Lourdes © wikimedia commons

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La richesse du message de Lourdes, par le fr Manuel Rivero OP

Journée mondiale du malade le 11 février 2020

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Lourdes attire des millions de pèlerins des cinq continents,  appartenant parfois à d’autres religions que le christianisme mais qui adhèrent au message de la miséricorde de Dieu envers les pécheurs et les malades que la Vierge Marie a transmis à sainte Bernadette en 1858 : « Pénitence ! » ; « priez pour la conversion des pécheurs ».

La vie de Bernadette en fut bouleversée. L’amour de Dieu grandit en elle au point de déclarer : « Je ne vivrai pas un instant que je ne le passe en aimant » ; « Ô Jésus, mettez tant d’amour dans mon cœur, qu’un beau jour il se brise pour aller à vous ».

Les malades mis en valeur

Des malades et des handicapés occupent la première place sur l’esplanade de la basilique de Notre-Dame du Rosaire. Leurs brancards forment la croix du Christ Jésus aujourd’hui. Alors qu’ils passent le plus clair de leur temps cachés dans les hôpitaux ou les arrière-cours des maisons, ces malades retrouvent à Lourdes la reconnaissance de leur dignité sacrée. La vie est un don de Dieu et elle appartient à Dieu. Les malades sont plus grands que leur maladie.

Des grâces de conversion et de guérison alimentent l’espoir de tous ceux qui souffrent dans leur âme ou dans leur corps : « Venez à moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai » (Évangile selon saint Matthieu 11,28)[1]. Jésus est venu apporter la guérison intégrale de la personne humaine : le corps animé par l’âme.

À Lourdes, il y a la face visible et la dimension invisible du mystère de Dieu manifesté en Jésus-Christ et présenté par Marie, sa mère.

À Lourdes, la Vierge Marie rappelle l’Évangile : la guérison des malades qui croient en Jésus le Messie et le pardon des péchés.

Loin de faire écran entre l’humanité et Dieu, sans prendre nullement la place de Dieu, la Vierge Marie ressemble à un miroir où chacun peut découvrir son propre mystère et sa destinée. La beauté de Marie, glorifiée dans son âme et dans son corps, ayant dépassé la mort par sa foi en Jésus, le Ressuscité de Pâques, annonce le salut à ceux qui souffrent moralement et physiquement. Sainte Bernadette affirmait : « Ma Dame à moi, elle si belle que lorsqu’on l’a vue, on voudrait mourir pour la revoir ».

« Immaculée Conception »

C’est le 25 mars 1858 que la Vierge Marie se présente à Bernadette Soubirous comme l’Immaculée Conception en s’adaptant au dialecte bigourdan de la jeune voyante : « Que soy era Immaculada Conceptiou ». Il est significatif que cette déclaration de la Dame de la grotte à Bernadette ait eu lieu le jour de la fête de l’Annonciation. Le dogme de l’Immaculée Conception, déclaré par le bienheureux pape Pie IX en 1854, n’éloigne pas la Mère de Jésus du commun des mortels. Tout au contraire, comblée de grâce, la Vierge Marie partage les joies et les souffrances de l’humanité. Elle devient mère spirituelle par sa maternité divine et son intercession puissante auprès de son Fils Jésus.

Dans la Bible, quand Dieu accorde une grâce particulière ce don comporte un but universel au service de tous. Comblée de grâce dès l’instant de sa conception, la fille conçue par l’union sexuelle d’Anne et de Joachim, deviendra une source de grâce pour l’humanité entière.

À Lourdes, « la Dame de la grotte » comme l’appelle Bernadette rayonne de beauté. Marie prie le chapelet. Le salut ne vient que de son Fils Jésus, le seul médiateur entre Dieu et les hommes, mais la prière de sa mère change le cours de l’histoire de manière imprévisible comme aux noces de Cana où Jésus changea l’eau en vin en manifestant sa gloire (cf. Évangile selon saint Jean 2).

La Parole intérieure du Père

À Lourdes, Marie ne se montre pas bavarde. Femme de silence et d’intériorité, Marie continue de garder dans son cœur les événements et les paroles de son Fils Jésus (cf. Évangile selon saint Luc 2,51). Marie ne sauve ni ne sanctifie qui que ce soit. Seul Dieu sauve et sanctifie. La Vierge Marie brille comme la plus grande des sauvés. La puissance de Marie se déploie uniquement dans sa prière pleine de foi en son Fils Jésus. C’est Jésus qui a sanctifié et sauvé Marie et son père adoptif Joseph.

Le cœur immaculé de Marie a accueilli le Verbe de Dieu. Quand saint Jean, l’évangéliste théologien, parle du Verbe, il ne pense pas à une simple parole humaine qui ferait vibrer l’air à l’image de nos paroles humaines. Il annonce la Parole intérieure du Père manifestée dans l’Incarnation. La Parole du Père caché en Dieu a pris chair en Marie. Le Verbe fait chair est devenu alors visible et saint Jean annonce  « ce qui était dès le commencement, ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie, car la Vie s’est manifestée » (Première épître de saint Jean 1,1s).

