« La santé de toute société dépend de la santé des familles » a déclaré le pape François lors de la messe ce jeudi 26 novembre, sur le campus universitaire de Nairobi, sous la pluie.
C’était la première messe du pape François sur le continent africain, en présence du président Uhuru Kenyatta. Des évaluations provisoires parlent de centaines de milliers de personnes : certaines sources ont même parlé d’un million. La foule s’était mise en marche au cœur de la nuit, dès 2h du matin pour rejoindre le campus, étroitement surveillé par les forces de police et l’armée.
« La société du Kenya a longtemps été bénie par une solide vie familiale, par un profond respect de la sagesse des personnes âgées et par l’amour envers les enfants, a dit le pape François. La santé de toute société dépend toujours de la santé des familles. »
Le pape a dénoncé la violence contre les femmes et les enfants à naître : « Par obéissance à la Parole de Dieu, nous sommes aussi appelés à résister aux pratiques qui favorisent l’arrogance chez les hommes, qui blessent ou méprisent les femmes, et qui menacent la vie des innocents qui ne sont pas encore nés. »
Il a insisté sur la vocation de la famille chrétienne : « Les familles chrétiennes ont cette mission spéciale : rayonner l’amour de Dieu et répandre l’eau vivifiante de son Esprit. »
Il a lancé aux jeunes le défi de construire une société « inclusive » : « Que les grandes valeurs de la tradition africaine, la sagesse et la vérité de la Parole de Dieu, ainsi que le généreux idéalisme de votre jeunesse, vous guident dans l’engagement à former une société qui soit toujours plus juste, inclusive et respectueuse de la dignité humaine. »
Des jeunes étudiants survivants de l’attaque du campus de l’université de Garissa, où 148 d’entre eux ont été massacrés en avril dernier, ont participé à la messe.
Voici le texte complet de l’homélie du pape François.
Homélie du pape François
La parole de Dieu parle au plus fond de notre cœur. Aujourd’hui Dieu nous dit que nous lui appartenons. Il nous a faits, nous sommes sa famille, et il sera toujours présents pour nous. “Ne craignez pas – nous dit-il – : je vous ai choisis et je vous promets de vous donner ma bénédiction’’ (cf. Is 44, 2-3).
Nous avons entendu cette promesse dans la première lecture. Le Seigneur nous dit qu’il fera jaillir de l’eau dans le désert, dans une terre assoiffée ; il fera en sorte que les enfants de son peuple fleurissent comme de l’herbe, comme des saules luxuriants. Nous savons que cette prophétie s’est accomplie par l’effusion du Saint Esprit à la Pentecôte. Mais nous voyons aussi qu’elle s’accomplit partout où l’Évangile est prêché et où de nouveaux peuples deviennent membres de la famille de Dieu, l’Église. Aujourd’hui nous nous réjouissons parce qu’elle s’est accomplie sur cette terre. Par la prédication de l’Évangile, nous sommes tous devenus participants de la grande famille chrétienne.
La prophétie d’Isaïe nous invite à regarder nos familles et à nous rendre compte combien elles sont importantes dans le plan de Dieu. La société du Kenya a longtemps été bénie par une solide vie familiale, par un profond respect de la sagesse des personnes âgées et par l’amour envers les enfants. La santé de toute société dépend toujours de la santé des familles. Pour leur bien et celui de la communauté, la foi dans la parole de Dieu nous appelle à soutenir les familles dans leur mission à l’intérieur de la société, à accueillir les enfants comme une bénédiction pour notre monde, et à défendre la dignité de tout homme et de toute femme, puisque nous sommes tous frères et sœurs dans l’unique famille humaine.
Par obéissance à la Parole de Dieu, nous sommes aussi appelés à résister aux pratiques qui favorisent l’arrogance chez les hommes, qui blessent ou méprisent les femmes, ne prennent aucun soin des personnes âgées et qui menacent la vie des innocents qui ne sont pas encore nés. Nous sommes appelés à nous respecter, à nous encourager mutuellement, et à rejoindre tous ceux qui sont dans le besoin. Les familles chrétiennes ont cette mission spéciale : rayonner l’amour de Dieu et répandre l’eau vivifiante de son Esprit. Ceci est particulièrement important aujourd’hui, parce que nous assistons à l’avancée de nouveaux déserts créés par une culture de l’égoïsme et le l’indifférence envers les autres.
Ici, au cœur de cette Université, où les esprits et les cœurs des nouvelles générations sont formés, je lance un appel particulier aux jeunes de la nation. Que les grandes valeurs de la tradition africaine, la sagesse et la vérité de la Parole de Dieu, ainsi que le généreux idéalisme de votre jeunesse, vous guident dans l’engagement à former une société qui soit toujours plus juste, inclusive et respectueuse de la dignité humaine. Que les besoins des pauvres vous soient toujours à cœur; rejetez tout ce qui conduit au préjugé et à la discrimination, parce que ces choses – nous le savons – ne sont pas de Dieu.
Tous nous connaissons bien la parabole de Jésus sur l’homme qui a construit sa maison sur le sable plutôt que sur le roc. Quand les vents ont soufflé, elle est tombée et sa ruine a été grande (cf. Mt 7, 24-27). Dieu est le rocher sur lequel nous sommes appelés à construire. Il nous le dit dans la première lecture, et il nous demande : « Y a-t-il un Dieu en dehors de moi ? » (Is 44, 8).
Quand Jésus ressuscité affirme dans l’Évangile de ce jour : « Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre » (Mt 28, 18) il nous dit que lui-même, le Fils de Dieu, est le rocher. Il n’y en a pas d’autre que lui. Unique Sauveur de l’humanité, il désire attirer à lui les hommes et les femmes de toute époque et de tout lieu, afin de pouvoir les conduire au Père. Il veut que tous nous construisions notre vie sur le fondement solide de sa Parole.
Cela c’est la tâche que le Seigneur attribue à chacun de nous. Il nous demande d’être des disciples missionnaires, des hommes et des femmes qui rayonnent la vérité, la beauté et la puissance de l’Évangile qui transforme la vie. Des hommes et des femmes qui soient des canaux de la grâce de Dieu, qui permettent à sa miséricorde, à sa bienveillance et à sa vérité de devenir les éléments pour construire une maison qui demeure solide. Une maison qui soit un foyer où les frères et sœurs vivent enfin en harmonie et dans le respect réciproque, dans l’obéissance à la volonté du vrai Dieu, qui nous a montré, en Jésus, la voie vers cette liberté et cette paix auxquelles tous les cœurs aspirent.
Que Jésus, le Bon Pasteur, le rocher sur lequel nous construisons nos vies, vous guide ainsi que vos familles sur la voie du bien et de la miséricorde, tous les jours de votre vie. Qu’il bénisse de sa paix tous les habitants du Kenya.
«Soyez forts dans la foi! N’ayez pas peur!». Car vous appartenez au Seigneur.
Mungu awabariki! [Que Dieu vous bénisse! ]
Mungu abariki Kenya! [Que Dieu bénisse le Kenya! ]
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