Messe à Sainte-Marthe, 16 mars 2020 ©Vatican Media

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Au Vatican, un système judiciaire inspiré par la vertu de la justice

Article de Giuseppe Pignatone dans L’Osservatore Romano

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Le pouvoir judiciaire doit s’inspirer de la vertu cardinale de la justice pour son activité, affirme le président du Tribunal de l’État de la Cité du Vatican, le docteur Giuseppe Pignatone, dans un article publié par L’Osservatore Romano. Il commente la nouvelle loi sur le système judiciaire du Vatican promulguée par le pape François ce lundi 16 mars 2020.

Dans son texte, le président du Tribunal souligne que la magistrature du Vatican est « appelée aujourd’hui à appliquer une législation, qui est à bien des égards très moderne », mais surtout, note-t-il, « l’application de ces lois » doit « respecter la spécificité du droit du Vatican » qui « reconnaît dans l’ordre canonique la première source normative et le premier critère interprétatif de référence ».

« Cette réconciliation entre l’ancien et le moderne constitue la particularité du moment historique actuel ainsi qu’un motif supplémentaire d’engagement pour nous, les magistrats », affirme Giuseppe Pignatone.

Voici l’article du président du Tribunal de l’État de la Cité du Vatican publié en italien dans L’Osservatore Romano et traduit par Zenit.

MD

Article de Giuseppe Pignatone

La signification et la finalité de cette nouvelle loi sur le système judiciaire sont clarifiées, dans les prémisses qui précèdent le texte normatif, par le souverain pontife, que mes collègues et moi-même remercions pour son attention aux thèmes de la justice, notamment en ces moments si dramatiques.

D’un côté, le pape François réitère ce qu’il a dit en d’autres occasions, encore récemment à l’occasion de l’ouverture de l’année judiciaire, à savoir que le pouvoir judiciaire doit inspirer son activité de la vertu cardinale de la justice et que, pour obtenir ce résultat, sont indispensables à la fois « l’engagement personnel, généreux et responsable » des magistrats, et la présence d’institutions adéquates, en mesure d’assurer efficacité et rapidité.

De l’autre, le pontife souligne que les nouvelles normes sur le système judiciaire sont devenues nécessaires en relation avec les nombreuses et importantes modifications intervenues de puis l’an 2000 et surtout depuis 2013, dans la législation de l’État de la Cité du Vatican, spécialement dans le domaine économico-financier et pénal, notamment à la suite de son adhésion à de nombreuses Conventions internationales.

La magistrature du Vatican est par conséquent appelée aujourd’hui à appliquer une législation, qui est à bien des égards très moderne, résultant en grande partie de la mondialisation, mais greffée sur des codes datant désormais de plusieurs décennies. Mais surtout, l’interprétation et l’application de ces lois doivent respecter la spécificité du droit du Vatican qui, comme l’a réaffirmé la loi n. LVVI du 1er octobre 2008 sur les sources du droit, « reconnaît dans l’ordre canonique la première source normative et le premier critère interprétatif de référence ».

Cette réconciliation entre l’ancien et le moderne constitue la particularité du moment historique actuel ainsi qu’un motif supplémentaire d’engagement pour nous, les magistrats.

Passant à l’examen des aspects principaux des nouvelles normes, il faut souligner qu’un des critères d’inspiration du nouvel ordre est la conviction que l’indépendance des magistrats et leur capacité professionnelle sont des conditions indispensables pour obtenir ces résultats de la justice indiqués par le pape François dans son préambule. Il est donc affirmé explicitement que les magistrats, tout en dépendant hiérarchiquement du souverain pontife qui les nomme, ne sont soumis, dans l’exercice de leurs fonctions, qu’à la loi et qu’ils exercent leurs pouvoirs avec impartialité.

Des exigences spécifiques et rigoureuses de professionnalisme sont ensuite indiquées, avec la disposition selon laquelle les magistrats de premier et de second degré, et en partie aussi de la Cour de cassation, peuvent être nommés professeurs universitaires (titulaires ou retraités) ou encore juristes de grande renommée. En outre, précisément pour satisfaire les exigences si variées de l’activité judiciaire du Vatican, bien qu’il s’agisse d’un État aux dimensions très réduites, d’une part les expériences dans le domaine civil, pénal et administratif sont valorisées et, d’autre part, au moins un des magistrats des bureaux de premier degré est tenu d’être un expert en droit canonique et ecclésiastique.

Pour la première fois, des normes spécifiques pour le Bureau du promoteur de justice sont édictées, marquant ainsi la distinction entre pouvoir judiciaire et ministère public, et assurant cependant aussi à cette dernière autonomie et indépendance dans l’exercice de ses fonctions.

Toujours dans le but de garantir des conditions d’indépendance et d’efficacité, le nombre du personnel administratif est fixé, l’autonomie de dépenses des offices judiciaires est prévue et, pour ceux de premier degré, il est établi qu’au moins un magistrat à temps plein en fasse partie.

La limite d’âge est portée de 74 à 75 ans, moment où doit être donnée la démission, qui prend effet dès l’acceptation du souverain pontife.

Un autre changement important est que le président de la Cour de cassation peut intégrer le collège des juges, normalement composé de trois cardinaux, ainsi que deux autres juges appliqués, nommés sur la base des exigences ordinaires indiquées ci-dessus, « si la complexité du litige ou des raisons d’opportunité l’exigent ».

Il est clair que cette règle est le fruit d’une prise de conscience de la complexité technique croissante des procédures traitées dans l’État, et de la volonté d’assurer ainsi, notamment au dernier degré de juridiction, les compétences techniques et professionnelles nécessaires.

Le dernier point que j’aimerais souligner est l’attention portée au droit de défense que l’article 26 définit comme « inviolable en tout état et à tout degré de la procédure », conformément aux principes du procès équitable et de la présomption d’innocence, déjà introduits en 2013 dans le code de procédure pénale (art. 350 bis). Dans ce contexte une réglementation détaillée des conditions d’inscription au registre et, par ailleurs, des hypothèses de procédure disciplinaire, est prévue.

Traduction de Zenit, Hélène Ginabat

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Hélène Ginabat

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