Les entrepreneurs chrétiens doivent être attentifs « à la qualité de vie au travail des employés, qui sont la ressource la plus précieuse de l’entreprise », déclare le pape François.
Le pape a en effet reçu en audience, samedi, 31 octobre, des représentants de l’Union chrétienne des entrepreneurs dirigeants (UCID) italiens, en présence du cardinal Salvatore De Giorgi, archevêque émérite de Palerme. Un discours qui est un concentré de son enseignement social.
Les entrepreneurs chrétiens sont « appelés à vivre la fidélité aux exigences évangéliques et à la Doctrine sociale de l’Église en famille, au travail et dans la société », déclare le pape François.
Pour le pape, l’entreprise peut être un « lieu de sanctification », « grâce à l’engagement de chacun pour construire des rapports fraternels entre entrepreneurs, dirigeants et travailleurs, en favorisant la coresponsabilité et la collaboration dans l’intérêt commun ». Il recommande surtout « d’avoir une attention spéciale à la qualité de vie au travail des employés, qui sont la ressource la plus précieuse de l’entreprise », et de créer des emplois, surtout pour les jeunes.
Voici notre traduction intégrale de l’allocution du pape.
A.B.
Discours du pape François
Chers frères et sœurs, bonjour !
Je vous adresse à tous cordialement la bienvenue et je remercie le cardinal De Giorgi et le Président national pour leur introduction à cette rencontre.
L’Union chrétienne des entrepreneurs dirigeants réunit les entrepreneurs catholiques qui se donnent l’objectif d’être des artisans du développement pour le bien commun. Pour ce faire, vous donnez une grande importance à la formation chrétienne, réalisée avant tout par l’approfondissement du magistère social de l’Église. Un tel engagement de formation est le fondement de votre action, personnellement, dans la manière de vivre votre profession, mais aussi, et cela y est associé, dans l’apostolat auprès de votre entourage. Je vous exhorte donc à poursuivre avec enthousiasme vos activités de formation, afin d’être un ferment et un stimulant, par la parole et par l’exemple, dans le monde de l’entreprise.
En tant qu’association ecclésiale, reconnue par les évêques, vous êtes appelés à vivre la fidélité aux exigences évangéliques et à la Doctrine sociale de l’Église en famille, au travail et dans la société. Ce témoignage est très important. C’est pour cela que je vous encourage à vivre votre vocation entrepreneuriale dans un véritable esprit missionnaire laïc. En fait, la vocation d’entrepreneur, « est un travail noble, qui se laisse toujours interroger par une signification plus vaste de la vie ; ceci lui permet de servir véritablement le bien commun, par ses efforts à multiplier et rendre plus accessibles à tous les biens de ce monde (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 203).
L’entreprise et le bureau managérial des entreprises peuvent devenir des lieux de sanctification, grâce à l’engagement de chacun pour construire des rapports fraternels entre entrepreneurs, dirigeants et travailleurs, en favorisant la coresponsabilité et la collaboration dans l’intérêt commun. Il est décisif d’avoir une attention spéciale pour la qualité de vie au travail des employés, qui sont la ressource la plus précieuse de l’entreprise ; en particulier pour favoriser l’harmonisation entre travail et famille. Je pense de manière particulière aux travailleuses : le défi est de défendre conjointement leur droit à un travail pleinement reconnu et leur vocation à la maternité et à la présence en famille. Combien de fois, combien de fois avons-nous entendu une femme aller vers son patron et lui dire : « Je dois vous dire que je suis enceinte. — A la fin du mois tu ne travailles plus. » La femme doit être protégée, aidée dans ce double travail : le droit de travailler et le droit à la maternité. La responsabilité des entreprises est également significative dans la défense et la protection de la création, et pour réaliser un « progrès plus sain, plus humain, plus social et plus intégral » (Encyclique Laudato si’, n. 112).
Cet appel à être missionnaires de la dimension sociale de l’Évangile dans le monde difficile et complexe du travail, de l’économie et de l’entreprise, comporte également une ouverture et un voisinage évangélique avec les diverses situations de pauvreté et de fragilité. Il s’agit, là aussi, d’une attitude, d’un style pour faire avancer les programmes de promotion et d’assistance, et développer les nombreuses et méritantes œuvres concrètes de partage et de solidarité que vous soutenez dans différents endroits d’Italie. Ceci sera un moyen qui vous est propre pour mettre en pratique la grâce du Jubilé de la miséricorde. L’un de vous pourra me dire : « Ah ! mon Père, pratiquer la miséricorde !… Faisons un peu de bienfaisance… » Faire de l’assistance ne suffit pas, un peu de bienfaisance ne suffit pas, c’est peut-être une première étape. Il est nécessaire d’orienter l’activité économique dans un sens évangélique, c’est-à-dire au service de la personne et du bien commun. Dans cette perspective, vous êtes appelés à coopérer pour faire grandir un esprit entrepreneurial de subsidiarité, afin d’affronter ensemble les défis de l’éthique et du marché, et le premier d’entre eux, c’est de créer de l’emploi. Pensez aux jeunes, je crois que 40 % des jeunes ici sont aujourd’hui sans travail. Dans un autre pays voisin, ce sont 47 %, dans un autre pays voisin, plus de 50 %. Pensez aux jeunes, soyez créatifs dans la création d’emplois qui vont de l’avant et donnent à leur tour du travail, parce que celui qui n’a pas de travail, non seulement il ne rapporte pas de pain à la maison mais il perd sa dignité ! Les initiatives de comparaisons et d’études, que vous réalisez sur le territoire, contribuent aussi à tracer cette voie.
L’entreprise est un bien d’intérêt commun. Bien qu’elle soit un bien de propriété et de gestion privée, par le simple fait qu’elle poursuit des objectifs d’intérêt et d’importance générale, par exemple le développement économique, l’innovation et l’embauche, elle pourrait être protégée en tant que bien en soi. Ce sont les institutions qui, les premières, sont appelées à les protéger, mais aussi les entrepreneurs, les économistes, les agences financières et bancaires : toutes les personnes impliquées ne doivent pas manquer d’agir avec compétence, honnêteté et sens des responsabilités. L’économie et l’entreprise ont besoin d’une éthique pour leur propre fonctionnement, pas d’une éthique quelconque mais bien d’une éthique qui met au centre la personne et la communauté. Aujourd’hui, je renouvelle votre mandat pour vous engager ensemble à cette fin ; et vous porterez des fruits dans la mesure où l’Évangile sera vivant et présent dans vos cœurs, dans votre esprit et dans vos actions.
Je vous confie, vous, votre travail, vos familles et vos employés à la protection de saint Joseph travailleur, le grand saint Joseph. J’invoque sur chacun la bénédiction du Seigneur. Et, s’il vous plaît, je vous demande de prier pour moi : je vous donne également cette tâche !
© Traduction de Zenit, Hugues de Warren