Mgr Paul Richard Gallagher

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Centrafrique : la population est « fatiguée de la violence »

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Intervention du Saint-Siège à l’ONU (traduction complète)

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« Il devrait être clair pour tous que la population rejette l’extrémisme, qu’elle n’a aucun désir de déstabiliser les institutions et qu’elle est fatiguée de la violence », a déclaré le représentant du Saint-Siège à l’ONU, il y a tout juste un mois, à propos de la situation en Centrafrique.

Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire pour les Relations avec les États, est en effet intervenu à propos de la situation en République centrafricaine, à New York, le 2 octobre 2015.

Il dénonce le faux prétexte religieux en disant : « Une fois encore, malheureusement, nous devons déplorer que la profession religieuse des personnes soit mise en avant et manipulée à des fins politiques. En République centrafricaine, il n’y avait pas de conflit de nature religieuse dans un passé récent, et il n’y en a pas non plus aujourd’hui ; la coopération fructueuse entre les responsables religieux en est la preuve. Le peuple de cette noble nation a toujours été habitué à une coexistence pacifique. »

Nous publions notre traduction intégrale du discours de Mgr Gallagher, au lendemain de l’appel du pape François à la fin des violences et de l’annonce que son voyage en Centrafrique (29-30 novembre) sera l’occasion d’ouvrir la Porte sainte de la cathédrale Notre-Dame de Bangui.

A.B.

 

Allocution de Mgr Gallagher

Monsieur le Président,

Le Saint-Siège, comme le reste de la communauté internationale, surveille avec inquiétude les événements qui se déroulent actuellement en République centrafricaine. Je fais allusion aux affrontements entre militants de différentes factions qui ont eu lieu à Bangui, après le meurtre d’un jeune musulman dans la nuit 25 au 26 septembre derniers. Ces affrontements ont ensuite dégénéré en attaques violentes par les prétendus groupes armés anti-Balaka contre la mission militaire de l’ONU, la MINUSCA.

Des rapports ont parlé d’au moins cinquante morts, de nombreux blessés et de milliers de personnes qui ont dû quitter leur foyer à la suite des affrontements. Des bâtiments du gouvernement ont été attaqués, une prison a été prise d’assaut et des prisonniers ont été libérés, tandis que les attaques contre le siège d’ONG travaillant dans le pays ont été particulièrement féroces.

Les dernières informations indiquent que les forces de la MINUSCA ont repris le contrôle de la situation à la suite de violents combats, mais les tensions restent fortes dans la capitale.

La préoccupation du Saint-Siège, partagées par tous ceux qui aiment ce pays, est que le processus de transition, qui sortait lentement le pays du chaos vers un nouveau départ, a été compromis. Les élections, qui devraient se tenir à l’automne prochain, devraient permettre au peuple de la République centrafricaine d’exprimer, dans le respect des principes diplomatiques, leur volonté de construire un nouvel avenir et de dépasser définitivement les conflits fratricides et les jeux d’intérêts personnels.

Au cours de la période de transition, nous avons vu une nation, épuisée par des mois de violence, prendre lentement mais sûrement sa destinée en main. Elle a été pour cela assistée par un large consensus régional et international qui s’est traduit par un soutien pratique pour la reconstruction matérielle et spirituelle du pays. Nous ne pouvons pas permettre qu’un effort aussi ample et louable, mené par les institutions de transition, soit compromis par des intérêts unilatéraux qui ne veulent clairement pas accepter les règles démocratiques et qui sont totalement insensibles au bien commun.

Les conflits de ces derniers jours semblent nous ramener en arrière, au conflit entre la Seleka musulmane et les forces anti-Balaka qui prétendent défendre les chrétiens et les animistes, un conflit qui a apporté beaucoup de mort et de destruction dans le pays, dans un passé récent.

Une fois encore, malheureusement, nous devons déplorer que la profession religieuse des personnes soit mise en avant et manipulée à des fins politiques. En République centrafricaine, il n’y avait pas de conflit de nature religieuse dans un passé récent, et il n’y en a pas non plus aujourd’hui ; la coopération fructueuse entre les responsables religieux en est la preuve. Le peuple de cette noble nation a toujours été habitué à une coexistence pacifique. À titre d’exemple, je peux attester que l’archevêque de Bangui, Mgr Dieudonné Nzapalainga, C.S.Sp., a accueilli dans sa résidence, le 28 septembre dernier, un groupe de musulmans fuyant les forces anti-Balaka. Les conflits qui ont récemment dévasté le pays et qui semblent avoir été ravivés ces derniers jours sont uniquement motivés par l’objectif de déstabiliser, par des jeux de pouvoir et par l’intention de dominer.

Ceci est prouvé par l’attitude des habitants de Bangui, qui sont stupéfaits par les récents événements et n’ont pas répondu aux appels à descendre dans la rue pour provoquer des attaques et de la confusion. Il devrait être clair pour tous que la population rejette l’extrémisme, qu’elle n’a aucun désir de déstabiliser les institutions et qu’elle est fatiguée de la violence.

Le Saint-Siège espère et prie pour que les institutions de transition, dirigées par la présidente Catherine Samba Panza, puissent conclure la phase de préparation des élections, dans un climat de dialogue avec les différentes forces politiques, afin de permettre au peuple de la République centrafricaine de décider de son avenir librement et pacifiquement.

© Traduction de Zenit, Constance Roques

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ZENIT Staff

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