce travail de médiation, fait dans la catéchèse et dans le dialogue, aidera également les jeunes à savoir identifier les moyens concrets pour témoigner de la Parole de Dieu qu’ils ont entendue et la vivre dans leur vie quotidienne, l’incarner dans la famille, dans le milieu de travail ou d’étude, entre amis.
La ligne proposée par ce Message et destinée à accompagner le cheminement de l’Église universelle avec les jeunes, pourra donc être déclinée avec intelligence et grande sensibilité culturelle, en tenant compte de la réalité locale. Elle pourrait également inspirer le parcours de la pastorale des jeunes de l’Église locale, sans oublier les deux grandes lignes d’action que le Pape François a indiquées : la recherche et la croissance.[30]
Le Message pourra aussi être relayé à travers diverses expressions artistiques ou initiatives à caractère social, comme le Saint-Père nous y a invités dans son Message pour la XXXVe JMJ: « [proposer] au monde, à l’Église, aux autres jeunes, quelque chose de beau dans le domaine spirituel, artistique, social».[31] En outre, son contenu pourrait également être repris pendant d’autres moments significatifs de l’année pastorale, tels que : le mois missionnaire, le mois consacré à la Parole de Dieu ou aux vocations, selon les indications des différentes Conférences épiscopales.
Enfin, le message du Saint-Père pourrait devenir le thème de diverses autres rencontres pour les jeunes, proposées par les animateurs de la pastorale des jeunes de l’Église locale, des associations ou des mouvements ecclésiaux.
7. Conclusion
La célébration diocésaine/éparchiale des JMJ constitue sans aucun doute une étape importante dans la vie de chaque Église particulière, un moment privilégié de rencontre avec les jeunes générations, un instrument d’évangélisation du monde des jeunes et de dialogue avec eux. N’oublions jamais que «L’Église a tant de choses à dire aux jeunes et les jeunes ont tant de choses à dire à l’Église. »[32]
Les orientations pastorales contenues dans ces pages veulent être un guide qui présente les motivations idéales et leurs possibles mises pratiques afin que les JMJ diocésaines/éparchiales deviennent une occasion pour faire ressortir le potentiel de bien, la générosité, la soif de valeurs authentiques et de grands idéaux que chaque jeune porte en lui. Nous réitérons donc combien il est important que les Églises particulières accordent une attention particulière à la célébration de la Journée de la Jeunesse diocésaine/éparchiale, afin qu’elle soit valorisée comme il se doit. Investir sur les jeunes, c’est investir sur l’avenir de l’Église ; c’est promouvoir les vocations, c’est initier efficacement la préparation lointaine des familles de demain. Il s’agit donc d’une tâche vitale pour chaque Église locale, et pas simplement d’une activité en plus à côté des autres.
Confions à la Sainte Vierge Marie le parcours de la pastorale des jeunes dans le monde entier. Marie, comme nous le rappelle si bien le Pape François dans Christus Vivit, «regarde ce peuple pèlerin, peuple de jeunes qu’elle aime, qui la cherche en faisant silence dans le cœur, même si, sur le chemin, il y a beaucoup de bruit, de conversations et de distractions. Mais, aux yeux de la Mère, seul convient le silence chargé d’espérance. Et ainsi, Marie éclaire toujours notre jeunesse». [33]
Sa Sainteté le Pape François a donné son approbation
à la publication de ce document
Du Vatican, 22 avril 2021
Anniversaire de la remise de la Croix des JMJ aux jeunes
Kevin Card. Farrell
Préfet
P. Alexandre Awi Mello, I.Sch.
Secrétaire
________________________
[1] Jean-Paul II, Discours Au Collège des cardinaux, à la Curie et à la Prélature Romaine pour la présentation des vœux de Noël (20 décembre 1985), dans «Insegnamenti » VIII, 2 (1985), pp. 1559-1560.
[2] Cf. Benoît XVI, Discours du Pape Benoît XVI aux Cardinaux, à la Curie Romaine et à la Famille Pontificale, pour la présentation des Vœux de Noël, dans «Insegnamenti » VII, 2 (2011), pp. 951-955.
[3] François, Angélus, dans «Insegnamenti » I, 2 (2013), p. 155.
[4] Ibidem.
[5] Cf. Document Final de la XVe Assemblée Générale Ordinaire du Synode des Évêques, 4. Dorénavant, le document sera cité comme DF.
[6] Le Dicastère pour les Laics, la Famille et la Vie «exprime la sollicitude particulière de l’Église à l’égard des jeunes, en mettant en avant leur protagonisme au milieu des défis du monde d’aujourd’hui. Il soutient les initiatives du Saint-Père dans le domaine de la pastorale des jeunes et se met au service des conférences épiscopales, des mouvements et des associations de jeunes internationaux, en promouvant leur collaboration et en organisant des rencontres au niveau international. Un temps fort de son activité est la préparation des Journées Mondiales de la Jeunesse. » (Statuts, art. 8).
[7] DF 119.
[8] Cf. Ibidem.
[9] Cf. FRANÇOIS, Homélie de la Sainte Messe en la Solennité du Christ-Roi, dans « L’Osservatore Romano », 23 novembre 2020, p. 6. On suggère que la Journée Mondiale de la Jeunesse se tienne à la même date que la solennité du Christ-Roi, même dans les Églises dont le rite ne prévoit pas cette solennité et dans celles qui la célèbre un autre jour. Toutefois, les Ordinaires ont la faculté d’en décider autrement.
[10] JEAN-PAUL II, Angélus, dans «Insegnamenti » VII, 2 (1984), p. 1298.
[11] FRANÇOIS, Homélie de la Sainte Messe en la Solennité du Christ-Roi, dans « L’Osservatore Romano », art. cit.
[12] DF 142.
[13] FRANÇOIS, Exhortation apostolique post-synodale Christus Vivit, 2019, n. 206. Dorénavant, l’exhortation sera citée comme ChV.
[14] DF 16.
[15] Ibidem.
[16] Ibidem, 142.
[17] Pour approfondir l’apport des JMJ au cheminement spirituel des jeunes, voir : BENOÎT XVI, Discours du Pape Benoît XVI aux Cardinaux, à la Curie Romaine et à la Famille Pontificale, pour la présentation des Vœux de Noël, dans « Insegnamenti » VII, 2 (2011), op. cit.; FRANÇOIS, Audience générale, dans « Insegnamenti » I, 2 (2013), pp. 209-211210.
[18] Cf. DF 16 e 142.
[19] François, Audience générale, dans «Insegnamenti » I, 2 (2013), p. 210.
[20] ChV 206.
[21] ChV 211.
[22] ChV 240.
[23] Cf. ChV 240.
[24] ChV 174.
[25] FRANÇOIS, Homélie de la Sainte Messe en la Solennité du Christ-Roi, dans « L’Osservatore Romano », art. cit.
[26] Cf. FRANÇOIS, Exhortation apostolique Gaudete et Exsultate, 2018, n. 2.
[27] ChV 238.
[28] FRANÇOIS, Discours à la Veillée de Prière en préparation à la Journée Mondiale de la Jeunesse, dans « L’Osservatore Romano », 10-11 avril 2017, p. 7.
[29] ChV 234.
[30] Cf. ChV 209.
[31] FRANÇOIS, Message pour la XXXVe Journée Mondiale de la Jeunesse, dans « L’Osservatore Romano », 6 mars 2020, p. 8.
[32] JEAN-PAUL II, Exhortation apostolique post-synodale Christisfideles Laici, 1988, n.46.
[33] ChV 48.