Mgr Fisichella, visioconférence du 13 juin 2020, capture Vatican Media

Mgr Fisichella, visioconférence du 13 juin 2020, capture Vatican Media

Mgr Fisichella invite à « trouver Dieu imprimé sur le visage des pauvres » (traduction complète)

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Secourir les pauvretés dues à la pandémie

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Mgr Fisichella invite à « rester inquiets jusqu’à ce qu’on trouve Dieu imprimé sur le visage des pauvres ».

Le président du Conseil pontifical pour la promotion de la nouvelle évangélisation, Mgr Rino Fisichella, a en effet présenté le Message du pape François pour la Journée mondiale des pauvres (15 novembre 2020), à la presse, en visioconférence, ce samedi 13 juin 2020, en la fête de saint Antoine de Padoue-de Lisbonne (1195-1231), docteur de l’Eglise et saint patron des pauvres.

Pour Mgr Fisichella, le message du pape qui montre que le bien dépasse de beaucoup le mal, mais a aussi des « paroles dures », vise à « secouer notre l’indifférence, et souvent notre sentiment d’agacement face aux pauvres, pour retrouver la solidarité et l’amour qui vivent de générosité en donnant un sens à la vie ».

Il invite à préparer cette Journée mondiale du 15 novembre en accordant encore plus d’attention aux besoins accrus par les conséquences de la pandémie: « Dans les mois à venir, une attention particulière sera toujours requise pour les règles de sécurité, mais les demandes d’aide seront probablement encore augmentées. Il nous appartiendra donc de ne pas faire manquer aux pauvres de plus en plus nombreux que nous rencontrons, les signes quotidiens qui accompagnent notre action pastorale, et les (signes) extraordinaires que la Journée mondiale des pauvres prévoit et réalise depuis plusieurs années. »

Voici notre traduction, rapide, de travail, de l’intervention de Mgr Fisichella.
AB

Intervention de Mgr Fisichella

« Tends ta main au pauvre » (Si 7,32). Par les paroles de l’antique livre du Siracide, le pape François propose sa réflexion pour la IVe Journée mondiale des pauvres qui sera célébrée dans toute l’Église le dimanche 15 novembre. C’est un message qui entre directement dans le moment dramatique que le monde entier a vécu à cause de Covid-19, et que de nombreux pays combattent toujours dans leur effort pour porter secours à ceux qui sont des victimes innocentes.

La réflexion du pape François se développe à la lumière de l’image biblique qui voit un sage, « Jésus fils de Sira » comme qu’il se présente à la fin du livre (cf. Si 50, 27): il a vécu environ deux cents ans avant la naissance de Christ. Les questions qu’il se posait tournaient autour du thème de l’endroit où résidait la sagesse et de la réponse de « sens » qu’elle pourrait apporter aux événements de la vie. Le Pape note que ce sont les mêmes questions qui ont marqué la vie de millions de personnes en ces mois de coronavirus: maladie, deuil, incertitude de la science, douleur, manque des libertés auxquelles on s’était habitués, tristesse de ne pas pouvoir faire les derniers adieux aux personnes qu’on aime …

Dans cette circonstance, la prière s’est faite plus insistante et la pensée de Dieu a effleuré l’esprit de nombreuses personnes souvent indifférentes. Cela a conduit à la recherche d’une plus grande spiritualité, comme en témoigne la participation massive à différents événements liturgiques. Le pape François souligne à juste titre que l’auteur sacré « insiste sur le fait que, dans le besoin, il faut avoir confiance en Dieu : « Ne t’agite pas à l’heure de l’adversité. Attache-toi au Seigneur, ne l’abandonne pas, afin d’être comblé dans tes derniers jours. Toutes les adversités, accepte-les; dans les revers de ta pauvre vie, sois patient; car l’or est vérifié par le feu, et les hommes agréables à Dieu par le creuset de l’humiliation. Dans les maladies comme dans le dénuement, aie foi en lui. Mets ta confiance en lui, et il te viendra en aide; rends tes chemins droits, et mets en lui ton espérance » (n. 1) ».

Cependant, le livre du Siracide ne nous permet pas de nous arrêter à la prière; il dit plutôt que pour avoir une prière digne et efficace, il faut prêter attention à ceux qui sont dans la pauvreté. Le pape François le dit sans ambages quand il écrit: « La prière à Dieu et la solidarité avec les pauvres et les souffrants sont inséparables. Pour célébrer un culte qui soit agréable au Seigneur, il est nécessaire de reconnaître que toute personne, même la plus indigente et la plus méprisée, porte l’image de Dieu imprimée en elle. De cette attention découle le don de la bénédiction divine, attirée par la générosité pratiquée à l’égard du pauvre » (n.2).

