Audience avec la Poste italienne © Vatican Media

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Poste italienne : les conseils du pape pour que les clients ne soient pas "des numéros"

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Sourire, bienveillance, universalité du service (Traduction intégrale)

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Le sourire, la bienveillance, l’universalité du service… ce sont les recommandations du pape François aux employés de la Poste italienne qu’il a reçus ce 10 février 2018, au Vatican. Au cours de cette audience avec les dirigeants et le personnel de l’entreprise nationale, le pape a souligné que « la vraie richesse réside dans les personnes », appelant à ne pas les traiter « comme des numéros sans visages ».
Il a conseillé « un style d’écoute, de disponibilité et de respect » en s’entraînant « tous les jours, en s’éduquant à agir avec miséricorde, même dans les petits gestes et dans les pensées ». Le pape a surtout insisté sur le « sourire » : « Arrive la petite vieille qui est un peu sourde, et tu lui expliques mais elle n’entend pas… Et tu souris, au lieu de “pfff”… Le sourire est toujours un pont… le sourire va du cœur au cœur. N’oubliez pas le sourire ! »
Le pape François a aussi demandé aux clients de « ne pas avoir … une attitude d’exigence ou de plainte, en chargeant les employés de leurs frustrations ou de tous les maux de la société ».
Il a par ailleurs plaidé pour que le monde du travail prenne en compte « les besoins particuliers des mères, ainsi que les besoins des familles, à protéger et à favoriser à tout prix » : « le plein respect de celui qui travaille et de ses droits ne s’oppose pas au profit et à l’efficacité, mais au contraire les augmente », a-t-il assuré.
Voici notre traduction intégrale du discours qu’il a prononcé.
Discours du pape François
Chers frères et sœurs,
Je vous souhaite la bienvenue et je remercie la présidente pour ses aimables paroles. J’adresse mes salutations cordiales aux dirigeants et aux employés de la Poste italienne, en les étendant aussi à vos collègues qui ne sont pas là aujourd’hui.
La Poste italienne est liée de façon inséparable à la vie et à l’histoire de l’Italie : elle en a accompagné les événements, depuis sa fondation comme Etat unitaire. Elle a contribué en un certain sens à la garder unie, en mettant en contact les familles et les lieux lointains. Nous savons bien combien la communication est au cœur de notre société, et comment diverses régions parviennent à accomplir un chemin commun dans un échange continuel d’informations et de biens. Cela influe directement aussi sur le développement économique d’un pays, qui a besoin de services efficaces et de qualité.
Dans cet itinéraire au côté de la nation et du peuple italien, la Poste italienne a dû et a su se renouveler, en s’adaptant à l’époque. En ces dernières décennies, en effet, presque tous les aspects de la vie des personnes et de la société se sont transformés, à partir des moyens de communication et de transport. La grande accélération donnée par une technologie toujours plus développée, omniprésente et souvent envahissante, a changé la mentalité et les styles de vie, en créant de nouvelles exigences et en demandant toujours plus d’efficacité. La Poste italienne s’est engagée à fond pour affronter ces défis actuels avec clairvoyance, en diversifiant les services et en mettant en pratique une stratégie d’investissement qui regarde l’avenir, avec un engagement ramifié des nouvelles technologies et dans un effort continu de recherche et d’innovation.
Ce regard vers l’avenir, de la part de la Poste italienne, dans le choix de moyens de transport et dans d’autres décisions programmatiques, a aussi tenu compte de la protection de l’environnement naturel. Comme je l’ai souligné dans l’encyclique Laudato si’, il ne peut pas y avoir de vrai développement en ignorant la capacité de la nature de se régénérer, ou en la concevant non comme notre maison commune, mais comme un magasin plein de ressources à consommer.
