Mgr Ivan Jurkovic © RV

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Liberté religieuse : Mgr Jurkovic s’inquiète de la partialité d’un rapport du Conseil des droits de l’homme

Un « changement considérable » dans la méthode

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Un rapport du Conseil des droits de l’homme sur la liberté de religion ou de conviction qui risque de « créer davantage de conflit » et de « compromettre encore les droits que ce Conseil devrait promouvoir et protéger » : c’est ce que craint Mgr Ivan Jurkovic, déplorant « la décision de limiter le sujet » aux cas d’islamophobie qui ignore le « contexte général de persécution de toutes les personnes de foi ».

Mgr Ivan Jurkovic, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies et d’autres Organisations internationales à Genève, est intervenu à la 46ème session du Conseil des droits de l’homme, sur le point 3 concernant le rapport du rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, le 4 mars 2021 à Genève.

Évoquant « l’universalité de la liberté religieuse » entérinée dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, Mgr Jurkovic s’inquiète de l’absence de référence aux autres religions, qui manifeste « un changement considérable dans l’approche méthodologique ». D’autre part, souligne-t-il, il est urgent que les autorités civiles s’engagent à « respecter, protéger et défendre la liberté de religion ou de conviction »

Voici notre traduction de l’intervention de Mgr Jurkovic, prononcée en anglais.

HG

Intervention de Mgr Jurkovic

Madame la Présidente,

La délégation du Saint-Siège salue le rapport du rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, question que suit le Saint-Siège et sur laquelle il est activement engagé.

Le Saint-Siège se félicite de l’important travail présenté dans le rapport qui expose des situations de discrimination, de stigmatisation, des actes de violence et des restrictions du droit à manifester sa propre religion, à la fois individuellement et en communauté, auxquelles sont souvent confrontées des personnes musulmanes.

Dans le scénario actuel, où la liberté religieuse est de plus en plus érodée par la nécessité de protéger des vies humaines contre la diffusion de la pandémie de Covid-19, il est d’une importance capitale que les autorités civiles s’engagent à respecter, protéger et défendre la liberté de religion ou de conviction, en tant que dimension la plus intime de la dignité de la personne humaine, en sa conscience.[i]

Toutefois, ma délégation observe avec préoccupation la portée étroite du rapport présenté par le rapporteur spécial sur le thème « Haine antimusulman/Islamophobie ». Le Saint-Siège ne peut que déplorer le fait que le rapport ne tient pas suffisamment compte du contexte général de persécution de toutes les personnes de foi (ou qui n’ont pas de foi). Certes, tous les actes de haine religieuse, de discrimination et de persécution doivent être vigoureusement condamnés, y compris lorsqu’ils sont dirigés contre les musulmans.

Néanmoins, sachant l’universalité de la liberté religieuse entérinée dans la Déclaration universelle des droits de l’homme et réitérée dans la Résolution initiale du Conseil des droits de l’homme qui a établi le mandat du rapporteur spécial,2 la décision de limiter le sujet à un groupe religieux particulier, sans référence aux nombreux autres, pourrait représenter un changement considérable dans l’approche méthodologique.

Un tel changement, au lieu de réduire les représentations négatives et la stigmatisation de tels groupes, présente un risque réel d’être clivant, d’encourager une mentalité du « nous » vs « eux », abondamment documentée dans le rapport. En effet, toute législation ou pratique qui désignerait un groupe spécifique en se basant, au moins en partie, sur des critères religieux, représente une forme subtile de discrimination, quels que soient les effets désirés ou les conséquences réelles de telles lois ou pratiques.

Il est profondément préoccupant, par conséquent, de voir que le présent rapport, qui devrait défendre le droit humain fondamental et universel à la liberté de religion ou de conviction, s’est focalisé sur un seul groupe religieux à l’exclusion des autres, risquant de polariser la communauté internationale et de créer davantage de conflit susceptible de compromettre encore les droits que ce Conseil devrait promouvoir et protéger.

Merci, Madame la Présidente.

NOTES

[i] Cf. Déclaration de Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire du Saint-Siège pour les Relations avec les Etats, au Segment de haut niveau de la 46ème session du Conseil des droits de l’homme, 22-24 février 2021.

2 On peut le déduire de la Résolution initiale du Conseil des droits de l’homme qui institua le mandat du rapporteur spécial A/HRC/RES/6/37, du 14 décembre 2007. La seule référence à l’ « islamophobie » se trouve au paragraphe opérationnel 2, qui affirme : « [Le Conseil des droits de l’homme] reconnaît avec une profonde inquiétude l’augmentation générale de cas d’intolérance et de violence contre des membres de nombreuses communautés religieuses et autres, dans diverses parties du monde, notamment des cas motivés par l’islamophobie, l’antisémitisme et la christianophobie ». Il apparaît clairement dans ce contexte que l’accent est mis sur l’élimination des cas d’intolérance et de violence contre des groupes religieux globalement et que, lutter séparément contre l’islamophobie, l’antisémitisme, la christianophobie et la discrimination à l’égard de n’importe quel autre groupe spécifique n’est pas envisagé dans le mandat du rapporteur spécial.

 

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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