Le thème de « l’image de Dieu » imprimé sur le visage des pauvres est extrêmement significatif car il nous oblige à ne pas pouvoir détourner le regard si nous voulons vivre une existence pleinement chrétienne. En ce sens, la métaphore de «tendre la main» prend sa valeur la plus profonde car elle nous oblige à revenir aux paroles du Seigneur qui a voulu s’identifier à ceux qui manquent du nécessaire et vivent dans des conditions de marginalisation sociale et existentielle. Le Message illustre plusieurs situations qui, au cours de ces mois de pandémie, ont vu une main tendue et qui sont gravées dans l’esprit de tous: « La main tendue du médecin qui se soucie de chaque patient en essayant de trouver le bon remède. La main tendue de l’infirmière et de l’infirmier qui, bien au-delà de leurs horaires de travail, sont restés pour soigner les malades. La main tendue de ceux qui travaillent dans l’administration et procurent les moyens de sauver le plus de vies possibles. La main tendue du pharmacien exposé à tant de demandes dans un contact risqué avec les gens. La main tendue du prêtre qui bénit avec le déchirement au cœur. La main tendue du bénévole qui secourt ceux qui vivent dans la rue et qui, en plus de ne pas avoir un toit, n’ont rien à manger. La main tendue des hommes et des femmes qui travaillent pour offrir des services essentiels et la sécurité. Et combien d’autres mains tendues que nous pourrions décrire jusqu’à en composer une litanie des œuvres de bien. Toutes ces mains ont défié la contagion et la peur pour apporter soutien et consolation. »

A ce signe de grande humanité et de responsabilité, le pape François oppose l’image de ceux qui continuent de garder « leurs mains dans leurs poches et ne se laissent pas émouvoir par la pauvreté, dont ils sont souvent complices » (n. 9). La liste, heureusement plus courte, témoignage que le bien est toujours de beaucoup supérieur à l’avidité de quelques-uns, décrit des scènes de la vie quotidienne: « Il y a des mains tendues qui touchent rapidement le clavier d’un ordinateur pour déplacer des sommes d’argent d’une partie du monde à l’autre, décrétant la richesse des oligarchies et la misère de multitudes ou la faillite de nations entières. Il y a des mains tendues pour accumuler de l’argent par la vente d’armes que d’autres mains, même celles d’enfants, utiliseront pour semer la mort et la pauvreté. Il y a des mains tendues qui, dans l’ombre, échangent des doses de mort pour s’enrichir et vivre dans le luxe et le désordre éphémère. Il y a des mains tendues qui, en sous-main, échangent des faveurs illégales contre un gain facile et corrompu. Et il y a aussi des mains tendues de ceux qui, dans l’hypocrisie bienveillante, portent des lois qu’eux-mêmes n’observent pas » (n. 9). Des paroles dures mais malheureusement vraies, qui montrent combien le manque de responsabilité sociale est toujours présent dans le monde d’aujourd’hui avec pour conséquence des poches de pauvreté extrêmes qui augmentent démesurément.

La main tendue est donc une invitation à assumer la responsabilité d’apporter sa propre contribution, que l’on voit dans les gestes de la vie quotidienne pour soulager le sort de ceux qui vivent dans le besoin et n’ont pas la dignité des enfants de Dieu. Le pape François n’a pas peur d’identifier ces personnes comme de vrais saints, « ceux de la porte à côté » qui, avec simplicité, sans bruit et sans publicité, offrent le témoignage authentique de l’amour chrétien. La présence massive de tant de visages de pauvres exige que les chrétiens soient toujours en première ligne et ressentent le besoin de savoir s’il manque de quelque chose d’essentiel quand un pauvre vient à lui. « Nous ne pouvons pas nous sentir « bien » quand un membre de la famille humaine est relégué dans les coulisses et devient une ombre » (n. 4), écrit le pape François dans son Message. C’est comme s’il invitait à faire nôtre le «cœur inquiet» de saint Augustin. Rester inquiets jusqu’à ce qu’on trouve Dieu imprimé sur le visage des pauvres.

À bien des égards, l’image de tendre la main rappelle de près le logo qui a accompagné la Journée mondiale des pauvres depuis le début de cette initiative du pape François. Les mains tendues sont celles de deux personnes: l’une se tient sur le pas de sa porte, l’autre attend. Le rappel est fort car il évoque à quel point les deux ont besoin l’une de l’autre. La main tendue du pauvre demande, mais invite l’autre à sortir de lui-même pour briser le cercle de l’égoïsme qui entoure tout le monde. Ce Message du Pape est donc une invitation à secouer notre l’indifférence, et souvent notre sentiment d’agacement face aux pauvres, pour retrouver la solidarité et l’amour qui vivent de générosité en donnant un sens à la vie.

La présentation de ce Message à l’occasion de la fête liturgique de saint Antoine de Padoue, saint patron des pauvres, montre que ce que nous pouvons faire est toujours sous la grâce de Dieu qui accompagne la vie des croyants et l’histoire des hommes. Ce sont des paroles qui entendent aider à la préparation et à la réalisation de la prochaine Journée mondiale, bien conscients des restrictions que les lois de différents pays imposent. En fait, dans les mois à venir, une attention particulière sera toujours requise pour les règles de sécurité, mais les demandes d’aide seront probablement encore augmentées. Il nous appartiendra donc de ne pas faire manquer aux pauvres de plus en plus nombreux que nous rencontrons, les signes quotidiens qui accompagnent notre action pastorale, et les (signes) extraordinaires que la Journée mondiale des pauvres prévoit et réalise depuis plusieurs années.

Copyright – Traduction de Zenit, Anita Bourdin

 

 

 

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Anita Bourdin

Journaliste française accréditée près le Saint-Siège depuis 1995. Rédactrice en chef de fr.zenit.org. Elle a lancé le service français Zenit en janvier 1999. Master en journalisme (Bruxelles). Maîtrise en lettres classiques (Paris). Habilitation au doctorat en théologie biblique (Rome). Correspondante à Rome de Radio Espérance.

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