Mgr Ivan Jurkovic © RV

Mgr Ivan Jurkovic © RV

Armes à sous-munitions : pour le Saint-Siège, « chaque victime compte »

Print Friendly, PDF & Email

Intervention de Mgr Ivan Jurkovic aux Nations Unies

Share this Entry
Print Friendly, PDF & Email

S’il se réjouit des « progrès significatifs » réalisés depuis l’entrée en vigueur de la Convention sur les armes à sous-munitions, le Saint-Siège est toutefois « très préoccupé » par l’augmentation du nombre de civils touchés et par le fait que ces armes sont encore utilisées aujourd’hui. « Il n’y a pas de temps à perdre », insiste Mgr Jurkovic, parce que « chaque victime compte ».

Mgr Ivan Jurkovic, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève, est intervenu lors de la deuxième conférence d’examen de la Convention sur les armes à sous-munitions, à Genève, le 26 novembre 2020. Il a en particulier abordé la question de l’assistance aux victimes.

Le représentant du Saint-Siège a insisté sur les notions de « partenariat » et de « coopération » qui inspirent la Convention, ainsi que sur le respect nécessaire des « différentes valeurs et cultures des populations touchées ». Pour « s’assurer que leurs besoins sont correctement pris en compte et que leurs droits sont respectés », il faut « écouter les victimes », a-t-il souligné.

Voici notre traduction de l’intervention de Mgr Ivan Jurkovic.

HG

Intervention de Mgr Ivan Jurkovic

 Monsieur le Président,

Il ne fait aucun doute que, depuis l’entrée en vigueur de la Convention sur les armes à sous-munitions, grâce aux contributions combinées et aux synergies entre les différentes parties prenantes, elle a réalisé des progrès significatifs et a fait une réelle différence, en particulier parmi les victimes touchées, ainsi que parmi celles qu’elle a contribué à prévenir.

En plaçant la personne humaine au centre, cette Convention est la preuve évidente du lien inextricable entre le désarmement et le développement. L’équation est assez simple : plus nous investissons dans le désarmement, moins nous aurons besoin de ressources pour l’aide humanitaire. À cet égard, cette délégation se félicite également de l’accent mis sur la prévention ainsi que sur la paix et l’éducation au risque, qui sont après tout des outils indispensables.

Monsieur le Président.

Le désir de paix, de sécurité et de stabilité est, bien sûr, l’une des aspirations les plus profondes du cœur humain. Il est également légitime d’attendre en permanence une réponse adéquate qui dépasse la simple dimension militaire (1).   Le Saint-Siège est très préoccupé par l’augmentation du nombre de victimes civiles et par le fait que les armes à sous-munitions continuent d’être utilisées aujourd’hui.

Les difficultés de mise en œuvre des obligations juridiques contractées dans le cadre de la Convention ont certainement été exacerbées par la pandémie actuelle qui aura, entre autres, des effets socio-économiques à long terme dans de nombreuses régions, en particulier dans les pays en développement. Toutefois, il est primordial que les obligations contractées, notamment en matière d’assistance aux victimes, ne soient pas mises en suspens.

Il n’y a pas de temps à perdre, précisément parce que chaque personne compte, et chaque victime compte. La force de cette convention réside dans l’idée de partenariat et de coopération (2), qui doit également respecter les différentes valeurs et cultures des populations touchées. Il s’agit d’une responsabilité partagée. En tant que famille de nations, assumant les mêmes objectifs dans le cadre de cette Convention, le retard et l’échec d’un État partie est l’échec de tous. En même temps, le succès d’un État est le succès de tous !

Monsieur le Président,

Dans sa dernière lettre encyclique, intitulée « Fratelli tutti », le pape François dénonce le fait que la première victime de tout conflit est « la vocation innée de la famille humaine à la fraternité ». (3) En effet, « toute guerre laisse notre monde dans un état pire qu’avant. La guerre est un échec de la politique et de l’humanité, une capitulation honteuse, une défaite cuisante devant les forces du mal. Ne restons pas enlisés dans des discussions théoriques, mais touchons la chair blessée des victimes. Regardons une fois de plus tous ces civils dont le meurtre a été considéré comme un “dommage collatéral“. Interrogeons les victimes elles-mêmes… regardons la réalité avec leurs yeux et écoutons avec un cœur ouvert les histoires qu’elles racontent. De cette façon, nous pourrons saisir l’abîme du mal au cœur de la guerre. Nous ne serons pas non plus troublés si l’on nous juge naïfs pour avoir choisi la paix » (4).

 À cet égard, il est important que les États parties écoutent la voix des victimes et les incluent dans la mise en œuvre de la Convention dans un véritable esprit de fraternité et de responsabilité. Un moyen important de s’assurer que leurs besoins sont correctement pris en compte et que leurs droits sont respectés est d’écouter les victimes, dans un esprit d’appropriation et de partenariat.

Monsieur le Président,

Le Saint-Siège continue d’espérer que les États parties à la Convention assumeront leur responsabilité – individuellement et collectivement – afin d’empêcher que les armes à sous-munitions ne constituent une menace pour la vie et un obstacle au développement intégral des populations qui ont connu et continuent de connaître des conflits.

Je vous remercie, Monsieur le Président.

_____________

(1)    Cf. Intervention du Saint-Siège à la Conférence d’Oslo pour la signature de la Convention sur les armes à sous-munitions, 3 décembre 2008.

(2)    Cf. Intervention du Saint-Siège à la première réunion des États parties, Vientiane 2010.

(3)    Pape François, Lettre encyclique « Fratelli tutti », par. 39.

(4)    Ibid. par. 261.

© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

Share this Entry

Hélène Ginabat

FAIRE UN DON

Si cet article vous a plu, vous pouvez soutenir ZENIT grâce à un don ponctuel