Demander la grâce de « la diversité réconciliée » : c’est ce que suggère le pape François à l’occasion de sa visite à la communauté luthérienne de Rome.
L’Église luthérienne évangélique de Rome, via Sicilia, a reçu la visite du pape François, dimanche soir, 15 novembre : elle avait reçu la visite du pape émérite Benoît XVI le 14 mars 2010 et celle de saint Jean-Paul II, le 11 décembre 1983. Comme Benoît XVI, le pape a été reçu par Jens-Martin Kruse, pasteur de cette communauté.
« Demandons aujourd’hui cette grâce, la grâce de cette diversité réconciliée dans le Seigneur, c’est-à-dire dans le serviteur du Seigneur, de ce Dieu qui est venu parmi nous pour servir et non pour être servi », a dit le pape François dans son homélie improvisée.
Notre traduction de l’homélie préparée se trouve ici.
Notre traduction de l’échange avec la communauté évangélique se trouve ici.
Voici notre traduction compète de son homélie faite d’abondance du cœur.
A.B.
Homélie du pape François
Au cours de sa vie, Jésus a fait de nombreux choix. Celui que nous avons entendu aujourd’hui sera son dernier choix. Jésus a fait de nombreux choix : les premiers disciples, les malades qu’il guérissait, la foule qui le suivait… On le suivait pour l’écouter parce qu’il parlait comme quelqu’un qui a autorité, pas comme leurs docteurs de la loi qui se pavanaient ; mais nous pouvons lire qui étaient ces gens, deux chapitres avant, au chapitre 23 de Matthieu ; non, en lui, ils voyaient l’authenticité ; et ces gens le suivaient. Jésus faisait ses choix, et aussi ses corrections, avec amour. Quand les disciples se trompaient dans leurs méthodes : « Veux-tu que nous fassions tomber le feu du ciel ? — Mais vous ne savez pas ce que vous dites. » Ou quand la maman de Jacques et Jean est allée demander au Seigneur : « Seigneur, je veux te demander une faveur, que mes deux fils, quand tu règneras… l’un soit à droite, l’autre à gauche… » Et lui, il corrigeait ces choses : il guidait, il accompagnait toujours. Mais aussi après la résurrection, c’est très attendrissant de voir comment Jésus choisit les moments, choisit les personnes, il ne fait pas peur.
Pensons au chemin vers Emmaüs, comment il les accompagne [les deux disciples]. Ils devaient aller à Jérusalem, mais ils ont fui Jérusalem, par peur, et lui, il va avec eux, il les accompagne. Et ensuite, il se fait voir, il les récupère. C’est un choix de Jésus. Et puis le grand choix qui me touche toujours, quand il [le père de la parabole] prépare le mariage de son fils et qu’il dit : « Mais allez au carrefour des routes et ramenez ici les aveugles, les sourds, les boiteux… » Les bons et les mauvais ! Jésus choisit toujours. Et encore le choix de la brebis perdue. Il ne fait pas de calcul financier : « Mais, j’en ai quatre-vingt-dix-neuf, j’en perds une… ». Non !
Mais son dernier choix sera définitif. Et quelles seront les questions que le Seigneur nous posera ce jour-là : « Es-tu allé à la messe ? As-tu bien suivi le catéchisme ? » Non, les questions sont sur les pauvres, parce que la pauvreté est au centre de l’Évangile. Lui qui était riche s’est fait pauvre pour nous enrichir de sa pauvreté. Il n’a pas considéré comme un privilège d’être comme Dieu mais il s’est anéanti, il s’est humilié jusqu’au bout, jusqu’à la mort sur la croix (cf. Ph 2,6-8). C’est le choix du service. Jésus est Dieu ? C’est vrai. Il est le Seigneur ? C’est vrai. Mais il est le serviteur, et son choix, il le fera sur ce point. Toi, ta vie, tu l’as employée pour toi ou pour servir ? Pour te protéger des autres avec des murs ou pour les accueillir avec amour ? Et ce sera le dernier choix de Jésus. Cette page de l’Évangile nous dit beaucoup de choses sur le Seigneur. Et je peux me poser la question : mais nous, luthériens et catholiques, de quel côté serons-nous, à droite ou à gauche ? Mais il y a eu des temps difficiles entre nous… Pensez aux persécutions… entre nous ! Avec le même baptême ! Pensez à tous ceux qui ont été brûlés vifs. Nous devons nous demander pardon pour cela, pour le scandale de la division, parce que tous, luthériens et catholiques, nous sommes dans ce choix, pas dans d’autres choix, dans ce choix, le choix du service, comme il nous l’a indiqué en étant serviteur, le serviteur du Seigneur.
Pour conclure, j’aime, quand je vois le Seigneur serviteur qui sert, j’aime lui demander d’être lui-même le serviteur de l’unité, qu’il nous aide à marcher ensemble. Aujourd’hui, nous avons prié ensemble. Prier ensemble, travailler ensemble pour les pauvres, pour les personnes démunies ; nous aimer ensemble, d’un vrai amour de frères. « Mais Père, nous sommes différents, parce que nos livres dogmatiques disent une chose et les vôtres en disent une autre. » Mais un de vos grands [représentants] a dit une fois qu’il y a l’heure de la diversité réconciliée. Demandons aujourd’hui cette grâce, la grâce de cette diversité réconciliée dans le Seigneur, c’est-à-dire dans le serviteur du Seigneur, de ce Dieu qui est venu parmi nous pour servir et non pour être servi.
Je vous remercie beaucoup pour votre accueil fraternel. Merci.
© Traduction de Zenit, Constance Roques