Mont du Temple, Jérusalem © WIKIMEDIA COMMONS - Godot13

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« Le Temple de Jérusalem et le sanctuaire de son corps »

« Les signes et le cœur »

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Le Temple de Jérusalem et le sanctuaire de son corps

 

1-Les vendeurs chassés du Temple ou la purification du Temple (hieros)

(Jn 2, 13-22 (// Mt 21,12-13 ; Mc 11, 11. 15-17 ; Lc 19, 45-46).

« La Pâque de Jésus était proche et Jésus monta à Jérusalem. Il trouva dans le Temple les vendeurs de bœufs, de brebis et de colombes et les changeurs assis. Se faisant un fouet de cordes, il les chassa tous du Temple et les brebis et les bœufs ; il répandit la monnaie des changeurs et renversa leurs tables, et aux vendeurs de colombes, il dit : “Ne faites pas de la maison de mon Père, une maison de commerce”. Ses disciples se rappelèrent qu’il est écrit : “Le zèle pour ta maison me dévorera(Ps 69,10) (Jn 2,13-17).

La violence des gestes de Jésus étonne : il prend un fouet, renverse les tables des changeurs et dit aux vendeurs de colombes : « Ne faites pas de la maison de mon Père, une maison de commerce ». Ils ont commis un sacrilège : ils ont fait du Temple « une maison de commerce », « un repaire de brigands » (Jr 7, 11), comme le dit Marc citant le prophète Jérémie qui proclamait « à la porte du Temple la parole de Dieu » : « Ne vous fiez pas aux paroles mensongères en disant : “C’est le sanctuaire du Seigneur !” » (Jr 7,2.4). Le Temple, sanctifié par la présence de Dieu pouvait apparaître comme inviolable (1 R 8,10 ; Dt 4,7), mais Jérémie va scandaliser le peuple en affirmant après Michée (3,12) que Dieu peut déserter son Temple et Ézéchiel verra la gloire de Dieu quitter le sanctuaire (Ez 11,23).

Saint Jean donne le sens de cette violence en citant le psalmiste : « Le zèle pour ta maison me dévorera » (Ps 69,10). Jésus est dévoré par le zèle de la maison de Dieu ; il aime le Temple de Jérusalem parce que c’est « la maison de son Père » et « une maison de prière » :

« Et il les enseignait et leur disait : “N’est-il pas écrit Ma maison sera appelée une maison de prière pour toutes les nations ? (Is 56,7) Et vous, vous en avez fait un repaire de brigands !” (Jr 7,11) » (Mt 11,17).

Le Temple de Jérusalem est le centre de la prière du peuple juif.

 

2-Le Temple de Jérusalem

Pour comprendre cet attachement de Jésus au Temple, il faut se souvenir de la place du Temple de Jérusalem dans l’histoire d’Israël.

David voulait construire une maison pour Dieu, mais Dieu lui fit dire par le prophète Nathan que c’est son fils qui « construira une maison pour mon nom » (2 S 7,13), mais que « sa maison » et sa royauté subsisteront à jamais devant lui (v. 16) (//1 R 5,19). Et le Premier livre des Rois détaille longuement la construction du Temple par Salomon, le plan et les matériaux utilisés pour sa construction (1 R 5,15-6,1-37). Le Temple de Salomon fut détruit par Nabuchodonosor en 586, et reconstruit, après l’exil à Babylone, par Esdras, en 520-515 (Esdras 3,1-13 ; 5-6). C’est le Second Temple, le Temple qu’a connu Jésus.

Ce fut à la fête des Tentes que le Temple de Salomon avait été inauguré (1 R 8,2. 62-66), et c’est à la fête de la Dédicace (Hanukka) (Ex 23,14) que Judas Maccabée purifia le Second Temple, souillé par Antiochus Épiphane, et le consacra à nouveau (1 M 4, 36-61).

Cette fête est mentionnée en Jn 10,22-23 : « Il y eut alors la fête de la Dédicace à Jérusalem. C’était l’hiver. Jésus allait et venait dans le Temple sous le portique de Salomon ». On voit la scène, on sent le froid, on pense à Jésus qui va déclarer : « Je suis le Fils de Dieu » (Jn 10, 33.36), dans le Temple, qu’il a nommé la « maison de mon Père » (Jn 2,16).

C’est ce qu’il a répondu à Marie et Joseph qui le cherchèrent pendant trois jours et le retrouvèrent dans le Temple.

 

  1. L’enfance de Jésus dans l’évangile de Luc

Dans l’évangile de Luc, l’enfance de Jésus est centrée sur le Temple et non sur Nazareth.

D’abord, la présentation de Jésus au Temple (Lc 2,22-40) : ses parents « l’emmenèrent à Jérusalem pour le présenter au Seigneur, selon ce qui est écrit dans la Loi du Seigneur (v. 22-23) ».

Luc centre son récit sur ce premier acte cultuel de Jésus dans la Ville Sainte.

Le prêtre Syméon a reconnu en ce petit enfant la « consolation d’Israël » que Dieu lui avait promis de voir avant de mourir.

Puis, à douze ans, Jésus est retrouvé au Temple assis parmi les docteurs (Lc 2,41-50). Aux reproches pleins d’inquiétude de Marie, Jésus répond : « Pourquoi donc me cherchiez-vous ? Ne savez-vous pas que je dois être dans la maison de mon Père » (v. 47).