Cependant, ce qui est le plus important dans l’œuvre de restructuration et de renouvellement que vous avez accomplie, est d’avoir mis en œuvre une stratégie d’entreprise fidèle à la vocation d’origine, d’être au service des citoyens. Tout en suivant une logique de marché, la Poste italienne a mis au centre non pas le profit mais les personnes, en rappelant que tous les services offerts seraient vidés de leur valeur s’ils n’étaient utilisables que par quelques-uns, ou s’ils ne répondaient pas aux exigences concrètes des usagers. C’est d’autant plus important dans notre contexte économique et social, qui vise si souvent un profit comme fin en soi, en oubliant que la vraie richesse réside dans les personnes, et donc les traite souvent comme des numéros sans visages : celui qui a un numéro élevé est considéré et respecté, alors que celui qui est considéré comme un zéro est jeté : notre “culture du déchet” d’aujourd’hui.
Face à ce drame, conséquence de l’égoïsme et d’une profonde myopie spirituelle, vous êtes appelés à épouser la logique opposée, qui met au centre les exigences et le soin des personnes. Vous l’avez fait en adaptant, comme critère-guide des choix stratégiques de l’entreprise, l’attention au client, en fixant des standards à atteindre dans les prestations et en personnalisant les services, en soignant la formation du “personnel de contact” et en interagissant avec les clients.
Je vous exhorte tous, vous qui êtes chaque jour en relation avec le public et qui cherchez à répondre à ses exigences, à garder cette attitude de disponibilité et de bienveillance envers celui qui s’adresse à vous.
Il est important, lorsqu’on se rend à un guichet ou dans un bureau, de rencontrer des personnes qui font bien leur travail, qui ne soufflent pas ni ne donnent l’impression de te considérer comme un poids, ou font semblant de ne pas te voir. Par ailleurs, les clients doivent être attentifs à ne pas avoir – comme malheureusement cela arrive ! – une attitude d’exigence ou de plainte, en chargeant les employés de leurs frustrations ou de tous les maux de la société ! Comme il est difficile, mais aussi comme il est important, que dans les mille relations quotidiennes entre collègues et avec les citoyens, l’on conserve un style d’écoute, de disponibilité et de respect ! Et cela coûte de la fatigue, ce n’est pas facile. Pour y parvenir, il est indispensable de s’entraîner tous les jours, en s’éduquant à agir avec miséricorde, même dans les petits gestes et dans les pensées. Un sourire, un sourire ! Arrive la petite vieille qui est un peu sourde, et tu lui expliques mais elle n’entend pas… Et tu souris, au lieu de “pff”… Le sourire est toujours un pont, mais c’est un pont des “grands” [d’âme], car le sourire va du cœur au cœur. N’oubliez pas le sourire ! Celui qui se comporte comme cela devient contagieux, car le sourire est contagieux, et la paix qu’il sème ne manque pas de produire du fruit.
Le soin pour la personne, assumé depuis toujours par la Poste italienne comme son critère-guide, se manifeste non seulement dans l’attention que vous avez pour les clients, mais aussi pour les employés, qui offrent en premier leurs énergies et leurs compétences pour le bien de l’entreprise. Si souvent, le monde du travail ignore, ou fait semblant de ne pas voir, les besoins particuliers des mères, ainsi que les besoins des familles, à protéger et à favoriser à tout prix ! La Poste italienne, au contraire, a toujours cherché à avoir une attention particulière pour les employées et les familles, représentant un signe pour tout environnement de travail, et montrant que le plein respect de celui qui travaille et de ses droits ne s’oppose pas au profit et à l’efficacité, mais au contraire les augmente.
Dans l’équilibre difficile entre limitation des coûts et compétitivité, soyez toujours attentifs à ce que la préoccupation pour le bilan ne se fasse pas au détriment de la qualité du travail, ni ne compromette ce principe d’universalité dans l’offre des services, réalisée à travers la présence capillaire de Bureaux de poste et de guichets sur tout le territoire national. La proximité vis-à-vis des personnes qu’ils assurent, doit être maintenue avec toute l’énergie nécessaire, car elle garantit à beaucoup, en particulier aux plus faibles, un point de référence pour leur exigence, et comme une garnison de défense.
Chers frères et sœurs, je vous remercie pour l’opportunité de cette rencontre. Je vous demande, s’il vous plaît, de prier pour moi. J’invoque la bénédiction de Dieu sur vous, sur vos familles et sur chacune de vos propositions de bien. Merci.
Traduction de Zenit, Anne Kurian

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Anne Kurian-Montabone

Baccalauréat canonique de théologie. Pigiste pour divers journaux de la presse chrétienne et auteur de cinq romans (éd. Quasar et Salvator). Journaliste à Zenit depuis octobre 2011.

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