La situation de vulnérabilité des enfants et adolescents non accompagnés est « une insulte à la dignité humaine », a déclaré Mgr Jurkovic, observateur permanent du Saint-Siège auprès des Nations Unies à Genève.
Mgr Jurkovic est en effet intervenu à la 35è session du Conseil des droits de l’homme intitulée : « Table ronde sur les enfants et les adolescents migrants non accompagnés et les droits de l’homme », à Genève, le 9 juin 2017.
La communauté internationale doit apporter « une réponse à ces souffrances et à la privation des droits fondamentaux de l’homme qui sont inscrits dans la Convention relative aux droits de l’enfant », a-t-il exhorté.
Mgr Jurkovic a demandé que les enfants soient considérés « comme des enfants ». Il a dénoncé « le modèle de détention » qui consiste à « détenir des enfants migrants », les considérant comme « responsables des situations dans lesquelles ils se trouvent ». Il a aussi invité à une « approche à long terme » pour lutter contre les « situations tragiques et intolérables » dans les pays d’origine.
Voici notre traduction de l’intervention de Mgr Jurkovic, délivrée en anglais.
CR
Déclaration de Mgr Jurkovic
Monsieur le Président,
La délégation du Saint-Siège se félicite de l’attention accordée aux enfants migrants non accompagnés au cours de la présente session du Conseil des droits de l’homme et souhaite remercier les membres de la table ronde pour leurs présentations.
Dans son Message pour la Journée Mondiale des Migrants et des Réfugiés de 2017, le Pape François a souligné les difficultés et les dangers auxquels sont confrontés les enfants migrants. En raison de la situation précaire dans laquelle ils se trouvent, les enfants sont très vulnérables, surtout lorsqu’ils ne sont pas accompagnés, car ils sont « invisibles et sans voix, cachés aux yeux du monde ».
Trop souvent, les enfants migrants se retrouvent facilement aux niveaux les plus bas de la dégradation humaine, leur espoir et leur avenir étant détruits. Ils n’ont pas accès à l’éducation et aux soins de santé et ils sont confrontés au grand risque de vulnérabilité vis-à-vis des trafiquants d’êtres humains, des prédateurs sexuels et d’autres personnes sans scrupules qui souhaitent porter préjudice aux enfants et aux adolescents. Il s’agit d’une insulte à la dignité humaine, et toute la communauté internationale devrait faire tout son possible pour donner une réponse à ces souffrances et à la privation des droits fondamentaux de l’homme qui sont inscrits dans la Convention relative aux droits de l’enfant.
Au cours de la dernière session du Conseil des droits de l’homme, le Saint-Siège a accueilli un événement parallèle, avec la Commission internationale catholique des migrations (CICM) et Caritas Internationalis, pour attirer l’attention sur les raisons pour lesquelles tant d’enfants sont en déplacement sans la protection de leurs parents ou d’autres membres de leur famille et sur ce qui est nécessaire pour répondre à une escalade si dramatique des enfants non accompagnés en déplacement.
Le Saint-Siège réitère son appel fort à protéger la dignité et les droits fondamentaux de chaque personne et mettre en œuvre, sans réserve, le droit, les principes et les politiques humanitaires en réponse aux personnes en déplacement, en particulier les enfants non accompagnées : ils doivent d’abord et avant tout être considérés comme des enfants, et leur intérêt doit être une considération primordiale dans toutes les actions qui les concernent.
Monsieur le Président,
Respecter les enfants, c’est respecter toute l’humanité, car ils sont notre avenir et notre espoir. Les enfants ne devraient pas être traités comme des criminels ni soumis à des mesures punitives en raison de leur propre statut migratoire ou de celui de leurs parents. La pratique consistant à détenir des enfants migrants ne devrait pas être une option, et l’intérêt supérieur de l’enfant devrait toujours prévaloir. En effet, même une courte période de détention peut avoir des conséquences durables sur le développement d’un enfant. L’erreur grave du modèle de détention est qu’elle considère les enfants comme des sujets seuls, isolés, responsables des situations dans lesquelles ils se trouvent et sur lesquels ils ont peu ou pas de contrôle. Ce modèle décharge à tort la communauté internationale en général des responsabilités qu’elle ne parvient pas à assumer normalement.
Bien que la protection des droits fondamentaux de l’homme et la dignité de chaque personne soient vitales et essentielles, ce n’est pas suffisant. Les guerres, la violence, les violations des droits de l’homme, la corruption, la pauvreté extrême, les catastrophes environnementales sont toutes des causes de cette urgence humanitaire des enfants non accompagnés en déplacement. Une approche à long terme est nécessaire de manière urgente pour s’attaquer aux situations tragiques et intolérables qui entraînent une augmentation aussi considérable du nombre d’enfants qui abandonnent leurs terres et recherchent seuls un refuge et une espérance pour l’avenir.
La possibilité d’un développement humain intégral authentique devrait être garantie pour tous les enfants. À cet égard, le Saint-Siège insiste pour que nos considérations soient directement liées aux centaines de millions d’enfants qui vivent dans des conditions épouvantables dans leur pays natal. Alors que nous sommes engagés dans une discussion et un débat aujourd’hui, un certain nombre de ces enfants auront rejoint l’odyssée déjà énorme des enfants en mouvement – simplement en quête de sécurité, de paix et d’une chance équitable dans la vie.
Monsieur le Président,
Les enfants non accompagnés en mouvement sont la preuve dramatique des inégalités existantes et des systèmes défaillants. Au fur et à mesure que les consultations pour l’élaboration du Pacte mondial sur les migrations sont en cours, comment pouvons-nous veiller à ce que les droits des enfants et des adolescents migrants non accompagnés soient dûment protégés et promus ?
Merci, Monsieur le Président.
© Traduction de Zenit, Constance Roques