 

  1. Le Temple est le lieu de la prière et de l’enseignement.

Jésus célèbre les grandes fêtes dans le Temple. Il monte à Jérusalem, pour la Pâque (Jn 2,13), une autre fête (Jn 5,1), la fête des Tentes (Jn 7,10) et la dernière Pâque (Jn 12,12).

Jésus prêche dans le Temple de Jérusalem, pendant la fête des Tentes : « On était déjà au milieu de la fête, lorsque Jésus monta au Temple et se mit à enseigner » (Jn 7,14). « Chaque jour, dit-il aux gardes venus l’arrêter, j’étais auprès de vous dans le Temple et vous ne m’avez pas arrêté ! », (Mc 14,49). Et à Anne qui l’interroge sur sa doctrine, il répond : « C’est au grand jour que j’ai parlé au monde, j’ai toujours enseigné à la Synagogue et dans le Temple où tous les Juifs s’assemblent et je n’ai rien dit en secret » (Jn 18,20).

Et c’est dans le Temple, que les Scribes et les Pharisiens lui amènent une femme adultère :

« Mais, dès l’aurore, de nouveau il fut dans le Temple et tout le peuple venait à lui et s’étant assis, il les enseignait. Or les Scribes et les Pharisiens amenèrent une femme surprise en adultère et la plaçant au milieu d’eux, ils disent à Jésus : “Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère » (Jn 8,2-7).

La seule représentation picturale que nous ayons de l’intérieur du Temple de Jérusalem est le tableau de Rembrandt sur la femme adultère (1644). L’espace est tout en hauteur. Sur la droite, dans une bande en or, on devine un trône et un autel en or. En bas, Jésus, debout, discute avec les Pharisiens et la femme est à genoux devant eux.

  1. Les pleurs de Jésus

Jésus a pleuré sur Jérusalem, évoquant ruine de Jérusalem et la destruction du Temple (qui aura lieu en 70 ap. J.C par Titus) dont il ne restera « pierre sur pierre » (Lc 19,43-44).

Enfin, lorsque Jésus rendit le dernier soupir, le voile du Sanctuaire se déchira : « Or Jésus, jetant un grand cri, expira. Et le voile du Sanctuaire (naos) se déchira en deux, du haut en bas. » (Mc 15,37-38// Mt 27, 51).

 

3-Le sanctuaire (naos) de son corps

Et pourtant Jésus affirme « Détruisez ce sanctuaire et je le relèverai en trois jours » (Jn 2,19). Cette affirmation sera reportée comme un témoignage contre lui dans son procès devant Caïphe (Mt 26,61).

« Les Juifs lui dirent alors : “Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce sanctuaire et toi, en trois jours, tu le relèveras ?” Mais lui parlait du sanctuaire de son corps. Aussi, quand il ressuscita d’entre les mots, ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela et ils crurent à l’Écriture et à la parole qu’il avait dite » (Jn 2,20-22).

« Mais lui parlait du sanctuaire (naos) de son corps » (Jn 2,21). Il prophétisait sa résurrection trois jours après sa mort.

 

4-Les signes et le cœur

L’Évangile s’achève par la mention de signes opérés par Jésus : « Comme il était à Jérusalem durant la fête e la Pâque, beaucoup crurent en son nom à la vue des signes qu’il faisait » (Jn 2,23).

Les signes sont les miracles de Jésus, comme l’eau changée en vin à Cana qui est le « premier signe » de Jésus où « il manifesta sa gloire », car tout « signe » de Jésus est une manifestation de sa gloire.

« Mais Jésus ne se fiait pas à eux, parce qu’il les connaissait tous et qu’il n’avait pas besoin d’un témoignage sur l’homme : car lui-même connaissait ce qu’il y avait dans l’homme » (Jn 2,24-25).

La connaissance surnaturelle des hommes et des événements est une des caractéristiques du Christ selon saint Jean (Jn 2,24 ; 4,17 ; 6,61 ; 13,1.11.27-28 ; 16,19.30 ; 18,4 ; 21,17).

Jésus, comme Dieu, connaît le cœur de l’homme. Dieu seul « scrute les reins et les cœurs ».

« Rien n’est plus faux (ou rusé) que le cœur de l’homme, il est incurable. Qui peut le connaître ? Moi le Seigneur qui pénètre les cœurs et qui scrute les reins, afin de rendre à chacun selon sa conduite, selon le fruit de ses actes » (Jr 17,10).

Et Dieu seul peut « créer un cœur pur » : « Dieu crée pour moi un cœur pur » (Ps 51 [50] 12).

Pour Jésus, la foi dans les signes n’est pas une véritable foi si elle ne vient pas d’un cœur transformé par sa parole. Le « signe » donné par Dieu ne suffit pas pour faire naître la foi, s’il n’est pas reçu dans le cœur. C’est ce qui se passera devant le « signe de Jonas », la résurrection du Christ : tous ne croiront pas, mais seulement ceux qui auront laissé Dieu toucher leur cœur.

Dans l’évangile de la Transfiguration, la mort et la résurrection du Christ étaient conçues comme un « exode » vers le Père, dans cet évangile, comme la destruction et la reconstruction du « sanctuaire » de son corps.

Ysabel de Andia

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