« Marie », le prénom de l’âme

Saint Augustin (354-430) enseigne que Marie conçut d’abord le Verbe dans son cœur par la foi avant de le concevoir dans ses entrailles. Cette naissance du Verbe par la foi annonce la naissance de Jésus dans l’âme de ceux qui croient en lui comme l’Envoyé du Père.

C’est pourquoi saint Ambroise de Milan (+397) se plaisait à baptiser l’âme croyante du prénom de Marie car c’est l’âme de chaque chrétien qui engendre par la foi Jésus à l’exemple de Marie : « Chaque âme qui croit (comme Marie) conçoit et enfante le Verbe de Dieu . . . Selon la chair il n’y a qu’une seule Mère du Christ ; selon la foi, le Christ est le fruit de tous »[2] ; « Lorsque cette âme commence à se convertir au Christ, elle s’appelle « Marie » : c’est-à-dire qu’elle reçoit le nom de celle qui a mis au monde le Christ : elle est devenue une âme qui engendre le Christ de manière spirituelle »[3].

Par la foi, l’âme chrétienne devient mère de Dieu sous l’action de l’Esprit Saint. L’âme a aussi « un prénom » : Marie.

Toutes les grâces sont mises en commun

La liturgie de la messe de l’Annonciation enseigne la naissance de l’Église en ce jour-là : « Daigne accepter, Dieu tout-puissant, les dons offerts par ton Église : elle n’oublie pas qu’elle a commencé le jour où ton Verbe s’est fait chair » (prière sur les offrandes). Première chrétienne, première Église, « la première en chemin », Marie apparaît dans l’Église comme la sœur aînée dans la foi pour tous les fidèles. Le mystère de « la Communion des saints » fait que les grâces répandues sur Marie bénéficient à tous les croyants dans le partage des biens spirituels. Il s’agit d’un profit mutuel de biens réalisés par chacun. Dieu est communication, partage et communion.

La mise en commun vécue au cœur de la sainte Trinité, un seul Dieu, rejaillit dans la mise en commun des grâces personnelles données en vue du bien de tous. Ni l’envie ni la jalousie n’ont de place dans le mystère de l’Église. La richesse des uns devient la richesse de tous dans la Communion des saints. Marie n’est pas une privilégiée sans points communs avec la commune condition des mortels. Marie met en commun toutes les grâces reçues.

La souffrance de la Vierge Marie

Ni l’Immaculée Conception ni la maternité divine quelques années après n’éloignent Marie du reste des croyants. Le privilège de l’Immaculée Conception la rapproche de tous les hommes. Marie sera aussi la première à être frappée par la souffrance à cause de sa fidélité comme l’avait annoncé Syméon lors de la Présentation de Jésus au Temple de Jérusalem : « Une épée te transpercera l’âme !» (Évangile selon saint Luc 2, 35). Sur le Calvaire, le cœur immaculée et maternel de Marie a été transpercé de douleur. Saint Thomas d’Aquin O.P. (+1274) enseigne que l’amour des mères ressemble le plus à Dieu parce que les mères cherchent davantage à aimer qu’à être aimées.

Sainte Bernadette, envoyée par la Vierge Marie

Sainte Bernadette de Lourdes a été choisie par la Vierge Marie et envoyée comme témoin de la miséricorde divine. Chargée de mission, Bernadette a connu le même sort que Jésus : scepticisme, moqueries, humiliation … Dans l’Évangile, l’envoi établit un lien fort entre Dieu qui envoie et l’envoyé : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Évangile selon saint Jean 20, 21).

La voyante de Lourdes a bénéficié des apparitions de la Vierge Marie mais elle a partagé aussi les souffrances physiques et spirituelles de son maître, Jésus. Elle disait avoir reçu « l’emploi de malade ». À l’approche de sa mort, Bernadette s’était exclamée : « Je suis moulue comme un grain de blé » ; « Je n’aurais pas cru qu’il fallait tant souffrir pour mourir ».

Agonie de sainte Bernadette

Entrée en agonie, son confesseur l’avait entendu répéter : « Va-t-en , Satan ! ». C’est dans le crucifix qu’elle puisait sa force. Ses dernières paroles répétées deux fois manifestent son humilité, en véritable fille de Marie, l’humble servante du Seigneur : « Sainte Marie, Mère de Dieu, priez pour moi, pauvre pécheresse, pauvre pécheresse. »

Fr. Manuel Rivero O.P.

Cathédrale de Saint-Denis (La Réunion), le 7 février 2020.

 

 

 

 

[1] Cf. Message du pape François pour la Journée mondiale du malade, le 11 février 2020. https://fr.zenit.org  le 3 janvier 2020.

[2] Saint Ambroise, Traité sur l’Évangile de Luc, II, 26, édition. Sources Chrétiennes », tome I, p. 84.

[3] Saint Ambroise, Sur la Virginité, IV, 20 (P. L. XVI, 271 B.

 

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Fr. Manuel Rivero, O.P.

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