Mgr Auza attire l’attention sur les « populations jeunes et dynamiques d’Afrique, qui méritent d’avoir un meilleur accès à une éducation de qualité et à un travail décent afin de réaliser leur grand potentiel ». Il faut, dit-il, permettre à « ces jeunes hommes et femmes de devenir des acteurs clés dans la construction de leur propre pays et dans la place qui leur revient comme futurs dirigeants ». Pour eux il demande des efforts de paix.
La paix c’est d’ailleurs l’intention de prière du pape François et de sa Vidéo pour tout le mois de novembre 2018.
Et l’avenir des jeunes en Afrique était son intention du mois de septembre: « Pour que les jeunes du continent africain aient accès à l’éducation et au travail dans leur propre pays. »
Mgr Bernardito Auza, observateur permanent du Saint-Siège, est intervenu au débat public du Conseil de sécurité sur la paix et la sécurité en Afrique, sur le thème « Renforcement des opérations de maintien de la paix en Afrique », à New York, le 20 novembre 2018. Il a invité les Nations Unies à « tirer le meilleur parti des incroyables ressources – humaines et naturelles – dont le continent africain est doté ».
Le représentant du Saint-Siège a aussi rendu hommage aux soldats de la paix qui ont parfois « consenti le sacrifice suprême », soulignant que « le renforcement des opérations de maintien de la paix nécessite certainement un soutien financier accru, qui devrait aller de pair avec les efforts diplomatiques indispensables visant à prévenir ou à résoudre les conflits ». « Pour que cela se produise », a-t-il conclu, « la communauté internationale doit être prête à investir ».
Voici notre traduction de la déclaration de Mgr Auza, prononcée en anglais.
HG
Déclaration de Mgr Bernardito Auza
Monsieur le Président,
Le Saint-Siège remercie la Présidence de la République populaire de Chine d’avoir convoqué ce débat public sur la paix et la sécurité en Afrique : un sujet qui concerne toute la communauté internationale, dont la réponse a été fournie en partie sous forme d’opérations de maintien de la paix, dont sept actuellement actives sur le continent africain.
C’est grâce à la présence des Casques bleus, immédiatement reconnaissables, que l’ONU est le plus visible dans le monde. Dans un monde de plus en plus fragmenté, les opérations de maintien de la paix offrent à la communauté internationale une occasion concrète de collaborer – par le biais d’activités diplomatiques, de contributions financières, de compétences, de troupes et de personnel. Travaillant fréquemment au milieu d’immenses défis, ces missions ont la lourde tâche de rétablir la paix, de protéger les civils et de faciliter les processus politiques en vue de rétablir la justice et de jeter les bases d’une stabilité durable. Parfois, des hommes et des femmes servant sous le drapeau des Nations Unies « construisent littéralement des ponts », uniquement pour que les ennemis de la paix les détruisent. Les groupes armés et les organisations terroristes du continent africain, souvent manipulés par des machinations politiques venant de l’intérieur ou de l’extérieur des frontières de leur pays, font régner le chaos.
Une opération de maintien de la paix peut parfois être un abus de langage ; cela implique apparemment que l’on jouit déjà de la paix et qu’elle doit simplement être maintenue. Malheureusement, nous savons que trop souvent, ce n’est pas le cas. Aujourd’hui, les soldats de la paix de l’ONU servent dans certains des environnements les plus dangereux et hostiles de la planète et risquent leur vie pour assurer la fourniture des services les plus fondamentaux aux personnes dans le besoin. Pris dans des conflits qu’ils sont venus désamorcer, certains ont consenti le sacrifice suprême. Nous avons raison de leur rendre hommage, en veillant également à ce que les conséquences positives des missions de maintien de la paix des Nations Unies ne soient ni négligées ni sapées face à des attentes irréalistes, des ressources limitées ou épuisées, ou à cause des cas odieux de violations des droits de l’homme et d’exploitation sexuelle qui ont été révélés.
Certes, des ressources financières considérables sont consacrées à l’Afrique en termes de programmes de développement, mais il convient néanmoins de rappeler que le coût du maintien de la paix ne représente qu’une infime partie des dépenses militaires mondiales – une toute petite part. Le renforcement des opérations de maintien de la paix nécessite certainement un soutien financier accru, qui devrait aller de pair avec les efforts diplomatiques indispensables visant à prévenir ou à résoudre les conflits. Pour que cela se produise, la communauté internationale doit être prête à investir. Comme l’a fait remarquer le Secrétaire général Guterres : « Les chances de succès augmentent considérablement lorsque nous collaborons avec les États Membres et partageons les charges, les risques et les responsabilités. Nous avons un besoin urgent d’un bond en avant dans l’engagement collectif ». [1]
Monsieur le Président,
Pour un engagement véritablement efficace et collectif, nous devons nous tourner vers les populations jeunes et dynamiques d’Afrique, qui méritent d’avoir un meilleur accès à une éducation de qualité et à un travail décent afin de réaliser leur grand potentiel, permettant ainsi à ces jeunes hommes et femmes de devenir des acteurs clés dans la construction de leur propre pays et dans la place qui leur revient comme futurs dirigeants. L’alternative est la triste réalité qui laisse de nombreux jeunes Africains sans scolarisation ni formation d’aucune sorte. Sans perspectives, ils deviennent la proie d’un avenir d’exploitation et de violence. À titre de mesure préventive, la communauté internationale, en particulier par le biais des missions de maintien de la paix des Nations Unies, devrait rechercher une plus grande collaboration avec les populations locales afin de tirer le meilleur parti des incroyables ressources – humaines et naturelles – dont le continent africain est doté.
Les abondantes ressources naturelles en Afrique deviennent une malédiction lorsque leur exploitation ne profite pas à la population et, pire encore, lorsque les guerres et les conflits sont exacerbés ou même artificiellement provoqués pour fournir un écran de fumée à l’exploitation illicite et abusive de ces précieuses ressources. Lors de sa conférence de presse dans l’avion à son retour à Rome de la République centrafricaine, le pape François a souligné la triste réalité : « il y a des puissances qui ne cherchent qu’à prendre la grande richesse de l’Afrique… mais elles ne pensent pas à l’aider à grandir ». [2]
Monsieur le Président,
Une attention accrue portée à la paix et à la sécurité sur le continent africain, ainsi que le rôle très spécifique des opérations de maintien de la paix renforcées, aideront les pays africains à prospérer. Cela profitera non seulement aux pays de la région, mais aussi à ceux qui sont au-delà.
Je vous remercie, Monsieur le Président.
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NOTES
- António Guterres, Allocution au débat de haut niveau du Conseil de sécurité sur l’Action collective visant à améliorer les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, 28 mars 2018.
- Pape François, Conférence de presse en vol de la République centrafricaine à Rome, 30 novembre 2015.
© Traduction de Zenit, Hélène Ginabat